Josip Broz Tito
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Josip Broz Tito | |
Nom | Josip Broz |
Surnom | Tito |
Naissance | 25 mai 1892 à Kumrovec, Autriche-Hongrie (auj. Croatie) |
Décès | 4 mai 1980 (à 87 ans) à Ljubljana, Yougoslavie (auj. Slovénie) |
Nationalité | Yougoslave |
Profession | Homme politique, révolutionnaire, maréchal |
Autres fonctions | Président de la RSFY, Maréchal de Yougoslavie |
Josip Broz Tito (Slovène, Croate latin: Josip Broz Tito; cyrillique et Macédonien : Јосип Броз Тито) (né le 7 mai 1892 à Kumrovec, en Autriche-Hongrie, - 25 mai sur son certificat de naissance officiel - – mort le 4 mai 1980 à Ljubljana, en Slovénie), fut le président de la République fédérale socialiste de Yougoslavie de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu'à sa mort en 1980. Il était également "Maréchal de Yougoslavie" - le grade le plus élevé de l'armée yougoslave - du 29 novembre 1943, à sa mort, en 1980. C'est la seule personne qui fut promue à ce grade. C'était par ailleurs l'un des fondateurs du Kominform, puis quelques années après, du mouvement des non-alignés.
Sommaire |
[modifier] Début
Josip Broz est né le 7 mai 1892 à Kumrovec, dans le Zagorje, en Croatie, dans ce qui était alors l'Autriche-Hongrie. Il est le 7e enfant de la famille de Franjo et Marija Broz. Son père, Franjo Broz, était croate alors que sa mère Marija Broz, née Javeršek, était slovène.
Après avoir passé une partie de son enfance avec son grand-père maternel à Podsreda, il entre à l'école primaire à Kumrovec qu'il quitte en 1905. En 1907, il est embauché en tant que machiniste à Sisak.
Sensibilisé au mouvement ouvrier, il célèbre la fête du Travail pour la première fois. En 1910, il rejoint le syndicat des ouvriers de la métallurgie et, en même temps, le parti social-démocrate de Croatie et de Slavonie. Entre 1911 et 1913, il travaille de courtes périodes à Kamnik (Slovénie), Cenkovo (Bohême), Munich et Mannheim (Allemagne) où il est employé par le constructeur automobile Benz. Il se rend ensuite à Wiener Neustadt (Autriche), où il travaille pour Daimler en tant que pilote d'essais.
Fin 1913, Broz est mobilisé et sert dans l'armée de l'Autriche-Hongrie. En mai 1914, il remporte la médaille d'argent d'un concours d'escrime au sein de l'armée austro-hongroise à Budapest. Il est envoyé à Ruma (Voïvodine). Arrêté pour propagande anti-guerre, il est emprisonné à la forteresse de Petrovaradin près de Novi Sad. En 1915, il est envoyé sur le front de l'est, en Galicie combattre contre la Russie. En Bucovine il est gravement blessé par un éclat d'obus. En avril, le bataillon entier est fait prisonnier par les Russes.
Après avoir passé plusieurs mois à l'hôpital, Broz est envoyé dans un camp en Oural fin 1916. En avril 1917, il est arrêté pour avoir organisé des manifestations de prisonniers de guerre. Il s'évade et rejoint les manifestations de Saint-Pétersbourg du 16 et 17 juillet 1917. Il fuit en Finlande pour échapper à la police mais est arrêté et enfermé à la forteresse de Petropavlovsk pendant trois semaines. Après avoir été transféré à Kungur (Krai de Perm), il s'échappe d'un train. En novembre, il s'engage dans l'Armée rouge à Omsk (Sibérie). En 1918, il s'inscrit au parti communiste russe. En 1920 il devient membre du parti communiste de Yougoslavie qui sera bientôt interdit.
Il devient agent clandestin du parti dans son pays natal (entre 1923 et 1928), activités qui lui valurent d'être emprisonné pendant 5 ans (entre 1928 et 1934).
En 1935, il travailla un an dans la section Balkans du Komintern. Il était membre du parti communiste soviétique et de la police secrète soviétique, le NKVD. En 1936 le Komintern envoie le camarade Walter (i.e. Tito) en Yougoslavie pour purger le parti. En 1937, Staline fait exécuter le secrétaire général du parti communiste de Yougoslavie Milan Gorkic à Moscou. Tito est nommé par Staline secrétaire général du parti communiste de Yougoslavie, toujours hors-la-loi. Selon l'historien Jean-Jacques Marie (Staline, Fayard, 2001), il fut question à Moscou de liquider également Tito, mais Staline s'y opposa et le laissa repartir d'URSS, non sans avoir fait fusiller son épouse.
Pendant cette période Tito suit la politique du Komintern et soutient Staline, critiquant les démocraties occidentales, l'Italie fasciste et l'Allemagne nazie. Au moment de la guerre d'Espagne, il fut à Paris une plaque tournante du recrutement et de l'organisation des Brigades Internationales.
[modifier] Origine du nom Tito
Josip Broz adopta le nom de Tito en 1934 alors qu'il était membre du bureau politique du parti, alors à Vienne en Autriche. Une explication populaire mais non avérée dit que le nom vient de la concaténation de deux mots croate ou serbe ti (i.e. toi) et to (i.e. ça). Il aurait utilisé ces mots pour donner des ordres en pointant une personne puis une tâche à accomplir. Tito est aussi un ancien nom croate correspondant à Titus. Le biographe de Tito, Vladimir Dedijer, affirmait que son nom viendrait de l'auteur croate Tituš Brezovački.
[modifier] Seconde Guerre mondiale
Après que la Yougoslavie a été envahie par les forces armées italiennes en avril 1941, les communistes furent parmi les premiers à organiser un mouvement de résistance. Le 10 avril, le politburo du parti communiste de Yougoslavie se réunit à Zagreb et décide de commencer la résistance, nommant Tito chef du comité militaire. Tito se révèle être un redoutable leader sur le plan politique et militaire contrairement à ses rivaux royalistes .
Le 22 juin [1], un groupe de 49 hommes attaque un train de réserve allemand près de Sisak; ainsi commencent les premières actions anti-fascistes dans l'Europe occupée. Le 4 juillet, Tito fait imprimer et diffuser publiquement un plaidoyer pour la résistance armée contre l'occupation nazie, en tant que commandant suprême de l'Armée Populaire de Libération et de Séparation Partisane de Yougoslavie. Les partisans sont les protagonistes d'une grande campagne de guérilla et ils commencent à libérer des parties du territoire. Les adversaires sont nombreux: Allemands, Italiens, oustachis(fascistes croates), tchetniks serbes (royalistes), Bulgares et Hongrois.
Après l'expulsion des Allemands de la Serbie (Belgrade est libérée avec l'aide de l'Armée rouge en octobre 1944), Tito devient le chef d'un gouvernement provisoire le 7 mars 1945, avec le représentant monarchiste Ivan Šubašić. Ce dernier est évincé par les communistes en octobre 1945.
Le 5 avril 1945, Tito signe un accord avec l'Union soviétique permettant l'"entrée temporaire de troupes soviétiques sur le territoire yougoslave". Appuyant l'Armée rouge, les partisans gagnent la guerre en 1945, défaisant l'État indépendant de Croatie, vassal des nazis, et poussant même jusqu'à Trieste en Italie, au grand dam des Alliés. Sans aucun doute, la "Guerre pour la libération de la Yougoslavie" est considérée comme l'unique victoire de la Seconde Guerre mondiale à mettre sur le compte des forces de guérilla locales, bien qu'il y ait eu un appui externe, davantage de la part des Britanniques que des Soviétiques. Après la guerre, il conduit la Yougoslavie vers le socialisme et mène une politique de nationalisation et crée une police l'OZNA.
[modifier] La rupture entre Tito et Staline
L'adhésion de la Yougoslavie au Kominform exige une obéissance absolue de Tito à la ligne fixée par le Kremlin. Or, le dirigeant yougoslave, fort de son passé glorieux (libération de la Yougoslavie lors de la Seconde Guerre mondiale), désire rester indépendant des volontés de Staline. Dès la Seconde guerre mondiale, les relations seront houleuses, les Soviétiques censurant les messages que la résistance yougoslave voulait lancer sur la radio "La Yougoslavie Libre" qui émettait depuis Moscou.
Tito prend des initiatives qui déplaisent aux dirigeants soviétiques : soutien aux communistes grecs dans une insurrection que Staline tient pour une aventure, projet d'une fédération balkanique (qui devait grouper l'ex-Yougoslavie, l'Albanie, la Bulgarie et la Grèce si les communistes y prenaient le pouvoir). Tito est aussi un fervent nationaliste qui ne voulait pas se soumettre aux volontés de Staline et des Occidentaux.
La rupture entre les deux hommes est inévitable, car Staline, irrité par le prestige de Tito, n'envisage pas de partager l'autorité et il craint que son esprit d'indépendance ne devienne contagieux dans les démocraties populaires. En effet Tito bénéficiait d'un immense prestige vu ses combats de libérations contre les troupes de l'Axe et des oustachis.
Cette rupture intervient en plusieurs étapes : Dès 1945, Staline place des hommes lui étant dévoués dans l'administration et le parti communiste yougoslave. Cependant, Tito refuse de se laisser subordonner sa police, son armée et sa politique extérieure et de voir se créer des sociétés mixtes de production par lesquelles les Soviétiques contrôleraient les branches essentielles de l'économie du pays.
En mars 1948, Staline rappelle tous ses conseillers militaires et ses spécialistes civils basés en Yougoslavie. Peu après, une lettre du Comité central soviétique critiquant les décisions du PC yougoslave tente de semer la discorde dans celui-ci. Néanmoins, l'inverse se produit, les dirigeants yougoslaves font bloc autour de Tito et les fidèles à Moscou sont exclus du Comité central puis arrêtés. Le Kremlin tente alors un derniers recours en portant l'affaire devant le Kominform. Mais Tito refuse, se sentant « inégal en droits » et « déjugé par les autres partis frères ». Le Kominform considère cet acte comme une trahison. Le 28 juin 1948, le Kominform publie une résolution condamnant l'attitude yougoslave. En excluant la Yougoslavie du Kominform, Staline espère ainsi provoquer un recul des Yougoslaves. C'est un échec : le PC yougoslave, épuré des kominformistes, élit un nouveau Comité central totalement dévoué à Tito.
Winston Churchill apporte son soutien discret à Tito lors de cette crise, lui demandant, en échange, de retirer ses partisans communistes de Grèce et de cesser d'aider les communistes grecs. En contrepartie, Churchill fait savoir à Staline de ne pas toucher à la Yougoslavie. À noter qu'au moment de cette crise balkanique, l'URSS ne possède pas encore la bombe atomique qui eut été une menace de poids.
Staline tente alors de subordonner la Yougoslavie par l'arme économique. Il réduit les exportations de l'URSS vers ce pays de 90 % et oblige les démocraties populaires à faire de même. Ce blocus économique contraint Tito à augmenter ses échanges avec le bloc occidental. Il est néanmoins toujours fidèle au socialisme et se réclame des mêmes principes que l'Union soviétique même s'il reste politiquement indépendant de celle-ci. Tito remet donc en cause la direction unique du monde socialiste par l'URSS et ouvre la voie à l'idée d'un socialisme national. Seule la déstalinisation lancée en URSS sous l'impulsion de Nikita Khrouchtchev permettra une normalisation des rapports soviéto-yougoslaves.
Suite à la conférence de Bandung en 1955, il se rapproche de Nehru et de Nasser, qu'il rencontre à nouveau à la conférence de Brioni en 1956. Il devient ainsi l'un des principaux représentants du mouvement des non-alignés, créé en 1961 lors de la Conférence de Belgrade.
[modifier] Le Président de la République fédérale socialiste de Yougoslavie
Avec la nouvelle constitution de 1953, Tito devient Président. Il le restera jusqu'à son décès. Sa politique demeure autoritaire, bien qu'une certaine libéralisation, qui profite en particulier aux artistes et aux écrivains, suive la démission du chef de la sécurité Aleksandar Rankovic en 1966. Le 1er janvier 1967, la Yougoslavie est le premier pays communiste à ouvrir ses frontières à tous les visiteurs étrangers. Tito critique violemment l'invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du pacte de Varsovie en 1968, ce qui contribue à améliorer son image dans les pays occidentaux.
En 1971, Tito, fraîchement réélu président pour la sixième fois, réprime durement les manifestations nationalistes en Croatie. Pourtant, le 16 mai 1974, il cède à une partie des exigences du « Printemps croate » en promulguant une nouvelle constitution qui renforce le fédéralisme. Cette constitution sera fortement critiquée par certains Serbes qui s'estimeront injustement privés de leur rôle dominant. Tito est parallèlement nommé Président à vie, cependant commence à s'impliquer moins directement dans les affaires.
Tito doit se faire hospitaliser au centre médical de Ljubljana en janvier 1980, à l'âge de 87 ans, pour une thrombose à la jambe gauche. L'amputation ne suffit pas; il meurt le 4 mai. Tito est honorée par des funérailles nationales, auxquelles assistent de nombreuses têtes couronnées et responsables politiques, dont Indira Gandhi, Margaret Thatcher ou Willy Brandt.
Tito repose aujourd'hui dans un mausolée (« Kuća cveća » ou la « Maison des fleurs ») situé dans les faubourgs sud de Belgrade, à côté du Musée du 25 Mai, où sont exposés les cadeaux qu'il a reçus.
La toponymie de la Yougoslavie était fortement marquée par l'empreinte de Tito. Aujourd'hui, bien que les villes aient retrouvé leur nom d'avant le communisme (Titograd est redevenu Podgorica), de nombreuses rues et places portent encore le nom de Tito. Depuis l'éclatement de la Yougoslavie, on constate le retour d'une certaine nostalgie de l'ére titiste, ainsi qu'une idéalisation de cette époque chez les habitants des républiques issues de l'ancienne Yougoslavie.
Tito fut sans doute l'un des plus grands leaders de la Yougoslavie après la période monarchiste. Il fut un homme de guerre efficace plus aux yeux des Anglo-Américains que des Soviétiques, qui lui ont quand même accordé du ravitaillement jusque là réservé à la résistance royaliste. Néanmoins pendant la Seconde Guerre mondiale, il fut l'un des rares dirigeants à être soutenu par les trois grandes puissances (Etats-Unis, Royaume-Uni et URSS). Mais sa neutralité après guerre a été plus bénéfique pour les Occidentaux que pour les Soviétiques[réf. nécessaire].