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Cap de la Hague - Wikipédia

Cap de la Hague

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En anglais, le nom The Hague est le plus souvent employé pour désigner la ville hollandaise appelée en français La Haye (Den Haag en Néerlandais).

Presqu'île sur une péninsule, à la pointe nord-ouest du Cotentin, le cap de la Hague offre des paysages sauvages de toute beauté et a gardé, pour l'essentiel, ses villages et son habitat traditionnel. L'activité économique principale vient de l'usine de retraitement de déchets nucléaires, qui est source de controverses et souvent nommé simplement « La Hague ».

Sommaire

[modifier] Géographie

Le doyenné de la Hague était délimité au sud par la rivière Diélette (qui se jette près du Cap de Flamanville, à l'est la rivière Divette (qui se jette dans la mer à Cherbourg-Octeville) et à l'ouest et au nord par la mer de la Manche. Ainsi, outre les 20 paroisses de l'actuel canton de Beaumont-Hague, il comprennait également Siouville-Hague, Héauville, Teurthéville-Hague, Sideville, Nouainville, Querqueville, les paroisses d'Équeurdreville et Hainneville, et Octeville. Aujourd'hui, seule la communauté de communes de la Hague, unique intercommunalité a être entièrement sur ce territoire, communique sur ce nom.

Panorama depuis le Nez de Jobourg
Panorama depuis le Nez de Jobourg

Il s'agit donc d'une petite péninsule à l'angle nord-ouest de la péninsule du Cotentin et du département de la Manche, avec deux caps remarquables :

La Hague présente un littoral varié : falaises abruptes (entre Urville-Nacqueville et Omonville-la-Rogue, et entre Auderville et Vauville), au pied desquelles se trouve une succession de baies, grandes plages (Urville-Nacqueville et à Vauville), îlots et platiers rocheux (Cap de la Hague, pointe de Jardeheu, Saint-Germain-des-Vaux…), massifs dunaires (Biville), grèves de galets (Anse Saint-Martin), marais arrière-littoraux (Mare de Vauville) et vallons boisés (Hubiland, Sabine…). La côte est également agrémentée de petits ports (Goury, le Houguet, Port Racine, Port du Hâble…) et de mouillages.

La proximité de la mer et l'influence du Gulf Stream font que la région ne connaît généralement pas le gel. C'est donc un lieu important pour les oiseaux migrateurs en hiver (mare de Vauville), les bécasses. Le jardin botanique de Vauville expose de nombreuses plantes de l'hémisphère sud.

Elle est séparée par le Raz Blanchard des Îles Anglo-Normandes.

Le littoral haguais est protégé au titre de la loi du 2 mai 1930 relative à la protection des monuments et sites naturels, depuis la vallée du Hubiland (Urville-Nacqueville) jusqu'aux dunes de Biville, à l'exception de l'anse des Moulinets, où se situent les installations de l'usine de retraitement de la Hague. Il fait partie de l'opération Grand site national, le Conservatoire du littoral a engagé un politique intense d'acquisition (aujourd'hui 50% des côtes lui appartiennent). La côte est longée par le sentier des douaniers (GR 223).

[modifier] Faune et flore

Le Nez de Jobourg
Le Nez de Jobourg

La péninsule haguaise est principalement un pays de landes (et de bocage à l'intérieur des terres), formées de fougères, bruyères, genêts, ajoncs (de Le Gall et d'Europe)... Sur la côte, on trouve dans les haies aubépines, chênes, frênes, sycomores, sureaux. Il existe également une concentration d'ormes dans les haies de la côte nord, malheureusement très atteints par la graphiose.

Les falaises sont recouvertes de lichens, noirs et orangés, de salicornes, d'asperges prostrées, de statices de l'ouest et de carottes à gomme. Les corniches accueillent pelouse rase, arméries et Silènes maritimes. Aux abords des plages sont présents le chou marin, objet d'une protection, la véronique en épi, l'Œillet de France.

Dans les jardins protégés des vents marins par de hauts murs, on trouve traditionnellement nombres d'hortensias, des camélias, et quelques palmiers.

La Hague possède plusieurs réserves ornithologiques (le Nez de Jobourg, les Herbeuses...), où se côtoient les goélands (argentés et marins), les fous de Bassan, les grands corbeaux, les fulmars boréals, les mouettes tridactyles, les cormorans, les foulques. La mare de Vauville accueille plus de 140 espèces d'oiseaux : migrateurs (comme la fuligule morillon ou le Pipit farlouse), canards (colverts, sarcelles...), gravelots, ou encore hérons. Nichent également dans la Hague quelques rapaces comme le busard des roseaux et le Faucon crécerelle.

Outre les oiseaux, on trouve également des batraciens (crapauds accoucheurs, rainettes vertes) et des petits reptiles (lézards verts, orvets...). Grands dauphins et marsouins sont présents au large. Les tunnels militaires du Castel-Vendon abrite des colonies de chauves-souris.

Depuis une vingtaine d'années, les falaises de Jobourg abritent une harde de chèvres sauvages. Traditionnellement, chaque ferme avait quelques chèvres afin de nettoyer landes et haies. L'usage se perdant avec la mécanisation, ces animaux ont été peu à peu laissés à la vie sauvage, formant un troupeau qui arpente le chemin des douaniers. Elles permettent l'entretien nécessaire de la lande et sont à ce titre, désormais protégées par le Conservatoire du Littoral.

Concernant l'élevage, les vaches omniprésentes comme dans toute la Normandie, partagent les prés avec les moutons roussins (qui font l'objet d'une foire annuelle à Jobourg), et quelques ânes du Cotentin et ânes normands.

[modifier] Histoire

[modifier] Préhistoire et étymologie

Le site acheuléen de la Roche Gélétan (Saint-Germain-des-Vaux) a été occupé par des pré-Néandertaliens vers 300 000 av. J.-C. Il s'agit, avec le site de la Mondrée à Fermanville, du plus viel habitat en Normandie. Une deuxième vague d'habitants a laissé plusieurs sites vers 100 000 av. J.-C.

Le monument remarquable préhistorique du Hague-Dick (1000 av. J.-C.) qui barre la Hague d'ouest en est donnerait l'étymologie du mot Hague ( bien attesté ailleurs en Normandie, seul ou dans des composés comme Etauhague "enclos pour les chevaux" ). En effet, en indo-européen *khag- signifie "enclos", d'ou celtique *kagion "rempart, haie" gallois cae, breton kae et gaulois caio- qui a donné les mots "quai" (d'origine normande) et "chai" (d'origine poitevine), en germanique commun *hag- d'ou en français "haye", mais avant en vieux norrois hagi, en francique haga ou hagja (haie ou hauteur boisée),en hollandais haag, comme pour la ville de La Haye, appelée en anglais The Hague. Le nom peut donc être attribué tant aux Vikings qu'aux Saxons. Il est maintenant prouvé que le Hague-Dick servait à protéger les habitants de la pointe contre les attaques venant du continent. Le Hague-Dick(e) sépare la « pointe » du reste de la Hague. Il a éte réutilisé à diverses époques à titre de défense, jusqu'aux Vikings. Ensuite sa ligne de crête a servi de chemin. Le meilleur endroit pour en voir les restes est sur la route de Diguleville à Beaumont.

Sous l'Ancien Régime, le doyenné de la Hague comprennait toutes les communes entre les rivières Divette (coulant à Cherbourg) et Dielette. Le nom de ces communes était généralement suivi du mot Hague, ou de la mention "dans la Hague" dans les actes officiels, et ce depuis les années 1300.

[modifier] Influence maritime et isolement territorial

Le phare de la Hague, Goury, Auderville
Le phare de la Hague, Goury, Auderville
Le port Racine, Saint-Germain-des-Vaux
Le port Racine, Saint-Germain-des-Vaux
Batterie de La Haye (Auderville) en 1944
Batterie de La Haye (Auderville) en 1944

En 56 avant JC, les légions romaines ont vaincu la tribu locale des Unelles, basée à Coriallo (qui n'est peut-être qu'un autre nom donné à la pointe).

Des traces de camp romain (à Jobourg) et de villas gallo-romaines ont été identifiées. Beaucoup de noms de lieux attestent d'une forte colonisation… soit par les Vikings, ou par les Saxons. En raison du nombre de racines proches dans les langues scandinaves et saxonnes, il est difficile de les séparer. Il y a un siècle l'explication "tout Viking" prévalait et l'apport saxon était ignoré. Dans les 2 cas on a l'impression que tous les apports nouveaux venaient de la mer et non du "continent".

La région relevait de l'évêché de Coutances, mais les évangélisateurs de la Hague venaient d'Irlande ou d'Angleterre. Ainsi Saint Germain dit "le Scot" ou encore "à la rouelle" (425? - 480 ?) était soit prince Irlandais soit le fils d'un mercenaire Allemand dans les armées des Iles Britanniques. La rouelle serait en fait un coracle, petit bateau rond existant encore en irlande. Saint Germain partit ensuite vers l'est et ses efforts de conversion se sont surtout tournés vers des communautés saxonnes qui étaient arianistes. On peut donc penser qu'il a débarqué dans la Hague en raison de la présence d'une telle communauté. Saint Clair (845-884) s'est installé à Nacqueville en venant d'Angleterre. Une des caractéristiques de la région est que les plus anciennes églises étaient au bord même de la mer (à Saint-Germain-des-Vaux, Dielette, Carteret). On a l'impression que Coutances se désintéressait de la région et les archives de l'évêché ignorent superbement Saint Germain. Le dernier évangélisateur de la région est le bienheureux Thomas Hélye, décédé à Vauville au XIIIe siècle.

Le caractère insulaire de la Hague, la difficulté pour s'y rendre a fait que la région avait la mauvaise réputation d'un pays de fraudeurs sous l'Ancien Régime. Il faut dire que la proximité des îles Anglo-Normandes facilitait la contrebande, qui était de deux types : celle du textile, au XVIIe siècle, et celle du tabac au XIXe siècle. La première était le fait de quelques nobles, dont le plus célèbre est probablement le Chevalier de Rantôt. Ils s'opposaient au monopole des manufactures normandes imposé par Colbert. La contrebande de tabac était quant à elle l'objet de plusieurs bandes organisées, menées autant par des agriculteurs que des pêcheurs. On trouve donc dans les murs de la Hague des caches à tabac, domestiques (de petite dimension, auprès des maisons, recueillant le tabac pour une consommation familiale) et des grandes caches, dissimulant les ballots de tabac tressé de plusieurs kilos. Mais la forte présence des douaniers et le renforcement des peines encourues mit fin peu à peu à la fraude au début du XXe siècle, dont subsistent aujourd'hui le chemin des douaniers le long de la côte (GR 223).

La mauvaise réputation des Haguais en fait également des naufrageurs, sans qu'aucune recherche ne soit réellement concluante. En revanche, la population pauvre avait l'habitude d'« aller à gravage », c'est-à-dire fréquenter les plages après les grosses tempètes, pour ramasser les marchandises échouées ou passées par dessus bord, et de récupérer le bois des bateaux échoués. Aussi lit-on dans un rapport de la maréchaussée de Valognes en 1748 : « C'est un pays de landes et de rochers, où l'on a pratiqué quantité de cavernes servant de retraites aux voleurs, assassins et fraudeurs, qui attendent avec assurance et tranquillité le moment favorable pour passer aux Iles voisines. Les plus grands chemins de ce canton sont de deux ou trois pieds, des deux côtés desquels se trouvent des précipices. Les habitants sont gueux, mauvais, fraudeurs insignes, et ne vivent que de brigandages. Il y a des paroisses où les commis aux aides et les employés dans les fermes ont été un temps considérable sans oser y aller ; ils n'y vont même pas encore volontiers.  »[1]

Durant l'Occupation allemande, la Hague était une zone interdite, où seuls les habitants pouvaient accéder, avec un laisser-passer particulier. Le territoire d'Auderville et de Saint-Germain-des-Vaux était particulièrement surveillé, en raison de leur position stratégique face à l'Angleterre et des importants stationements militaires. La route reliant les deux communes était ainsi entièrement interdite aux civils, tandis qu'un couvre-feu à partir de 20 heures couvrait tout le canton, avec obligation de cacher par des rideaux toute lumière intérieure qui aurait pu aider l'aviation alliée. Outre les nombreuses casemates construites tout au long de la côte pour prévenir un débarquement, une imposante batterie était installée au Castel Vendon pour participer à la défense de la forteresse de Cherbourg, une autre au village de La Haye à Auderville faisant face à celle d'Aurigny où se trouvaient quatre camps de concentration.

Le 27 mai 1944, la Hague subit de lourds bombardements meurtiers. Après la prise de Cherbourg, le 26 juin, les troupes américaines prennent la directtion du cap. Vauville est coupé en deux pendant 10 jours, jusqu'au 29 juin. Gréville, Beaumont-Hague et Jobourg sont libérées dans la journée du 30 juin. Les canons de l'US Army prennent alors position à Jobourg pour pilloner les installations d'Auderville, dont le radar. Auderville, puis saint-Germain et Digulleville sont alors libérée la matinée suivante. Près d'un an après, les combats ne sont pas terminés pour autant puisque Auderville essuie le 11 avril 1945 une pluie d'obus allemands tirés depuis Aurigny, qui ne capitule que le 16 mai[2].

[modifier] Le développement économique par le nucléaire

Usine de retraitement Areva NC - La Hague
Usine de retraitement Areva NC - La Hague

Pendant des siècles, la vie dans la Hague n'a pas énormément varié. La ressource principale est l'agriculture (élevage et pluriculture), permettant une relative autarcie. L'industrialisation des techniques a peu de prise sur ses petites parcelles difficiles à travailler, aux mains de nombreux petits exploitants. La pêche est souvent une ressource complémentaire aux agriculteurs (on parle des agriculteurs-pêcheurs ou crateurs), rarement un métier à part entière, excepté à Omonville-la-Rogue, Goury et Diélette.

Isolée, la presqu'île est longtemps restée éloignée du tourisme, mise à part la station balnéaire d'Urville-Hague au début du XXe siècle, détruite lors des bombardements de 1944.

La marine était souvent la seule possibilité d'échapper au destin agricole, du fait de la proximité du port militaire de Cherbourg et de son arsenal. Mais les années 1960 ont vu l'implantation de l'usine de retraitement de la Hague qui a bouleversé l'aspect du plateau central. Cette installation fait venir des personnels extérieurs à la région, et apporte des ressources nouvelles que l'agriculture n'aurait pu procurer.

En effet, on voit en 1960 quelques ingénieurs inspecter les landes de Jobourg et Omonville-la-Petite, selon eux pour l'implantation possible d'une usine de plastique, ou de casseroles. La décision de construire l'usine atomique du Commissariat à l'énergie atomique sur les hauteurs de la Hague est alors prise, sans la moindre information des élus locaux, laissant les populations locales, sinon dans l'ignorance, au moins dans le flou, que le classement "secret défense" de l'installation accentue.

Deux raisons techniques sont avancées pour ce choix : un socle géologique ancien (allant jusqu'au précambrien) et stable, donc à l'abri des tremblements de terre, et la présence de courants marins et vents forts, propices à l'évacuation et à la dispersion des effluents. On peut également penser que la faible densité de population, la situation excentrée et l'isolement de cette presqu'île ont paru autant d'atouts pour son acceptation et en cas d'accident nucléaire relâchant des matériaux radioactifs.

En 1962, le CEA commence à acheter à prix d'or des terrains de landes, parfois labourés au moment de la vente pour en tirer un meilleur prix. Les 190 hectares sont acquis sans aucune expropriation, malgré 150 propriétaires, tant ces fortes sommes ont permis à certains de moderniser leurs exploitations, voire de se reconvertir. Plusieurs de ces propriétaires ont négocié en plus de la valeur des parcelles, leur entrée comme salarié de l'usine ou celle d'un fils.

En parallèle des premiers travaux, le CEA pour être accepté et rassurer, développe une campagne de lobbying, auprès des élus et des élites religieuses. Ainsi les notables du canton ont-ils pu visiter en grandes pompes les sites de Marcoule et de Saclay. La fierté d'accueillir une technologie de pointe, les difficultés du milieu agricole, et le licenciement en 1962 des derniers mineurs à la fermeture de la mine de fer de Flamanville-Dielette finissent de convaincre la population. Ainsi en 1966, les premiers châteaux de combustible irradié arrivent sans la moindre contestation de la centrale nucléaire de Chinon.

En 1969, Infratome cherche à la demande du CEA un lieu pour l'enfouissement des déchets faiblement radioactifs. Le site de la Hague semble parfait. Mais aucune commune ne veut devenir une décharge. Pourtant, le maire de Digulleville accepte d'accueillir ce qui sera le Centre de stockage de la Manche en bordure de l'usine de retraitement. Passé sous le giron de l'ANDRA en 1991, il a reçu son dernier colis en 1994, et est depuis en phase de surveillance, pour 3 siècles.

Le 1er juin 1976, l'usine atomique du CEA devient usine de retraitement de la COGEMA. L'activité devient civile, le secret défense se lève un peu, et surtout, la taxe professionnelle et les impôts locaux sont exigibles. Face à cette manne financière sans précédent, qui aurait dû profiter essentiellement aux communes de Jobourg et d'Omonville-la-Petite, et aux équipements qu'il faut mettre en place pour l'accueil de la nouvelle population, les élus du canton ont décidé la constitution d'un district, qui naît en 1977.

Les mouvements écologistes ne se font pas entendre à l'époque. Les premières mobilisations répondent au projet d'implanter une centrale électronucléaire à Flamanville. Le site est occupé plusieurs jours à la fin des années 1970. Les manifestations contre les transports nucléaires vers la Cogema se développent au début des années 1980. Le désengagement des militaires délie quelques langues, et la CFDT provoque un mini-scandale en produisant un film critique traitant du travail en milieu confiné.

L'ouverture de l'usine entraîne l'arrivée de nouvelles populations. En même temps que l'agrandissement de l'usine (UP3), il est donc décidé de lancer le "grand chantier", pour construire logements, écoles et infrastructures. Alors que le canton vieillissait et vivait d'une petite agriculture autarcique, la population de la Hague s'accroît en quelques années, se rajeunit, se diversifie. Certains villages doublent leur nombre d'habitants en accueillant des cités, comme Coriallo à Beaumont-Hague, ou celle des Arbres à Omonville-la-Rogue. Auderville sera distinguée en 1984 du prix national de l'habitat pour la bonne gestion de l'arrivée de ces horsains. Mais le plus souvent, elles sont en périphérie des bourgs, ce qui ne facilitait pas le brassage. Pourtant, cet afflux d'une population nombreuse et atypique (beaucoup de cadres, chimistes ou scientifiques arrivent, dans une région constituée essentiellement d'agriculteurs, et de quelques ouvriers, militaires et petits notables locaux) a été digérée sans heurt et sans acculturation.

Au moment de la construction de l'usine de retraitement, des parties importantes de la côte ont fait l'objet de classements interdisant ou réduisant les possibilités de construction. Autour de l'usine, les franges côtières ont ainsi gardé un aspect traditionnel.

Aujourd'hui, le débat sur les avantages et les dangers de cette usine est étroitement lié au débat sur l'énergie nucléaire. Les mesures de sécurité en vigueur sur l'usine sont défendues par les "pro", tandis que les "anti" rappellent les nombreux accidents de son homologue anglaise de Sellafield, et l'impact négatif en terme d'image pour la région et ses productions issues de l'agriculture et de la pêche. La population locale est partagée entre la peur d'une pollution invisible, et la reconnaissance envers une industrie qui a transformé l'économie locale et tenu en vie une pointe promise à la désertification.

[modifier] La recherche d'une autre image

Le Hameau Cousin par Jean-François Millet
Le Hameau Cousin par Jean-François Millet

Après avoir accueilli comme un soulagement l'usine, les élus locaux ont peu à peu pris conscience de la lourde contrepartie pour l'image de la région. L'usine de plutonium, puis l'usine atomique (désignée parfois les habitants comme "là-haut") est devenue l'usine de Jobourg, avant que la Cogéma ne la nomme officiellement l’« Usine de la Hague » et « Cogéma - La Hague »[3].

Les élus ont d'abord cherché à protéger la nature de la péninsule, en classant des parties importantes de la côte, interdisant ou réduisant les possibilités de construction. Jusqu'alors, l'isolement et une relative pauvreté avait valu à la région de rester à l'écart des brassages de population. Après une première tentative au Nez de Jobourg en 1979, le littoral de la Hague est retenu en 1991 par le ministère de l’Environnement pour l'opération Grand site national. La Hague a pu conserver intact ses paysages avec ses murets de pierres sèches délimitant les parcelles depuis la Révolution, et son habitat traditionnel, en pierre avec des couvertures en lauzes cimentées de schiste bleu, regroupé en hameaux blottis au gré des reliefs pour se protéger des vents marins. Ainsi, aujourd'hui, les franges côtières, parsemées de quelques restes de blockhaus du Mur de l'Atlantique, ont gardé un aspect traditionnel, et près de la moitié de la côte haguaise appartient au Conservatoire du littoral.

Depuis quelques années, les Haguais cherchent à accroître l'attrait touristique de la presqu'île, tout en gardant son caractère sauvage. Ils ont créé des équipement tels l'observatoire-planétarium Ludiver et le centre culturel du Tourp, et projettent la mise en place d'un centre régional des sports liés au vent au Camp Maneyrol de Vauville et d'un stade hippique. Ils communiquent autour des atouts de la région pour prouver que la Hague est plus que l'usine qui s'étale sur 2% du territoire et n'emploie que 4% de sa population.

Image:Castel vendon REDIM.jpg
Le Castel Vendon par Riccardo Simonutti


Le tourisme est aujourd'hui le troisième pourvoyeur d'emploi après l'industrie et la fonction publique territoriale et tend à devenir un des piliers majeur de l'économie locale. Pour accompagner cette mutation des ressources, l'Office de tourisme de la Hague a vu son statut juridique passer d'association à EPIC et intègre depuis 2007 le canton des Pieux. Cette nouvelle définition territoriale renoue ainsi davantage avec la cohérence géographique et culturelle de la Hague ancestrale ; celle du doyenné de la Hague. C'est donc tout autant ces villages restés authentiques dans leur site naturel préservé qu'il faut admirer que les quelques grandes maisons que sont les châteaux de Nacqueville et de Vauville, les manoirs de Dur-Ecu et du Tourp, et autres grosses fermes. On peut visiter les musées-maisons de village de Jean-François Millet et de Jacques Prévert. Des constructions récentes sur les crêtes, à l'abord des villages anciens ou proches de la mer menacent l'harmonie du paysage de la presqu'île que chantait en haguais, variante du cotentinais, le poète Côtis-Capel, né à Urville.

[modifier] La Communauté de communes de la Hague

Icône de détail Article détaillé : Communauté de communes de la Hague.

L'ancien District de la Hague, qui a été constituée dans les années 1970, gère les impôts locaux payés par l'usine et les entreprises soustraitantes.

Elle regroupe les 19 communes du canton de Beaumont-Hague et exerce de nombreuses compétences en matière de développement économique et territorial, d'animation culturelle, et de gestion des services à caractère collectif (eau, télécommunications, déchets…).

[modifier] La Hague au cinéma

Les paysages sauvages de la Hague sont accueillis les tournages de plusieurs films, parmi lesquels :

Selon Philippe Quévastre[4], le premier film tourné dans la péninsule serait Les Enfants du Capitaine Grant, qui avait utilisé en 1913 les falaises de Gréville. En 2005, il dénombre 18 longs métrages tournés au moins partiellement dans le canton de Beaumont-Hague. Le rôle du décorateur de cinéma, Trauner, est important puisque, résidant à Omonville-la-Petite, il a fait venir plusieurs réalisateurs dans la Hague, comme Joseph Losey qui a tourné Les Routes du Sud en partie dans la maison même de Trauner, mais aussi son ami Jacques Prévert, qui s'installe également dans ce village.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • Didier Anger, Chronique d'une lutte : le combat antinucléaire à Flamanville et dans la Hague. Paris : J.-C. Simoën ; 1978
  • Didier Decoin, Les Trois vies de Babe Ozouf, Seuil, 1983 et Points Poche
  • André Dhôtel, Je ne suis point d'ici, Gallimard 1982
  • Jean-Baptiste Digard de Lousta, « Coup d'oeil sur la Hague », Mémoires de la société académique de Cherbourg, 1847
  • Catherine École-Boivin, Jeanne de Jobourg : paroles d'une paysanne du Cotentin, Le Coudray-Macouard, Cheminements, 2001
  • Catherine École-Boivin, Jean de la mer : paroles d'un Mathieu-Sala du Cotentin, Le Coudray-Macouard, Cheminements, 2002
  • Catherine École-Boivin, La Hague : embruns de mémoire, Le Coudray-Macouard, Cheminements, 2002
  • Jean Fleury, Littérature orale de la Basse-Normandie (Hague et Val-de-Saire), Maisonneuve, 1883
  • Claudie Gallay, Les Déferlantes. Paris : Éditions du Rouergue, 2008 (ISBN 978-2841569342)
  • Xavière Gauthier, La Hague, ma terre violentée, Mercure de France , 1981
  • Dominique Gros, La Hague de Jean-François Millet, Cherbourg, Isoète, 2001
  • Dominique Gros, Jacques Prévert à la Hague, Condé-sur-Noireau, Éditions Corlet
  • Dominique Gros, Paysages Pays Sage, Éditions Le Vent qui passe, 2003
  • Charles Grosset, St Germain de la mer - Un missionaire du Ve siècle, Revue du departement de la Manche: Tome 21 - 1979
  • Paul Ingouf, « La Hague, haut lieu de la contrebande », Histoire de la mer n° 13, 1980
  • Roger-Jean Lebarbenchon, Les Falaises de la Hague : Cotentin, Lechanteur et Côtis-Capel, Caen, Centre d'études normandes, 1991 ISBN 2950588409
  • Roger-Jean Lebarbenchon, La Hague, Société nationale académique de Cherbourg, 1998 (2 volumes, sur l'histoire de la Hague à travers celle d'Urville-Nacqueville)
  • Paul Lecacheux, Recueil de chansonnettes normandes en patois de la Hague, Cherbourg, Equilbey et Magne
  • Jules Lucas, La Hague jusqu'au temps de Guillaume le conquérant : période celtique, gallo-romaine et danoise, Isoète, Cherbourg, 1995.
  • Guillaume de Monfreid, Trésors de la Hague,Editions Isoète, 2004 (sur l'architecture des maisons)
  • Hugues Plaideux, Le Bienheureux Thomas Hélye de Biville, Cherbourg, La Dépêche, 1989, 61 p.
  • Hugues Plaideux, « Le prieuré de Saint-Germain-des-Vaux », dans Annales de Biville, n° 30, avril 1990, p. 20-32, et n° 31, juil. 1990, p. 24-40.
  • Hugues Plaideux et Janine Brugère, François-Médard Racine (1774-1817), capitaine corsaire éponyme du « plus petit port de France », t. 33, fasc. 129, janvier 1991 de la Revue du département de la Manche, 50 p.
  • Hugues Plaideux, « Le brûlage du varech sur les côtes de la Hague et du Pays de Caux au XVIIIe siècle : à propos d'une enquête de l'Académie des sciences », dans Nédélèqueries. Recueil d'articles offerts à Yves Nédélec, archiviste départemental de la Manche de 1954 à 1994, Société d'archéologie et d'histoire de la Manche, 1994, p. 367-378.
  • Hugues Plaideux, « Quelques aspects de la contrebande maritime à Cherbourg sous la Restauration », dans Les Normands et la mer, Actes du XXVe Congrès des Sociétés historiques et archéologiques de Normandie (Cherbourg, oct. 1990), Musée maritime de Tatihou, 1995, p. 200-207 (épreuves à corriger non fournies par l'éditeur). Texte repris, légèrement modifié, dans Les Cahiers d'histoire des douanes et des droits indirects, n° 19, octobre 1998, p. 22-28.
  • Philippe Vial, Les possessions de l'abbaye du vœu dans la Hague, mémoire complémentaire de DES, Caen, 1968
  • Jean-François Viel, La santé publique atomisée : radioactivité et leucémies : les leçons de La Hague. Paris  : La Découverte , 1998.
  • Françoise Zonabend, La Presqu'île au nucléaire, Odile Jacob, 1989

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur le Cap de la Hague.

[modifier] Références

  1. cité dans La Hague jusqu'au temps de Guillaume le Conquérant : périodes celtique, gallo-romaine et danoise , Jules Lucas, Cherbourg, Isoète, 1995.
  2. Hag'tions n°30, juin 2004
  3. Séminaire de l’association NOTA BENE « Comment un territoire peut développer sa propre communication face à une usine qui s’est appropriée le nom du territoire ? », 12 mai 2006
  4. Hag'tions n°33, avril 2005
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