Mikhaïl Botvinnik
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Mikhaïl Botvinnik Михаил Ботвинник |
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Naissance | 17 août 1911 à Kuokkala, Russie |
Décès | 5 mai 1995 (à 83 ans) à Moscou |
Nationalité | URSS |
Profession | Joueur d'échecs, Ingénieur |
Mikhaïl Moïseevitch Botvinnik (russe : Михаил Моисеевич Ботвинник) 17 août 1911 à Kuokkala (aujourd'hui Repino, Gouvernement de Viborg (Grand-duché de Finlande) au nord de Saint-Pétersbourg, Russie - 5 mai 1995 à Moscou) est un champion du monde d'échecs soviétique.
Sommaire |
[modifier] L'ère des échecs soviétiques
Mikhaïl Botvinnik fit d'abord parler de lui en 1925 en battant le champion du monde Capablanca dans une simultanée. Puis, il fut remarqué très jeune et soutenu par le père de l'école soviétique d'échecs, Alexandre Iline-Jenevski, qui organisa en 1933 un match entre Botvinnik et Salo Flohr, un des meilleurs joueurs du monde et parmi les plus difficiles à battre. Mené 2-0 dans la première moitié du match, Botvinnik gagna deux parties en une semaine et réussit à faire match nul 6-6 (+2 -2 =8).
Botvinnik fit son entrée sur la scène internationale à Hastings en 1934 (+3 -2 =4) après un succès à Leningrad (+5 -1 =5) plus tôt dans l'année. Il remporta le fort tournoi de Moscou (+9 -2 =8) en 1935 en compagnie de Flohr, termina deuxième (+7 -1 =10) à l'édition suivante en 1936 derrière Capablanca, mais les deux joueurs partagèrent la première place à Nottingham (+6 =8) la même année. Malgré un insuccès relatif au tournoi AVRO en 1938 (il termina 3e (+3 -2 =9) derrière Paul Keres et Reuben Fine mais devant trois champions du monde, Alexandre Alekhine, Max Euwe et José Raúl Capablanca). Beaucoup le considéraient comme le challenger le plus sérieux pour le champion français. Après le tournoi, il rencontra Alekhine et ils convinrent officieusement du principe d'un match, mais l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale mit fin à tout espoir. En 1945, Botvinnik lança à nouveau son défi, mais officiellement cette fois.
Entre 1941 et 1947, Botvinnik remporta tous les tournois auxquels il participa, dont trois championnats d'URSS (le championnat absolu en 1941 mais qui n'est pas comptabilisé comme titre, 1944 et 1945 après les titres de 1931, 1933, 1939 et 1952 soit 6 titres, record partagé avec Mikhaïl Tal) et les forts tournois de Groningue en 1946 et Moscou (le Mémorial Tchigorine)en 1947.
Le champion du monde en titre Alexandre Alekhine décéda brutalement en 1946 et le titre mondial dut être remis en jeu. La Fédération internationale des échecs organisa un tournoi avec les meilleurs joueurs du moment : deux Occidentaux (trois étaient prévus, mais Reuben Fine déclara forfait, alléguant des raisons professionnelles) et trois Soviétiques. Il y eut donc Samuel Reshevsky, Polonais émigré aux États-Unis et l'ancien champion du monde hollandais Max Euwe pour le bloc de l'Ouest, Mikhaïl Botvinnik, Paul Keres, Estonien récemment redevenu Soviétique et Vassily Smyslov pour le bloc de l'Est. Botvinnik l'emporta aisément avec 14 points sur 20 (+9 -1 =10).
Cette victoire, qui inaugura une domination soviétique de près de 50 ans sur le monde des échecs, eut certainement un impact dans la politique de l'URSS vis-à-vis des échecs. Dix ans plus tard, on comptait un million de joueurs licenciés en URSS.
Après sa victoire en 1948, Botvinnik s'abstint de disputer la moindre partie officielle jusqu'au match de 1951 contre David Bronstein. D'ailleurs, le champion soviétique ne participa plus que rarement aux grands tournois internationaux, enregistrant plus ou moins de succès, malgré une victoire avec Smyslov au mémorial Alekhine en 1956. Contre David Bronstein, il fut mis en difficulté : le jeu original et sans complexe de son adversaire, ainsi que le manque de compétition le contraignirent à concéder le match nul 12-12 (+5 -5 =14). Si Botvinnik domina son adversaire dans les finales, ce dernier commettant plusieurs erreurs grossières, il perdit toutes ses parties en milieu de jeu, le plus souvent dans des phases tactiques.
En 1954, Botvinnik défendit son titre contre Vassily Smyslov et dut encore se contenter d'un match nul 12-12 (+7 -7 =10), même si le match fut spectaculaire : pas moins de 8 parties consécutives furent gagnées par l'un ou l'autre, ce qui est exceptionnel à ce niveau. Dès lors, on commença à s'interroger sur le bien-fondé de la règle stipulant que le champion du monde conservait son titre en cas de match nul.
Botvinnik perdit une première fois son titre en 1957 contre Vassily Smyslov (+3 -6 =13). Il le récupéra en 1958 lors du match revanche (+7 -5 =11).
Il le perdit une deuxième fois en 1960 face à Mikhaïl Tal, âgé alors de 23 ans (+2 -6 =13). Et il le regagna à nouveau lors du traditionnel match revanche en 1961 (+10 -5 =6), mais dans des conditions particulières puisque son adversaire connaissait alors de sérieux problèmes de santé.
En 1963, il le perdit définitivement contre Tigran Petrossian par 9,5 contre 12,5 (+2 -5 =15).
À ce moment, la FIDE supprima le droit de revanche de l'ex-champion en titre et Botvinnik, âgé de 52 ans, renonça à regagner sa couronne. Qualifié d'office pour les matchs des candidats du cycle suivant en qualité de champion du monde sortant, il déclina l'offre et fut remplacé par Efim Geller.
Dans les années 1960, il participa aux championnats d'URSS par équipes et à plusieurs tournois internationaux. Il obtint encore la première place à :
- 1961/62 Hastings (+7 =2)
- 1962 Stockholm (+8 =1)
- 1963 Amsterdam (+3 =2)
- 1965 Noordwijk (+5 =2)
- 1966 Amsterdam (+7 -1 =1)
- 1966/67 Hastings (+5 -1 =3)
- 1969 Beverwijk (+6 =9)
En 1970, Botvinnik décida d'arrêter sa carrière de joueur après que le match prévu contre l'Américain Bobby Fischer eut été annulé.
[modifier] Le grand homme des échecs soviétiques
Au-delà de ses titres mondiaux, il règna sans partage sur les échecs soviétiques pendant plusieurs décennies, non sans donner naissance à de solides inimitiés. Celle de David Bronstein, par exemple, qui a toujours douté de ses capacités réelles et lui reprochait d'avoir été favorisé par le pouvoir[1]. Entre autres griefs, il lui reprochait de gagner ses parties surtout après l'ajournement et de les perdre surtout avant.
Après sa victoire dans le championnat du monde 1948, il fit une pause dans les échecs et se consacra à ses études d'ingénieur en électricité. Il décrocha son doctorat durant les trois années d'interruption de sa carrière. En 1970, il dirigea une école d'échecs à Moscou, dont sont issus Anatoli Karpov, Garry Kasparov et Vladimir Kramnik. Il s'investit également beaucoup dans la recherche informatique consacrée aux échecs, cherchant à mettre au point une intelligence artificielle sans beaucoup de succès.
On a souvent dit de Botvinnik qu'il était le père de l'École Soviétique. On pourrait plutôt dire qu'il est un des piliers du système de formation qui a permis aux échecs soviétiques de dominer jusqu'à nos jours, y compris après la disparition de l'URSS car la plupart des meilleurs joueurs actuels sont issus de l'ancien État et de l'ancien système de formation des jeunes joueurs. D'autre part, il est surtout considéré comme le maître de la préparation, tant dans les ouvertures que dans l'étude de ses propres parties et de ses adversaires. Il est étonnant de constater que Botvinnik n'a jamais gagné un match comme champion du monde mais toujours remporté comme challenger, montrant une capacité d'adaptation et d'analyse peu communes. Enfin, son jeu positionnel était redoutable mais il était fragile lorsque la partie était compliquée et qu'il ne pouvait analyser toutes les conséquences, ce qui explique ses difficultés face à Mikhaïl Tal et David Bronstein. Toutefois, il a réussi quelques chefs d'œuvres d'attaque, qui lui ont valu plusieurs prix de beauté.
[modifier] Olympiades
En dehors des matchs de championnats du monde, Botvinnik joua aussi pour l'équipe d'URSS lors de six éditions de cette compétition où l'URSS remporta la médaille d'or.
- 1954 Amsterdam: 1er échiquier (+6 =5) - Médaille d'or
- 1956 Moscou: 1er échiquier (+6 =7) - Médaille d'argent
- 1958 Munich: 1er échiquier (+7 -1 =4) - Médaille de bronze
- 1960 Leipzig: 2e échiquier (+8 =5) - Médaille d'or
- 1962 Varna: 1er échiquier (+5 -1 =6)
- 1964 Tel Aviv: 2e échiquier (+7 -1 =4) - Médaille de bronze
[modifier] Championnats d'Europe des nations
Il ne participa qu'à deux éditions de cette épreuve. L'URSS y prit la première place.
- 1961 Oberhausen: 1er échiquier (+4 -1 =4) - Médaille d'or
- 1965 Hambourg: 2e échiquier (+2 -3 =3)
[modifier] Match URSS contre le Reste du monde
Quelques mois avant de mettre fin à sa carrière, il participa à la première édition disputée en 1970 à Belgrade. Il fut opposé au 8e échiquier à Milan Matulović. Il remporta leur match individuel (+1 =3).
[modifier] Une partie
Tigran Petrossian - Mikhaïl Botvinnik, match d'entraînement, 1952[2]
1.d4 Cf6 2.c4 e6 3.Cf3 d5 4.Cc3 c6 5.cxd5 cxd5 6.Ff4 Cc6 7.e3 Ch5 8.Fg5 Db6 9.a3 h6 10.Fh4 g5 11.Fg3 Cxg3 12.hxg3 Fg7 13.Fd3 Dd8 14.Ch2 h5 15.Tc1 Fd7 16.Cb5 Rf8 17.Cf1 g4 18.Cd2 e5 19.Db3 exd4 20.Cxd4 Cxd4 21.exd4 De7+ 22.Rd1 Fxd4 23.Tc7 Fb6 24.Te1 Dd6 25.Txb7 Th6 26.Fb5 Fe6 27.f4 gxf3 28.Cxf3 Tc8 29.Ce5 Dc5 30.Txf7+? (Db4!) Rg8 (FxT? 31 Cd7+) 31.Tf3 Dc1+ 32.Re2 Tc2+ 33.Rf1 Dd2 0-1 (34. Fe2, Dd4).
[modifier] Notes
- ↑ . Ceci n'est pas forcément exact car Botvinnik était d'origine juive, comme Bronstein, et les autorités auraient préféré un pur Russe comme Smyslov au lieu de non-Russes comme Keres, Botvinnik et Bronstein.
- ↑ Petrossian-Botvinnik 1952 sur ChessGames.com
[modifier] Références
- Edward Winter, World chess champions, Pergamon, 1981 (ISBN 0-08-024094-1)
- David Hooper, Kenneth Whyld, The Oxford Companion To Chess, Oxford University, 1996 (ISBN 0-19-280049-3)
- Anne Sunnucks, The Encyclopaedia of Chess, Hale, 1970 (ISBN 0709110308)
- William Hartston, Kings of Chess, Pavilion, 1986 (ISBN 1-85145-075-0)
[modifier] Liens externes
- (en) Courte biographie et parties de Mikhaïl Botvinnik sur ChessGames.com
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