Guimbarde (musique)
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
La guimbarde est un instrument de musique idiophone. Son origine est très ancienne. Elle existe en Europe depuis au moins l'époque gallo-romaine, mais elle est aussi très répandue en Asie et en Mélanésie. Elle est, de fait, réputée être l'un des instruments de musique les plus anciens du monde. C'est un instrument utilisé de tout temps par les chamans, notamment dans les pays scandinaves et en Sibérie. Malgré son apparence simpliste elle est aussi un instrument de la musique savante dans certains pays, mais sa destination habituelle est plutôt la musique populaire ainsi que l'indiquent les nombreux termes pour la désigner en France par exemple : Guimbarde, Harpe à bouche, Trompette tsigane, Trompe-laquais, Trompe de Béarn, Hanche-en-ruban, Campurgne, Citaro. Aux États-Unis, elle est aussi connue sous le nom de Jew's Harp[1] qui pourrait être une déformation du français jeu[2]. Dans de nombreux pays d'Asie, elle est désignée sous différents noms suivant sa forme, le matériau utilisé pour sa fabrication voire selon l'usage.
[modifier] Facture
La guimbarde est composée de deux éléments. On distingue tout d'abord une armature, d'une forme quelconque qui comprend invariablement deux barres parallèles assez rapprochées. Enfin, on trouve une languette fine, haute de quelques millimètres, fixée à l'armature par l'un de ses bords, libre de l'autre côté et qui passe à l'intérieur des deux barres. Selon que cette languette soit du même matériau ou non, selon qu'elle soit découpée ou non dans son propre cadre, on parle de guimbarde idioglotte et hétéroglotte.
Les guimbardes occidentales sont généralement en métal et leur taille peut varier en fonction de la hauteur du son généré. Il existe cependant des guimbardes en bois et en bambou, en Asie et Océanie par exemple. De même la languette peut être ébranlée autrement que par son extrémité recourbée : par une ficelle liée au cadre, un marteau, etc. Le nombre de languettes peut aller jusqu'à cinq.
[modifier] Jeu
Un joueur de guimbarde place l'instrument devant la bouche d'une main, en la tenant par l'armature (à l'opposé des branches parallèles). Les guimbardes occidentales en métal sont posées fermement contre les dents entrouvertes (l'instrumentiste ne doit pas enserrer les branches parallèles avec les dents, ce qui bloquerait le passage de la lamelle). Les guimbardes orientales en bambou ou en laiton (guimbardes hmong du Viêt Nam) se posent sur les lèvres. L'autre main permet d'actionner la membrane (le plus souvent de l'extérieur vers l'intérieur).
Certains joueurs jouent avec un ou plusieurs doigts, d'autres avec leur main pour faire vibrer la lamelle. Il est également possible d'utiliser la langue pour faire varier les sons et créer des harmoniques surprenants avec des effets de réverbération ou d'écho. L'inspiration et l'expiration permettent l'accentuation et le changement de ton. On peut aussi « chanter » tout en jouant.
C'est un instrument extrêmement rythmique dont l'art réside dans ce dosage du son obtenu par le contrôle du souffle et la position de la langue ou des lèvres. Le musicien peut modifier le son de son instrument en gonflant ses joues, en déplaçant sa langue, en soufflant ou en inspirant par exemple. Les vibrations de la languette mobile génèrent une onde sonore de hauteur fixe que modifie la configuration du gosier, jouant le rôle d'une caisse de résonance variable. Ces modifications entraînent aussi une variation des harmoniques produits. Ainsi, on imite le chant diphonique.
La guimbarde est aussi un instrument de musique savante :
- En Inde du Sud, dans la musique carnatique, elle est considérée comme un instrument de percussion à part entière à l'instar des mrigandam, ghatam et kanjira avec lesquelles elle partage un riche répertoire commun.
- Johann Georg Albrechtsberger, l'un des grands compositeurs de son époque, ayant rencontré un joueur de guimbarde doué, a même composé des concertos pour cet instrument. Dans ces derniers, la guimbarde joue le rôle soliste et virtuose que peut tenir un violon face à un ensemble de cordes, pouvant même s'offrir des espaces d'improvisation.
En Autriche, elle permettait aux jeunes prétendants de faire la cour à leur belle ; petit et pratique, elle était également un compagnon de voyage idéal pour la noblesse qui formait ainsi sa jeunesse. Dans ses mémoires, Madame Campan, dit d'Adélaïde de France (1732-1800), fille de Louis XV, qu' « elle avait appris à jouer de tous les instruments, depuis le cor – me croira-t-on ? – jusqu'à la guimbarde ».
Joueurs de guimbarde les plus connus :
- Angleterre : John Wright, Michael Wright
- Québec : Daniel Roy
- Écosse : Angus Lawrie
- Finlande : Tapani Varis
- Norvège : Svein Westad, Folke Nesland, Bjørgulv Straume, Bjørgulv Rysstad, Knut Tveit, Harald Foss
- Russie : Ogotoev Peotr Peotrovich, Spiridon Spiridonovitch Chichiguine
- Viêt Nam : Tran Quang Hai
- Chine : Wang Li
- France : Canaut Roucher Vincent, Serge Zabrodine, Yohann Aussage
Fabricants de guimbardes :
- Allemagne : Andreas Schlütter
- France : Bernard Lalanne, Matin Musical (M. Gentil et M. Guimbarde)
- Norvège : Folke Nesland, Bjørgulv Straume, Bjørgulv Rysstad, Knut Tveit
Apparition au cinéma :
Dans le film Scoop de Woody Allen, le personnage interprété par Woody Allen donne cette réplique :
« Je joue de la guimbarde. C'est une languette métallique qu'on met dans la bouche et qui produit un son de corde pincée très musical. On l'appelait aussi harpe du Juif mais ces gens, vous savez comment ils sont, à la moindre allusion d'antisémitisme, ils déposent une plainte. »
Le compositeur Ennio Morricone a beaucoup œuvré pour la popularité de la guimbarde. Nombre de ses musiques composées dans les années 1960 pour des westerns spaghetti (mais aussi Le Clan des Siciliens) utilisent une guimbarde.
[modifier] Noms des guimbardes
|
|
[modifier] Notes
- ↑ Comme indiqué dans l'histoire de la guimbarde de la Jew's Harp Guild, une réinterprétation moderne de la dénomination jew's harp voudrait que le mot jew (juif) ait été une déformation de jaw (mâchoire) ou juice (jus), en réalité l'orthographe jew's harp est la plus ancienne avérée en anglais, quand les deux autres ne sont que des constructions plus récentes qui n'apparaissent qu'à la fin du XIXe siècle et aux débuts du XXe siècle.
- ↑ théorie évoquée sur le site de Pat Missin