Révolution scientifique
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Le concept de révolution scientifique désigne généralement une discontinuité de la pensée scientifique à une époque donnée, cette rupture amenant un champ disciplinaire — ou plusieurs — à se réorganiser autour de principes et axiomes nouveaux. Cette notion est devenue centrale en épistémologie par le travail d'auteurs tels que Gaston Bachelard, Thomas Kuhn ou encore Alexandre Koyré. En histoire des sciences, elle est aujourd'hui utilisée pour décrire les mécanismes de transformation et d'adaptation des théories scientifiques à la suite de découvertes importantes, remettant en cause la vision que l'Homme avait du monde jusqu'alors.
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[modifier] Éléments historiques
[modifier] Usages
Dans la littérature, référence est très souvent faite par la simple expression de « Révolution scientifique » aux bouleversements qui eurent lieu du XVIe au XVIIIe siècles dans plusieurs domaines des sciences : il s'agit en fait de la révolution mécaniste, souvent appelée la révolution copernicienne. Historiquement, c'est sans doute l'une des plus grandes révolutions scientifiques pour les historiens des sciences contemporains.
La question de savoir si les grandes évolutions scientifiques des temps plus anciens (par exemple, l'invention du zéro) sont à considérer sur le même plan reste ouverte. Par ailleurs, chaque discipline ou presque possède ses révolutions modernes : invention du calcul infinitésimal, découverte de la génétique, apparition du relativisme et des quanta sont souvent aujourd'hui décrites comme des révolutions. Pour autant, toutes ces évolutions ne se sont pas faites en rupture, loin s'en faut. Le sens actuel de révolution est donc moins fermé que son acception historique, puisqu'il désigne une variété d'évolutions considérées comme majeures et fondatrices d'une nouvelle science dans la science[1].
[modifier] Histoire du concept de révolution en science
Le terme de « révolution » est d'usage courant depuis le XVIIIe siècle. Dans l'Encyclopédie, plusieurs auteurs décrivent les apports de scientifiques tel Newton comme des révolutions en science, c'est-à-dire comme initiant le début d'une époque[2]. Le sens évolue sous la plume de scientifiques, d'historiens des sciences et de philosophes. Ainsi, Kant décrit le passage d'un système géocentrique à héliocentrique comme la révolution copernicienne dans sa Critique de la raison pure.
Au XXe siècle, le concept de révolution scientifique est repensé pour coller au plus près aux grandes évolutions scientifiques qui se succèdent rapidement depuis le milieu du XIXe siècle. Thomas Kuhn observe que les grands changements théoriques font intervenir non pas un remodelage continu des concepts et axiomes en place, mais des ruptures franches dont le but manifeste est le remplacement d'un paradigme mis en échec par un autre, plus efficace et novateur. Par paradigme, Kuhn comprend à la fois le contenu scientifique pur et l'organisation sociale et technique appuyant cette science. Ce plexus intégrateur permet à Kuhn d'opposer la science normale, en situation stable, productive, à la science « extraordinaire », en situation de crise, innovatrice et débouchant sur une rupture théorique.
Dans ce cadre épistémologique, on distingue la vision de Kuhn, où la rupture ne se comprend pas spécifiquement en terme d'avancée, mais de prise de position (les acteurs des révolutions font un choix scientifique qui peut être critiqué), et la vision de Bachelard, où les révolutions scientifiques sont le moteur du progrès de l'humanité (les acteurs des révolutions scientifiques tendent vers une meilleure connaissance et une plus complète approximation de la vérité)[2].
[modifier] Des révolutions scientifiques plurielles
L'histoire des sciences souligne plusieurs de ces révolutions :
- la mise au premier plan de la rationalité par les grecs présocratiques ;
- la révolution copernicienne (l'abandon du géocentrisme) ;
- la Révolution scientifique des XVIe et XVIIIe siècles ;
- l'introduction du darwinisme ;
- le relativisme moderne sous ses formes variées ;
- la découverte de la structure de l'ADN[réf. nécessaire].
Une originalité des révolutions de nature scientifique par rapport aux révolutions politiques, par exemple, réside dans la cruciale conservation des acquis. Confrontée à ses propres limites (souvent, la découverte d'une inadéquation avec l'expérience, comme en physique), une théorie scientifique amène les éléments intellectuels de son propre échec et de son remplacement par une autre théorie, plus « aboutie » et plus intégratrice. Cela veut dire qu'une révolution scientifique doit être tout à la fois radicale, car elle exprime une nouvelle façon de penser, et conservatrice, car elle doit incorporer les éléments anciens du savoir scientifique sur lesquels elles s'appuient nécessairement.
[modifier] Notes et références
- ↑ Point de vue évolutionniste par rupture illustré par Thomas Kuhn dans La structure des révolutions scientifiques
- ↑ a b B. Bensaude-Vincent, Révolution scientifique. In Dominique Lecourt et al., Dictionnaire d'histoire et philosophie des sciences, p. 840, Paris, PUF, ISBN 2-13-052866-X
[modifier] Bibliographie
- Thomas Kuhn, La structure des révolutions scientifiques
- Alexandre Koyré, Du monde clos à l'univers infini
- Henri Poincaré, La Valeur de la Science
- Dominique Lecourt et al., Dictionnaire d'histoire et philosophie des sciences