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Europe-Action - Wikipédia

Europe-Action

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Europe-Action, créé en janvier 1963, était le rassemblement, autour de la revue nationaliste du même nom[1], dirigée par Jacques de Larocque-Latour – dessinateur attitré de la revue sous le pseudonyme de Coral[2] – et tirant à 7 500-10 000 exemplaires[3], de militants menés par Dominique Venner et issus de Jeune Nation, de membres de la Fédération des étudiants nationalistes (FEN), de rescapés de l'OAS, comme Maurice Gingembre, son ancien trésorier, et d'anciens collaborateurs comme Lucien Rebatet.

On y trouvait aussi bien Pierre Vial, futur dirigeant de Terre et peuple, que François Duprat, le « druide nazi[4] » Georges Pinault, dit « Goulven Pennaod », l'écrivain Jean Mabire, François d'Orcival, futur directeur de rédaction des publications de Raymond Bourgine (Valeurs actuelles et Le Spectacle du monde), Jean-Claude Valla, futur directeur de la rédaction du Figaro-Magazine et cofondateur du Groupement de recherche et d'études pour la civilisation européenne (GRECE) avec l'écrivain Alain de Benoist qui était, lui aussi, l'un des principaux rédacteurs de la revue sous le pseudonyme de Fabrice Laroche.

Y collaborèrent Henry Coston, Jacques Ploncard d'Assac, Maurice-Yvan Sicard (sous le pseudonyme de Saint-Paulien) et Marc Augier (Saint-Loup), président du comité France-Rhodésie, ancien membre de la LVF et de la Division Charlemagne, dont il était l'« hagiographe[5] ».

Sommaire

[modifier] Doctrine

Europe-Action, implanté en région parisienne, à Marseille, Lyon, Toulon, ainsi que dans des villes accueillant d'anciens « Pieds-Noirs » rapatriés d'Algérie[6], s'appuie sur des comités de soutien[7], des réseaux de volontaires, des organisations annexes (Centre d'études pour l'économie organique, animé par Maurice Gingembre[8] ; Groupement d'études des rapatriés et sympathisants, etc.), des antennes au sein de la Fédération des étudiants nationalistes et une cellule de réflexion.

En juillet 1962, Dominique Venner écrit dans Pour une critique positive, – parfois comparé au Que faire ? de Lénine[9] et « longtemps considéré comme un texte fondateur par toute une fraction de l'ultra-droite[10] » :

« l'échec algérien a mis un point final aux prétentions des politicards d'extrême-droite. Il a montré la stérilité du seul activisme et l'incapacité des "nationaux". Il a par contre confirmé comme seules justes les perspectives de la révolution nationaliste ».

Le mouvement s'appuie sur cette analyse pour proposer son propre projet. Pierre Milza écrit ainsi[11],[12] :

« Dans l'esprit de Venner et de ses amis, il s'agit de débarrasser le nationalisme et le fascisme de ce qu'ils ont d'un peu vieillot et de dépassé (l'antiparlementarisme, l'anti-intellectualisme, le patriotisme réduit à l'espace hexagonal), tout en se démarquant du nazisme, soit en admettant comme Bardèche qu'Hitler a "fait des erreurs[13]", soit en niant purement et simplement les crimes du IIIe Reich. C'est ainsi qu'Europe-Action accueillera ainsi très favorablement la publication en 1964 du Drame des Juifs européens de Paul Rassinier, l'un des principaux représentants de l'"école révisionniste". »

Nommée « révolution nationaliste », la doctrine de la revue se fonde essentiellement sur le racisme biologique[14] – ou racialisme –, auquel elle cherche à donner des bases « scientifiques ». Les doctrinaires d'Europe-Action proposent ainsi de « créer une puissante organisation nationaliste ayant une totale discipline et une direction unique, parce que la division voue à l'opportunisme et à la désintégration[15] », de « trier la classe dirigeante », d'en « éliminer l'écume biologique », de « renvoyer les médiocres de cette classe à leur rang et conserver l'élite valable », de « ségréguer, sans vaine sensiblerie, le peuple et le déchet biologique », de « ne pas permettre la croissance biologique du déchet[16] ».

Par ailleurs est substitué un « nationalisme européen[17] », nationalisme « unioniste » fondé sur l'« héritage occidental », au traditionnel nationalisme français, qualifié de « séparatiste » et jugé dépassé et incapable de faire face à l'internationalisme « rouge » et au capitalisme « cosmopolite ». Pour la revue de Dominique Venner, l'Europe, loin de se limiter au seul continent, est « un cœur dont le sang bat à Johannesburg et à Québec, à Sydney et à Budapest, à bord des blanches caravelles et des vaisseaux spatiaux, sur toutes les mers et dans tous les déserts du monde[18]. » Ainsi se font-ils les défenseurs de l'apartheid[19], de la Rhodésie, de la ségrégation raciale dans le sud des États-Unis[20] et s'opposent-ils au métissage[21] et à l'immigration africaine[22].

Alain de Benoist contribue en outre à la découverte par les militants nationalistes de l'œuvre de l'épistémologue et historien des origines du christianisme Louis Rougier, publiant ainsi Celse, discours vrai contre les chrétiens en 1965 et Histoire d'une faillite philosophique : la scolastique l'année suivante et écrivant dans Europe-Action :

« Nous opposons Louis Rougier à Jean-Paul Sartre, comme nous condamnons le délire verbal par la logique, Jean Rostand à Teilhard de Chardin, parce que le réalisme biologique est le meilleur outil contre les chimères idéalistes[23]. »

Le mouvement s'oppose également au christianisme considéré comme un danger pour la « communauté occidentale », religion sémite et pervertie, « erreur aussi pernicieuse que celle du matérialisme puisqu'elle provient de la fausse distinction entre l'esprit et le corps[24] » et met en avant une « éthique européenne » refusant aussi bien le conservatisme bourgeois que la technocratie, la démocratie ou le capitalisme libéral et exaltant le culte de l'honneur et de la jeunesse courageuse[25].

[modifier] Éclatement et influence

Europe-Action cesse de paraître début 1967, ayant éclaté suite aux critiques de ceux qui, comme les membres d'Occident (fondé en 1964), lui reprochent son « intellectualisme » et sa passivité, et de militants qui, à l'instar de Pierre Sidos, font grief à ses dirigeants d'être « antichrétiens, apatrides, matérialistes, en somme hérétiques[26] ».

Ainsi, après l'éclatement des « comités T.V. », comités de soutien à Jean-Louis Tixier-Vignancour durant la campagne pour l'élection présidentielle de 1965, est prise la décision de fonder un nouveau parti, le Mouvement nationaliste du progrès, créé le 24 janvier 1966. À l'initiative de Ferdinand Ferrand[27], celui-ci se dote au printemps 1967 d'une structure, le Rassemblement européen de la liberté, en vue de présenter au moins 75 candidats aux élections législatives de mars 1967. La déroute des candidats du REL[28], qui ne parvient à en présenter que 27, entraîna l'implosion du REL en trois courants[29],[30] :

Europe-Action posa toutefois les bases doctrinales de ce qui deviendra quelques années plus tard la Nouvelle Droite. Nombreux sont en effet les anciens militants d’Europe-Action parmi la liste des quarante membres fondateurs du GRECE publiée par Nouvelle École dans son numéro d'août-septembre 1968 : outre Alain de Benoist, Dominique Venner (Julien Lebel), Jean Mabire ou Pierre Vial, on trouve Roger Lemoine, ancien secrétaire d’Europe-Action et futur président du GRECE, ou Jacques Bruyas, ancien responsable de la Fédération des étudiants nationalistes et d'Europe-Action à Nice.

[modifier] Notes et références

  1. Comptant 48 numéros, la revue, qui devait initialement s'appeler Rossel – du nom du colonel Louis Rossel –, parut de janvier 1963 à janvier 1967.
  2. On lui doit des dessins « d'un racisme répugnant » (cf. Joseph Algazy, La tentation néo-fasciste en France de 1944 à 1965, Paris, Fayard, 1984, p. 274) : Noirs « présentés comme des sauvages dévorant de la chair humaine » dans le numéro de mars 1964 ; dans celui d'octobre 1964, portrait d'un Arabe « coiffé d'un tarbouche, avec un visage effrayant, la légende proclamant en grosses lettres :
    "On recherche Mohamed Ben Zobi, né en Algérie, résidant en France. Cet homme est dangereux ! Susceptible de : Tuer ! Violer ! Voler ! Piller etc. etc. etc. etc. Pour le trouver, inutile d'aller très loin... autour de vous, il y en a : 700 000 comme lui !" ».
  3. Ariane Chebel d'Appollonia, L'Extrême-droite en France. De Maurras à Le Pen, éd. Complexe, 1998, p. 311.
  4. Didier Daeninckx, « Quand le négationnisme s'invite à l'université », chapitre 3, Amnistia.net, 31 janvier 2000.
  5. Ariane Chebel d'Appollonia, op. cit., éd. Complexe, 1998, p. 310.
  6. Joseph Algazy, op. cit., p. 283.
  7. Ceux-ci s'appuient sur les carnets d'adresses de la Société de presse et d'édition de la croix celtique, société cofondée en juillet 1958 par Dominique Venner, Pierre et François Sidos, Louis Daney et quatre autres dirigeants de Jeune Nation ; cf. Frédéric Charpier, Génération Occident : de l'extrême droite à la droite, Éditions du Seuil, 2005, p. 60.
  8. François Duprat, Les mouvements d'extrême-droite depuis 1944, Éditions Albatros, 1972, p. 124.
  9. Pierre Milza, Fascisme français, passé et présent, Flammarion, 1988, p. 320.
  10. Pierre Milza, L'Europe en chemise noire. Les extrêmes droites en Europe de 1945 à aujourd'hui, Flammarion, collection « Champs », 2002, p. 193. La note 1 (p. 443) indique par ailleurs : « En décembre 1982, lors du congrès du Parti des forces nouvelles, Roland Hélie, membre du bureau politique, conviait les militants à une relecture du texte de Venner ». Cf. Pierre-André Taguieff, « La stratégie culturelle de la "Nouvelle Droite" en France (1968-1983) », in Vous avez dit fascismes ?, sous la direction de Robert Badinter, Paris, Arthaud/Montalba, 1984, pp. 13-52.
  11. Pierre Milza, L'Europe en chemise noire. Les extrêmes droites en Europe de 1945 à aujourd'hui, Flammarion, collection « Champs », 2002, p. 132.
  12. Pierre Milza, Fascisme français. Passé et présent, Paris, Flammarion, collection « Champs », 2000 [1987], p. 329.
  13. Ainsi l'article « national-socialisme » du « Dictionnaire du militant », paru dans le n°5 d'Europe-Action en mai 1963 (p. 65) affirmait-il :
    « Mouvement populaire allemand qui fut appelé au pouvoir en 1933 sous la direction de son chef Adolf Hitler. En cinq années de paix, déploya une formidable énergie et transforma l'Allemagne, innovant en matière sociale, juridique et économique (...). Il réalisa l'unité allemande et mobilisa le peuple dans une puissante exaltation lyrique. On a pu dire du national-socialisme qu'il fut une dictature de la jeunesse. À côté d'intuitions géniales, ses erreurs ont entraîné sa perte : hypertrophie de la notion du chef ; racisme romantique (non scientifique) uniquement destiné à renforcer un nationalisme étroit, revanchard, agressif ; politique européenne réactionnaire qui non seulement entraîna sa défaite, mais l'hostilité généralisée des peuples européens. Ces erreurs sont dues en grande partie à une absence de fondements doctrinaux établis. »
  14. « La race est en tout cas la nouvelle patrie, "patrie charnelle" qu'il convient de défendre avec un acharnement quasi-animal. » écrit ainsi P. Lamotte dans son article « Avenir sombre pour les États-Unis », Europe-Action, n°2, février 1963.
  15. Europe-Action, n°5, mai 1963, p. 50-51.
  16. Europe-Action, juillet-août 1964, p. 20.
  17. « Aussi leur premier soin fut-il d'oublier la "ligne bleue des Vosges" pour fixer leurs regards sur ces multiples ennemis qui, de toutes parts, montaient à l'assaut de la nation, la gangrenaient, sapaient son moral et réduisaient son peuple à un troupeau d'esclave. Très vite la conjoncture mondiale fit apparaître que la France n'était pas seule visée (...) Français, Allemands, Belges, Portugais, etc..., doivent être solidaires par-delà les différences qui les caractérisent et qui constituent les aspects particuliers d'un nationalisme commun aux Européens. » ; cité in Joseph Algazy, La Tentation néo-fasciste en France, 1944-1965, Fayard, 1984, p. 265.
  18. Europe-Action, juillet-août 1964, p. 13.
  19. Dans une brochure intitulée Vérité pour l'Afrique du Sud et parue aux Éditions Saint-Just en 1965, Gilles Fournier et Fabriche Laroche écrivent : « À l'heure de la décolonisation et de la négrification internationale, elle [l'Afrique du Sud] maintient avec succès un gouvernement blanc, fier de son œuvre et résolu à la poursuivre » (p. 8) et « nous sommes attachés à la nation blanche sud-africaine parce qu'elle est, en tant qu'État, le dernier fortin de l'Occident dont nous sommes issus » (p. 19) ; Marc Augier, fondateur du Comité France-Rhodésie, déclare quant à lui, dans le numéro d'octobre 1965 d'Europe-Action : « Personnellement, je lèverai une légion de combattants défenseurs de la race blanche et nous lutterons aux côtés de nos frères de Pretoria. »
  20. De retour d'une visite aux États-Unis, Fabrice Laroche écrit dans un article présentant les différents courants favorables à la ségrégation raciale (Europe-Action, octobre 1965, p. 9-12) :
    « La ségrégation légale supprimée (et elle le sera partout, il ne faut pas se faire d'illusions) est aussitôt remplacée par une ségrégation de fait sur laquelle les moyens légaux, donc pacifiques, n'ont plus prise. »
  21. Gilles Fournier considère tout « mélange des races » comme un « suicide génétique » et ceux qui le pratiquent comme opérant un « suicide lent » (Europe-Action, juin 1964, p. 19).
  22. « Ne voient-ils pas que la doctrine de la porte ouverte aboutira, si elle triomphe, à recouvrir la Touraine et la Toscane, le Sussex et la Thuringe, le Vermont et la Crimée, d'une croûte hideuse de paillotes, de gourbis et de cagnas ? (...)
    Pensent-ils que le mot "France" pourrait recouvrir légitimement à la fois la France d'aujourd'hui et un hexagone sur le terrain duquel camperaient vingt millions de Maghrébins et vingt millions de Négro-Africains ? » (Europe-Action, juin 1964, p. 17-18.)
  23. Fabrice Laroche, « Notre monde », Europe-Action, n°36, décembre 1965, p. 9.
  24. Europe-Action, n°5, mai 1963.
  25. Ariane Chebel d'Appollonia, op. cit., éd. Complexe, 1998, p. 310-311.
  26. Pierre Sidos, Le Monde, 16 février 1964 ; cité par Joseph Algazy, La Tentation néo-fasciste en France, 1944-1965, Paris, Fayard, 1984, p. 286.
  27. François Duprat, op. cit., p. 135.
  28. Les listes REL totalisèrent en moyenne 2,58 % des suffrages exprimés, avec des pointes à 3,8 % dans la quatrième circonscription des Bouches-du-Rhône (Marseille) et 4,4 % dans la deuxième circonscription de la Moselle (Metz).
  29. François Duprat, op. cit., p. 137.
  30. « Étudiants nationalistes (publications) », Centre d'histoire de Sciences Po.

[modifier] Bibliographie

  • Joseph Algazy, La tentation néo-fasciste en France de 1944 à 1965, Paris, Fayard, 1984.
  • Ariane Chebel d'Appollonia, L'Extrême-droite en France. De Maurras à Le Pen, éd. Complexe, 1998.
  • Pierre Milza, L'Europe en chemise noire. Les extrêmes droites en Europe de 1945 à aujourd'hui, Flammarion, collection « Champs », 2002, 479 p. ISBN 2-08-080083-3
  • Id., Fascisme français. Passé et présent, Paris, Flammarion, collection « Champs », 2000 [1987].


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