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Munition immergée - Wikipédia

Munition immergée

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La notion de munition immergée désigne les situations où des munitions ont été perdues ou volontairement jetées dans les eaux marines, douces ou saumâtres, parfois continentales ou souterraines. Ce concept est directement ou indirectement lié aux situations de séquelles de guerres ou d'activités militaires. Il évoque un double risque : d'explosion ; et pollution et contamination chimique des chaines alimentaires ; à court, moyen ou long terme selon les cas.
Près de cent ans après l'armistice de 1918, et soixante ans après la défaite de l’Allemagne nazie, les armes immergées (conventionnelles ou chimiques) des armées successives peuvent encore nous empoisonner (littéralement, économiquement et métaphoriquement).
Étant donné les coûts élevés de traitement du problème et l'absence de consensus sur les solutions et la mesure du risque, sa prise en compte semble avoir été repoussée jusqu'aux années 2000. Les munitions immergées posent de graves problèmes, imparfaitement traités : une destruction sûre ou un inertage sécurisé et respectueux de l'environnement n'est prévu que pour moins de 1% des stocks immergés connus, en Allemagne, Belgique et France, en Fédération de Russie et peut-être bientôt aussi en Chine). Cet article propose de faire un premier point sur ces questions

Lors des attaques, (ici un raid sur Zeebruges), de nombreuses munitions ont été perdues ou coulées
Lors des attaques, (ici un raid sur Zeebruges), de nombreuses munitions ont été perdues ou coulées
Destruction du torpilleur HMS Louis de la Royal Navy à Suvla durant la bataille des Dardanelles en 1915 par l'artillerie ottomane.
Destruction du torpilleur HMS Louis de la Royal Navy à Suvla durant la bataille des Dardanelles en 1915 par l'artillerie ottomane.
Le cuirassé allemand Blücher, en train de sombrer, avec ses munitions, en 1915
Le cuirassé allemand Blücher, en train de sombrer, avec ses munitions, en 1915
Des lacs d'altitude sont aussi concernés tel le lac du col du Saint-Gothard à 2108m d'altitude, en Suisse
Des lacs d'altitude sont aussi concernés tel le lac du col du Saint-Gothard à 2108m d'altitude, en Suisse
Le lac de Thoune est également concerné. Les analyses n'y ont pas détecté de fuites à partir des munitions, mais un taux élevé d'anomalies congénitales est noté chez les poissons. Les différences de température, oxygénation, acidité, salinité, taux de sédimentation font de chaque cas d'immersion une situation particulière.
Le lac de Thoune est également concerné. Les analyses n'y ont pas détecté de fuites à partir des munitions, mais un taux élevé d'anomalies congénitales est noté chez les poissons. Les différences de température, oxygénation, acidité, salinité, taux de sédimentation font de chaque cas d'immersion une situation particulière.


Sommaire

[modifier] Origine et nature des munitions immergées

Il peut s’agir de munitions chimiques ou conventionnelles.

Elles ont été volontairement immergées, pour s'en débarrasser à moindre coût, ou pour éviter qu'elles ne tombent aux mains de l'ennemi, ou parce qu'elles risquaient d'exploser ou de fuir en raison de leur état de dégradation. Une partie, qui n'est pas la plus importante a simplement été accidentellement perdue en mer, suite à des combats, naufrages, sabordages ou échouages.

Certains sites marins et lacustres ont régulièrement été utilisés comme zones d'exercice de tir sur cible, ou pour des essais, incluant le cas particulier des essais nucléaires. Certains pays (maritimes ou non, comme la Suisse) ont utilisé des lacs et des zones humides comme sites d'exercices et de décharge.

De nombreuses munitions non-explosées ont ainsi été perdues lors d'essais ou d'exercices militaires et lors de « ratés ».

Dans un lac, une mer ou une zone humide fermée, même des munitions conventionnelles ayant explosé à l'impact peuvent être à l'origine de pollution relictuelle par le plomb, le mercure ou d'autres métaux. Les anciens sites de tir sur lac sont en cours de recensement en Suisse (en 2005-2006), avant une campagne de recherche de substances toxiques.

[modifier] Explosifs immergés

La mention « Explosifs immergés » inscrite sur certaines cartes marines concerne des lieux de décharge sous-marine établis depuis la fin de la première guerre mondiale, mais nombre de dépôts semblent ne pas avoir été signalés sur ces cartes. Depuis, certains dépôts ont en outre été pour partie dispersés par les courants, des tsunamis et les chaluts de pêche.

Ces « objets » particuliers semblent juridiquement assimilables à des « déchets toxiques ou dangereux » susceptibles de libérer dans l'environnement de nombreux polluants, dont des eutrophisants et certains produits très toxiques, en quantité dispersée (DTQD), le plus souvent et dans un premier temps à faible dose, mais de manière chronique. Les risques d'explosion ou de fuite brutale et importante sont encore mal évalués (phrase incomplète) et pourraient varier selon la profondeur, salinité, courants, taux d'oxygène et température de l'eau.

Les conséquences englobent les domaines de l'économie, de l'environnement, de la santé publique, de la sécurité civile et des affaires militaires et de la prospective. Les impacts redoutés par les experts en déminage et en écotoxicologie sont surtout de moyen et long termes et concernent toute la pyramide alimentaire.

[modifier] En eaux douces

Peu de données sont publiées, mais des munitions anciennes ont été massivement trouvées par exemple dans le lac de Gérardmer en France ou dans le gouffre de Jardel (120 m verticalement) d'où coulent les sources de la Loue, dans le Doubs. En Suisse, un lac sur deux en aurait reçu, dont les grands lacs tels que le lac de Thoune (où dans les années 2000 40 % des Corégones présentaient des anomalies congénitales, sans que l'on ait démontré de lien direct et causal avec les munitions), le lac de Brienz et celui d'Uri, ainsi que le bassin de Gersau du lac des Quatre-Cantons. Dans divers autres lacs (Walensee (ou Lac de Walenstadt), lac d'Alpnach, lac Greifensee du canton de Zurich, lacs du col du Gothard, lac de Lauerzer), des rejets anciens de divers matériels militaires ont été confirmés par le DDPS en 2004.

[modifier] Risque

Ce risque est mal évalué, d'autant plus en Europe que ce n’est qu’en 2005 que les premières cartes officielles, peu précises, ont été publiées pour la France, alors que ce pays est l'un des plus touchés au monde par les immersions de munitions. Ces cartes ont été publiées en application de la convention de Londres et conformément aux engagements des pays membres de la commission OSPAR, mais avec cinq ans de retard. Les responsables de ces immersions semblent avoir longtemps pensé qu'il y aurait dégradation puis dilution des toxiques chimiques. Or, au moins dans les eaux froides, les toxiques sont encore parfaitement actifs après 80 ans, certains ne sont pas dégradables ni biodégradables (mercure, par exemple) et peuvent être rapidement reconcentrés par les organismes filtreurs et par la chaîne alimentaire.

Ainsi, des études récentes (Mer balgique, Belgique) et de nombreux indices laissent penser que le plomb, le mercure et les gaz ou liquides toxiques ainsi que les explosifs des munitions de 1914 (ou ultérieures ), et le nitrate (propulsif) ou le phosphore et les métaux qui constituent les enveloppes, douilles ou chemisages des munitions immergées pourraient significativement affecter les écosystèmes terrestres et aquatiques, notre alimentation et notre santé. Ces toxiques pourraient aussi contribuer aux grands phénomènes de dystrophisation et de zones mortes (marine dead zones) identifiées par l'ONU.

Certains sites d'immersion sont proches de sites touristiques majeurs, de thalassothérapie ou de conchyliculture (Cancale, Quiberon…) ou importants comme frayères ou lieux de pêche de poissons et crustacés. Les toxicologues craignent que les bactéries, les poissons, crustacés, moules, huîtres, coraux, éponges et autres organismes filtreurs, puissent des années ou siècles après les conflits, réabsorber et bio-accumuler le mercure, le plomb, l'arsenic, le cadmium non dégradables. Ils peuvent fuir de munitions corrodées, ou commencent déjà à se disperser dans les eaux et les sédiments marins, lesquels font de plus en plus l'objet de demandes d'autorisation d'ouverture de carrière de granulats.

C’est à la fin du XXe siècle, notamment poussé par la commission OSPAR, que quelques pays, ainsi que certaines ONG ou membres de la filière pêche, ont commencé à s’inquiéter du devenir des stocks de munitions immergés en mer ou en eau douce. Plus le temps passe, plus ces munitions approchent (ou ont localement déjà dépassé) un état de corrosion susceptible de provoquer des fuites importantes de toxiques, à des profondeurs où de nombreux poissons et coquillages mis sur le marché pourraient être affectés.

Certains dépôts contiennent des dizaines de milliers de tonnes d'obus, mais les tonnages ne sont cités ou évalués que pour moins de 50 % des sites connus. En cas de libération brutale et importante de toxiques, même à grande distance, de grandes quantités d’organismes marins, dont les filtreurs (moules, huîtres, couteaux, coques et autres coquillages, etc.), les oursins ou d’autres fruits de mer ou les poissons carnivores et mammifères marins (dont cétacés) pourraient être gravement et massivement affectés, de même que les populations riveraines, voire plus lointaines s'il devait se former un nuage toxique. C'est notamment une crainte pour la mer Baltique, quasi-fermée à la différence de l'Atlantique ou du Pacifique.

De même, les consommateurs de produits de la mer, les marins pêcheurs, certains plaisanciers ou très localement les baigneurs ou plongeurs courent un risque croissant d’être exposé à des substances toxiques, éventuellement gazeuses. Certains sites de dépôt sont proches de zones d'élevage d'huîtres, de moules ou de prise d'eau de thalassothérapie, ou proches d'entrées de ports ou de centrales nucléaires.

[modifier] France

En France, des milliers de tonnes de munitions ont été récupérées après la guerre 14-18. Certaines ont été démantelées, d'autres ont été amenées dans les ports à partir des onze départements de la « zone rouge » ou à partir d'arsenaux situés plus au sud, pour être jetées en mer, malgré un risque majeur de pollution locale et mondiale des écosystèmes marins et littoraux. Quelques lacs sont aussi concernés (Avrillé, Gérardmer…). Il semble également que des puits, d'anciennes mines et galeries, d'anciennes zones humides ou gouffres (ex : gouffre de Jardel) soient localement concernés.

Les chaluts remontent parfois des objets rares. Ainsi 3 obus de 280 mm, 50 cm de long et pesant 100 kg environ ont été remontés le 30 novembre 2007 par le chalutier breton l'Alcatraz de Lorient, à 11 km de l'île de Groix qui ont justifié le déplacement de 4 plongeurs-démineurs.[1] Ces derniers ont réimmergé ces obus pour les détruire sous l’eau à 2,5 kilomètres à l'Est de la pointe de Gâvres où se trouve un centre d'essais de la Délégation Générale pour l'Armement (ancien groupe d'Etudes et de Recherches en Balistique, Armes et Munitions (GERBAM). Ce type de munition, inhabituel n’a été utilisé que par de petits "cuirassés de poche" allemands (Deutschland, Sheer et Admiral Graf Spee) et les croiseurs de bataille Scharnhorst et Gneisenau qui ont séjournés à Brest du 22 mars 1941 au 11 février 1942, avant de rentrer en Allemagne via le Détroit du Pas de Calais (opération Cerberus).

[modifier] Le problème

Utilisées, stockées ou perdues, les munitions (dont obus chimiques) ou leur contenu constituent une menace durable.

  • Avant l'apparition très récente de munitions qualifiées « vertes » ou « non toxiques » (c'est-à-dire sans plomb, bismuth, antimoine, arsenic, ni mercure), depuis les balles de mousquets, pratiquement toutes les munitions contenaient des composants toxiques voire très toxiques (mercure, plomb, arsenic, antimoine pour les projectiles), et des produits chimiques ou des métaux classés « polluants » ou « substances indésirables » dans l'air, l'eau, les sols, les organismes et l'alimentation à partir de certains seuils.
Femmes fabriquant des obus dans une usine de munition. Chaque obus et chaque douille contiennent un gramme de mercure toxique. Un milliard d'obus environ ont été ainsi fabriqués entre 1914 et fin 1918.
Femmes fabriquant des obus dans une usine de munition. Chaque obus et chaque douille contiennent un gramme de mercure toxique. Un milliard d'obus environ ont été ainsi fabriqués entre 1914 et fin 1918.
  • Ceux qui ont commandé, inventé et industriellement produit (ou vendu) des milliards de munitions toxiques et polluantes n'avait pas prévu leur fin de vie, et aujourd'hui le principe pollueur payeur est d'application impossible pour ce type de problème.
  • Les munitions conventionnelles anciennes contiennent au minimum du plomb (le plus souvent enrichi d'arsenic et d'antimoine pour lui conférer la ductilité et la dureté recherchée). Les amorces de balles, obus, cartouches ont longtemps contenu du mercure (sous forme de fulminate) très toxique quand il est respiré sous forme de vapeur (80 % de la vapeur de mercure respirée passe dans le sang), ou transformé en méthyl-mercure (très bioaccumulable). Le fulminate de mercure étant instable, il a été mélangé à des vernis et a, peu à peu, été remplacé par d'autres produits dont l'azoture de plomb Pb N6, le diazodénitrophénol ou l'hexanitromannital (explosif puissant à haut pouvoir brisant), souvent utilisés comme charges d'amplification entre le détonateur et la charge principale de l'explosif fort dans les gros obus et les bombes).

Le composant de base de la poudre et des propulseurs (charge de la douille qui doit propulser le projectile vulnérant, balle ou tête d'obus par exemple) depuis sa découverte en Chine est généralement le nitrate, dont l'impact environnemental et la dangerosité ont été rappelés récemment par l'accident d'AZF-Toulouse et la collision d'un train de gaz avec un train chargé de nitrate en Corée). Les nitrates pourraient être lentement épurés par l'environnement, mais ils sont déjà présents en excès dans l'air, l'eau et les sols de presque toute l'Europe, en Manche/mer du Nord, et dans la Baltique à cause de l'agriculture intensive et d'autres sources de pollution. Les métaux lourds, eux, ne sont simplement pas biodégradables, mais leur toxicité varie fortement selon leur forme chimique.

[modifier] Responsabilités

Il semble admis que dans le cas des séquelles des guerres mondiales, une fois les négociations sur les dommages de guerre closes et les accords de paix signés, la recherche de responsabilité n'est plus à faire, et que ce soit alors aux États de gérer subsidiairement la question des séquelles sur leurs territoires (ce qui n'exclut pas des accords postérieurs de coopération). Une réflexion est en cours à échelle européenne et mondiale depuis quelques années mais qui n'a pas débouché sur un programme global de coopération ni sur un financement commun.

Une convention internationale engage ses pays signataires à produire un état des lieux pour l'an 2000 et à avoir détruit leurs stocks (d'armes chimiques) pour 2007. Rares sont les pays qui sont à jour de leurs engagements.

[modifier] Temporalité du risque

En Baltique, des pêcheurs sont déjà fréquemment brûlés par de l'ypérite ramenée dans leurs filets, et on peut se demander si des poissons contaminés n'ont pas déjà été commercialisés. Mais, sauf accident ou acte terroriste, les problèmes majeurs potentiels sont surtout de moyen et long terme. Car si l’immersion volontaire en mer ou en lac de déchets d’origine militaire et de munitions non explosées a massivement commencé dans les années 1919-1920, avec une seconde vague après 1945, c'est vers les années 2000/2005 que les obus, mines, torpilles, etc. immergés en mer devraient commencer à fuir. Ceux qui ont été noyés en eaux douces ou dans des sédiments meubles et pauvres en oxygène devraient fuir plus tardivement. En effet, la fonte d’acier qui constitue l'enveloppe des obus est épaisse en moyenne de 5 à 6 millimètres Elle se corrode à une vitesse moyenne de 0,1 à 0,5 mm/an. De plus, l'acide picrique, l'explosif le plus présent dans les obus de 1914-1918 peut en accélérer la corrosion, et donner naissance à des picrates, susceptible d'exploser au moindre choc. En outre, les obus étant souvent entassés en piles épaisses, et parfois avec d'autres types de munitions (grenades, torpilles, mines, cartouches, etc.) le poids de ceux du dessus peut écraser ceux qui se seraient précocement fragilisés au dessous en provoquant des fuites brutales et importantes de toxiques et/ou d'eutrophisants. Les impacts de la pression de l'eau sont mal connus. Certains toxiques de combats étaient protégés par un emballage en plomb, ou dans une bouteille de verre hermétiquement bouchée (ex : arsines) dont on ignore le comportement à grande profondeur. La contamination de la pyramide alimentaire peut alors croître avec le temps.

[modifier] Quantités

Des millions de tonnes de munitions immergées… et souvent oubliées.

Timbre alertant sur les conséquences des immersions de munitions et de déchets pour les Îles Féroé qui dépendent beaucoup de la pêche, et où les enfants sont victimes d'une nourriture polluée par le mercure
Timbre alertant sur les conséquences des immersions de munitions et de déchets pour les Îles Féroé qui dépendent beaucoup de la pêche, et où les enfants sont victimes d'une nourriture polluée par le mercure

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Parmi les pays qui ont rapidement reconnu avoir immergé des armes chimiques figurent au moins : l'Irlande, la Grande-Bretagne, l'Écosse, l'île de Man, l'Australie, la Russie, les États-Unis, le Japon, le Canada. La Belgique a, dans les années 1980, repris connaissance avec le fameux dépôt de Zeebruges (35 000 tonnes) et la France est restée très discrète sur ses activités d'immersion, mais bien que les archives en soient peu disponibles, les historiens avaient traces ou indices d'immersion de vieux stocks de munitions en méditerranée et dans le golfe de Gascogne ainsi que dans la fosse située entre la Bretagne et le Royaume-Uni. Les cartes marines du SHOM comportent de plus quelques marques « explosifs immergés » sur le littoral Atlantique et de la Manche/mer du Nord.

Selon les spécialistes français du déminage, interrogés par une commission sur le déminage, présidée par M. Jacques Larché, sénateur :

  • un quart du milliard d'obus tiré pendant la première guerre mondiale et un dixième des obus tirés durant la seconde guerre mondiale n'ont pas explosé pendant ces conflits. De plus on sait, pour les avoir retrouvés, que de gros obus, dès la première guerre mondiale se sont enfoncés au moins à 15 m de profondeur dans des sols relativement durs, sans exploser. Il est à craindre que dans les marais, tourbières, vasières, mares et étangs forestiers, fleuves et canaux, des obus se soient enfoncés bien plus profondément encore. On sait qu'en tombant sur des sédiments meubles jusqu'à huit obus sur dix n'explosaient pas. Enfin, selon certains experts ce sont environ la moitié des munitions et matériels incendiaires utilisés lors des deux guerres mondiales qui n'ont pas fonctionnés à l'impact.
L’USS Arizona coule dans le port de Pearl Harbor (Hawaii), le 7 décembre 1941 lors d'une attaque japonaise qui motivera l'entrée en guerre des USA.
L’USS Arizona coule dans le port de Pearl Harbor (Hawaii), le 7 décembre 1941 lors d'une attaque japonaise qui motivera l'entrée en guerre des USA.
  • Depuis 1945 (époque à laquelle le déminage a été organisé, les archives n'étant en France exploitables qu'à partir de 1950, et informatisées à partir de 2000), plus de 660 000 tonnes de bombes ont été dégagées, ainsi que 13,5 millions de mines et 24 millions d'obus ou autres explosifs. La France est le pays le plus touché en Europe pour la période 1914-1918, et avec l'Allemagne pour la période 1939-1945.
  • En 56 ans, 617 démineurs sont morts en service en France où loin de ralentir, plus de 80 ans après la fin de la guerre de 1914-1918, l'activité du service de déminage a récemment été relancée, les démineurs bénéficiant d'une formation de haut niveau, mais ne prenant pas en compte les aspects écotoxicologiques ou d'évaluation des impacts environnementaux.

Ces problèmes ont, en France, motivé une proposition de résolution (n° 331, 2000-2001), tendant à la création d'une commission d'enquête relative à la présence sur le territoire national de dépôts de munitions datant des deux guerres mondiales, aux conditions de stockage de ces munitions et à leur destruction (présentée par MM. Jacques Machet, Philippe Arnaud, Jacques Baudot et Rémi Herment, sénateurs), et il existe au sénat un groupe d'études sur la sécurité et la défense civiles.

Selon les données disponibles et récemment fournies par les États respectifs à l'Union Européenne et à la commission OSPAR ou HELCOM, etc. Depuis les années 1920, plus d'1 million de tonnes de munitions (essentiellement conventionnelles) auraient été volontairement coulées rien que dans la fosse profonde de 200 à 300 m (656-984 pieds) entre l'Écosse et l'Irlande du Nord. Une étude de 1996 n'aurait montré aucune contamination des poissons, mais rien ne permet de garantir l'innocuité de cette solution à long terme, ni que la faune ne concentrera pas les toxiques ainsi stockés.

En mer, des dizaines de grands sites majeurs d'immersion de déchets et munitions et des centaines (milliers ?) d'autres sites plus petits existent. Nombre d'entre eux semblent avoir été oubliés ou récemment redécouverts par les élus locaux et nationaux.

Plusieurs dizaines de milliers de tonnes (y compris d'obus chimiques) sont stockées dans chacun des plus grands de ces sites. Ils peuvent parfois être situés à faible profondeur (Îles de la Frise) et à quelques encablures d'un littoral ou d'un port industriel (banc du Paardenmarkt à Zeebruges en Belgique), à proximité de zones de pêche ou de frayères, ou de courants marins irriguant des zones de productivité biologique essentielles…

Certains navires ont coulé lors de combats avec leur chargement toxique sans avoir été repérés. Il ne semble pas y avoir de carte répertoriant ces risques et dangers.

[modifier] Manque d'information

L'information précise ou disponible manque pour une évaluation précise du risque. On comprend que le caractère dangereux des munitions (chimiques en particulier) n'encourage pas les États à une diffusion d'informations trop précises sur les stocks immergés ou enfouis. Mais l'information est restée longtemps si confidentielle qu'elle semble parfois avoir été oubliée. Et s'il est aujourd'hui facile de trouver sur l'internet des cartes sur les macro-déchets classiques (Ifremer), il est à ce jour impossible pour les responsables civils de la sécurité maritime, les élus des zones concernées ou les collectivités ou pour des pêcheurs de trouver une carte de risque ou de danger ; seul le dépôt belge, qui semble effectivement le plus directement dangereux est clairement délimité sur les cartes marines récentes.

Là où elles sont faites, qui fait les études ? Suivant quels protocoles ? Avec ou sans écologues ? Que recherche-t-on ? (Teneurs dans l'eau et l'air, ou aussi dans les sédiments, les organismes filtreurs ou bioaccumulateurs, dans la chair du poisson ou les organes accumulateurs (foie, rein, arêtes, mucus) ou encore dans la peau (face ventrale des poissons plats). Les cartes de risque et de danger et les données écoépidémiologiques sont elles publiques ? Un inventaire cartographié et hiérarchisé des dangers connus et une échelle de risque existent-ils ? Si oui, pour quels territoires et pour quelles périodes couvertes, avec quelle crédibilité pour les pays peu démocratiques ou les pays pauvres qui peuvent avoir hérités de stocks anciens ou acheté des munitions déclassées et à risque ? Les archives sont elles exploitées ? Rapidement exploitables ? Dans quelles langues ? Géo-référencées ? Perdues ? Quelle gestion du risque et quelle application du principe de précaution ? Faut-il laisser ces munitions sur place ou les récupérer ? Avec quels moyens appropriés ? Qui doit prendre en charge quoi ? (Recherche, surveillance, communication, cartographie, diagnostic éco-épidémio-sanitaire, récupération/élimination…). Autant de questions qui restent en suspens.

Dans les pays totalitaires, mais pas uniquement, ce type d'information circule difficilement et expose ceux qui alertent à de lourdes peines ; par exemple, en ex-URSS : emprisonnement du journaliste Grigori Pasko qui avait en 1993 filmé un navire-citerne de la marine russe en train de déverser des déchets radioactifs et des munitions en mer du Japon, et en France.

[modifier] Qui fait quoi ?

[modifier] En France

L’arrêté préfectoral n° 13/89 du préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord (dit « arr. prémar 13-89 ») concernant le dépôt d'engins suspects trouvés en mer explique ce que doivent faire les pêcheurs qui trouvent des munitions dans leurs filets.

En application de cet arrêté, un « Guide à l'usage des pêcheurs sur la conduite à tenir en cas de découverte ou de repêchage en mer d'explosifs, de conteneurs ou de fûts » a été fait en 1995, faisant état d'une indemnisation des découvreurs d'engins sous certaines conditions.

Néanmoins, il semble que les pêcheurs qui sont les plus grands « découvreurs » d'engins suspects, rejettent le plus souvent en mer les obus qu'ils ramassent dans leurs filets, parfois sur l'épave la plus proche, et généralement en France sans prévenir le CROSS.

Faute de porté à connaissance, les PREDIS (Plans régionaux d'éliminations des déchets industriels et spéciaux) ont omis de prendre en compte ces aspects qui sont habituellement directement gérés par l'État, comme le risque nucléaire. Les régions littorales et leurs élus ne semblent pas non plus disposer de véritable « porté à connaissance » sur la nature, le volume, l'âge ou la présence éventuelle de stocks de munitions immergées à proximité ou non de leur littoral. Les inventaires et « états des lieux » préalables à l'application de la directive-cadre sur l'eau n'ont pas intégré cette question non plus, pas plus que les bases de données sur les sites pollués ou potentiellement pollués (BASIAS et BASOL), bien qu'elle disposent d'une rubrique appropriée.
Le décret n° 96-1081 du 5 décembre 1996 a donné la responsabilité au ministère de la Défense de détruire les munitions chimiques anciennes (200 à 300 types de munitions différentes). Cette opération a été confiée au sein du ministère à la Délégation générale pour l'Armement, et plus particulièrement au service des programmes nucléaires. La capacité de destruction était initialement été fixée à 100 t/an pour la France, avec une durée de vie prévue de 30 ans pour l’installation à construire, coût estimé à l'époque à 880 millions de francs. Était prévue une installation pouvant fonctionner en 2x8 ou en 3x8 h. Cela signifiait qu'une installation initialement prévue pour 100 t pourrait traiter jusqu'à 300 t, mais pour un coût plus élevé. Fin 2000, on a fixé la capacité de cette installation à environ 25 t/an en vitesse de croisière, ce qui correspond au flux de découverte annuel. Cette capacité sera portée au début du processus à entre 75 à 80 t, pour permettre la destruction du stock terrestre existant durant les premières années d'exploitation [2].

Un projet de 156 éoliennes offshore devant Criel et Cayeux-sur-Mer en Picardie dit « Projet des Deux Côtes », estimé à 1,4 milliard d'euros, devant être mis en service en 2010, par la Compagnie du Vent a été bloqué[3] par la préfecture maritime de la Manche en raison de la présence sur le site de munitions (anciens champs de mines). Ce projet devait nécessiter 2000 personnes durant les trois ans de construction, et 250 emplois pour l'exploitation, avec une taxe de 8,5 millions d'euros, versée pour moitié aux comités locaux des pêches pour les dédommager. Le groupe propose d’assurer le déminage du site si le projet est autorisé.

Des problèmes similaires ont été posés en Grande-Bretagne, ou en mer Baltique lors de la construction du pont reliant la Suède au Danemark, et concernant le projet de gazoduc qui doit traverser la Baltique, mais sans bloquer ces projets.

[modifier] En Belgique

En 1993 le principe du démantèlement mécanique a été retenu, opérationnel depuis octobre 1999, avec 2 ans de retard. Les obus sont transportés à la main, mais le sciage et la découpe sont faits à distance, avant que des techniciens en scaphandre vident l'obus, récupèrent le toxique, nettoient l'explosif et le détruisent ailleurs. Ce procédé « artisanal » demande un personnel hautement qualifié, et permet de détruire certains types de munitions, mais il est très limité en capacité (10 à 20 munitions/jour), capacité tout juste suffisante pour détruire les flux découverts et non pour résorber leurs stocks terrestres de 250 t d'obus. D’autres installations seraient à l’étude pour augmenter cette capacité[4].

[modifier] En Allemagne

Le pays étudie la possibilité d’augmenter sa capacité de destruction de munitions. Au nord du pays, un site est dédié à cette activité, avec deux installations de démantèlement d'obus chimiques et de dépollution de terres souillées. Il s'agit d'un ancien site de production et d'essai, qui a subi au moins deux accidents majeurs : en 1919, l'explosion d'un train de munitions qui a répandu près d'un million d'obus dans les environs. Par ailleurs les Américains et les Anglais quand ils sont arrivés sur ce site y ont détruit des installations sans précautions suffisantes, laissant de graves séquelles de pollution. Une installation entièrement automatisée a été mise en service en 1995 pour traiter les sols pollués par des dérivés d'arsenic et par des munitions chimiques, avec des difficultés qui ont entraîné deux ans de retard et ont remis en question certains principes techniques.

[modifier] Conclusion

Malgré quelques alertes venant d'associations ou de personnalités, suite à des accidents ou découvertes fortuites, ou des informations restées presque confidentielles, l’aspect écotoxicologique et sanitaire des séquelle de guerre, quand il n'a pas été simplement nié, est resté curieusement éludé par les historiens de la période. Alors que se prépare le centenaire de la guerre 14-18, la France, malgré les injonctions répétées de la Commission OSPAR, en dépit des alertes de l'OTAN (en 1995-1996) et malgré les recommandations pressantes de la commission HELCOM puis de la Commission européenne,[5] n’a déclaré ses sites d’immersion sous-marine — avec 5 ans de retard et de manière imprécise — qu’en 2005, poussée par ses obligations internationales. Les programmes officiels ne visent que le démantèlement des armes chimiques stockées sur le sol national ou trouvées par les démineurs.

Bien qu’étant le pays le plus touché par les séquelles de guerre pour la période 1914-1918, elle n’a évoqué ce problème qu’après l’Allemagne, la Belgique ou l’Angleterre, les pays baltes et, bien plus discrètement. L'Histoire dira peut-être si ceci s'explique par le poids du secret militaire ou par une volonté d’oubli propre aux années folles (en tous cas pour la période de l'après 14-18), tant les horreurs de cette guerre ont été difficiles à la fois à dire, à ne pas dire et à « oublier » en particulier à propos des gaz de combat, qui ont d'ailleurs traumatisé l'opinion au point qu’aucun des belligérants d’Europe ou d’Amérique du Nord n'a accepté de les utiliser durant la seconde guerre mondiale, leur préférant l’arme atomique, alors qu’ils avaient accumulés des stocks considérables, qui eux-aussi seront pour partie jetés à la mer.

Alors que le temps passe, les munitions enterrées et immergées se corrodent et le risque de graves contaminations augmente. Et aux munitions oubliées des deux conflits mondiaux s’ajoutent celles qui ont été fabriquées et stockées la seconde moitié du XXe siècle, que la plupart des pays se sont engagés à détruire avant 2007, objectif qui ne semble pas pouvoir être atteint au vu des moyens que les pays se sont donnés.

Enfin, des impacts indirects sur la mer existent sans doute par ailleurs. Dans le sud de la France, en Allemagne, en Belgique, des obus chimiques ont été démilitarisés après guerre sans que l’on ait officiellement mesuré avec quels impacts résiduels. Des munitions ont été immergées en eau douce (7000 t de munitions provenant à 90 % de la période 1914-1918, dont 4 millions de grenades à main jetées dans le lac d'Avrillé, le gouffre de Jardel), et des pollutions relictuelles peuvent exister dans des lieux inattendus. La mer étant le réceptacle naturel des bassins versants et de certaines nappes souterraines, elle reçoit aussi des polluants emportés par le ruissellement ou certaines nappes souterraines, dont certains peuvent venir de munitions non explosées se dégradant.

[modifier] Vers une mutualisation européenne ?

Le ministre belge de la Défense, a proposé le principe de la création d'une agence européenne de destruction des munitions chimiques et conventionnelles. Ce principe a été décidé, avec une première réunion préparatoire faite à Bruxelles le 4 mai 2001. Cependant une usine européenne de destruction de munitions pose le problème du financement (coûts élevés) et des risques liés au transport de ces objets très dangereux. En Allemagne, certains Lands s'opposent au transport de ces munitions sur leur territoire.

La Directive cadre Stratégie pour le milieu marin qui pourrait devoir être appliquée en 2008 précise (dans son annexe II) que le problème des munitions immergées soit évalué et traité, mais la directive laisse une grande liberté aux états sur le choix des moyens, et elle prévoit des cas particuliers qui pourraient peut-être être concerner ce problème.

En France, la direction générale de l'armement (DGA) a annoncé que, comme dans les pays du nord, elle allait chercher à mieux respecter l’environnement : « munitions vertes » dépollution des sols, avec un budget de 150 millions d’euros à dépenser avant 2008 pour la dépollution de terrains militaires et autant pour la recherche de matériels « verts », moins toxiques et moins bruyants. Cependant il semble que les sites concernés ne soient que ceux qui appartiennent en propre à l’armée et uniquement situés sur terre, et non sous la mer.

[modifier] Voir aussi

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur la première guerre mondiale.

[modifier] Notes

  1. Voir le communiqué
  2. Sénat
  3. Article relatif au blocage d'un projet d'éoliennes offshore français
  4. Sénat
  5. http://assembly.coe.int/Documents/Records/2002-3/f/0206281000f.htm

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

Concernant les séquelles des guerres mondiales, par immersion de munitions chimiques ou conventionnelles en mer.



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