Lionel Daunais
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Lionel Daunais (31 décembre 1901 à Montréal - 18 juillet 1982 ibidem) était un chanteur, baryton d'opéra, compositeur, comédien et metteur en scène québécois.
Né dans une famille modeste, il s'intéresse très tôt au chant, qu'il étudie sous la direction de la soprano Céline Marier (1871-1940) et, plus tard (à partir de 1930), à l'harmonie et à la composition, auprès du pianiste et compositeur, harmonisateur d'œuvres folkloriques, Oscar O'Brien (1892-1958).
En 1922, il se produit à l'académie Querbes d'Outremont lors d'un concert d'élèves.
En 1923, il obtient le premier prix au Montreal Musical Festival, organisé par la Metropolitan Choral Society.
En 1925, il est proclamé « Lauréat de l'Académie de musique du Québec ».
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[modifier] Carrière
[modifier] Débuts à Montréal (1926)
Après plusieurs années consacrées à l'apprentissage du solfège, du chant, de la composition et de l'harmonie, l'année 1926 est une année décisive et faste dans sa carrière car, d'une part, comme professionel il donne son premier récital (à l'hôtel Ritz-Carlton de Montréal), il fait ses débuts à l'opéra (au théâtre Orpheum) en tant qu'Ourrias dans Mireille (Gounod) et, d'autre part, il gagne le Prix d'Europe.
[modifier] Perfectionnement à Paris (1926-1928)
Ce Prix d'Europe lui permet de poursuivre aussitôt ses études à Paris : le contrepoint avec une élève de Darius Milhaud (1892-1974) et la mise en scène avec Émile Marcellin de l'Opéra-Comique.
[modifier] Contrat de Premier baryton à l'Opéra d'Alger (1929)
En 1929, il signe un contrat de « premier baryton » avec l'Opéra d'Alger, où en très peu de temps il prépare et interprète 23 rôles importants, dans notamment Carmen (Bizet), Faust (Gounod), Manon (Massenet), La Traviata (Verdi), Le Barbier de Séville (Rossini).
[modifier] Retour au Canada (1930)
À son retour au Canada, en 1930, il participe au troisième Festival du Canadien Pacific à Québec avec un quatuor d'Ottawa, Les Troubadours de Bytown, dans lequel il remplace alors le barde Charles Marchand (1890-1930) tout juste décédé et qu'appuyait musicalement Oscar O'Brien.
Cette même année 1930, il tient aussi le rôle de Champlain dans L'Ordre de Bon Temps de Healey Willan (1880-1968) et il débute à La Société canadienne d'opérette à Montréal (rôle de Clément Marot dans La Basoche (1890) d'André Messager (1853-1929)), troupe avec laquelle il tiendra de nombreux autres rôles jusqu'en 1935, s'y imposant comme vedette.
[modifier] Le Trio lyrique (1932-1965)
En 1932, Daunais fonde « Le Trio lyrique » (avec la contralto Anna Malenfant (1905-1988)[1] et Ludovic Huot (1897-1968), ténor remplacé par Jules Jacob (1906-1969) vers 1940).
Le Trio lyrique se produit avec le pianiste Allan McIver (1904-1969) qui réalisera aussi toutes les harmonisations des premiers disques du groupe chez His Master's Voice.
Ce trio est engagé en 1933 par « La Commission canadienne de radiodiffusion » (qui sera plus tard renommée Société Radio-Canada, SRC) pour l'émission « Une heure avec vous », une série d'émissions qui se poursuivra (en direct) pendant 87 semaines, sous la direction musicale de Giuseppe Agostini (1890-1971).
En 1936, le trio se produit à New York pendant six mois à une émission du réseau radiophonique américain CBS.
En 1944, depuis Montréal, Le Trio lyrique commence à se produire (en direct) sur la chaîne française (alors souvent bilingue) de la Société Radio-Canada (SRC).[2]
À la fin des années 1940, le Trio lyrique enregistre sur disque (78 tours/minute) quelques-uns de ses plus importants succès, toutes des chansons fantaisistes de Lionel Daunais : « Aglaé », « Le petit chien de laine », « La tourtière », « Intanouiche in'tanaga » et « Monsieur le curé ». Chacun des membres menant une carrière personnelle importante, Le Trio lyrique se produit pourtant à de très nombreuses émissions de radio, surtout à la SRC, animant notamment sa propre émission le samedi soir à 21 heures.
Le Trio lyrique enregistre en 1954, en guise d'apogée, un microsillon (33 tours/minute) de ses chansons les plus appréciées, auparavant interprétées partout dans les salles et sur les ondes.
En 1962, Radio-Canada et les journaux québécois fêtèrent les trente ans du Trio Lyrique.
Le trio devait met fin à ses activités vers 1965, mais il s'est temporairement reconstitué à l'automne 1971 (avec le ténor Guy Piché, en remplacement de Jules Jacob, décédé), pour l'enregistrement à la SRC d'une rétrospective de l'oeuvre de Lionel Daunais.
- Tant Lionel Daunais, l'un des premiers auteurs-compositeurs canadiens-français d'importance, que Le Trio Lyrique entier ont eu un impact important sur le développement d'une chanson « française nord-américaine » originale, qui se démarque aussi bien de la française que de l'américaine. Les voix du trio sont des voix de chanteurs d'opérette. La diction est très soignée. Les thèmes sont québécois ou canadiens-français, et plus ruraux qu'urbains, réflétant l'époque actuelle ou récente. Et cette chanson puise dans les racines folkloriques, même parfois religieuses, avec une aimable dérision qui permet la saine distanciation à laquelle Daunais a toujours tenu.
[modifier] Les Variétés lyriques (1936-1955)
Puis en 1936, Lionel Daunais fonde avec Charles Goulet[3] « Les Variétés lyriques ». Cette association dure jusqu'en 1955, sans subvention ni privée ni gouvernementale, mais sur simple abonnement de saison, jusqu'à ce que l'apparition des téléviseurs dans les domiciles incitent les spectateurs à moins fréquenter les salles de spectacles pour parvenir à payer ces dispendieux nouveaux appareils n'offrant de spectacle que sur petit écran monochrome. Pendant cette période de quelque 20 ans, Lionel Daunais aura chanté aux Variétés lyriques dans 813 représentations, d'une dizaine d'opéras et plus de 60 opérettes, tout en étant, de plus, souvent responsable de la mise en scène et des répétitions des artistes lyriques et scéniques, tandis que Charles Goulet préparait et dirigeait tant les chœurs que les musiciens de l'orchestre...
Combien d'interprètes (musiciens, chanteurs, comédiens) et d'artisans, techniciens, spécialistes de tous ordres... y furent-ils soutenus et rassasiés, durant ces quelque 20 ans où l'assistance venait se délecter et rire devant la scène !?
- La sensibilité de Daunais est présente partout, qui est douce espièglerie, aussi. Avec lui, place au jeu et à la musique, à la poétique fantaisie; point de platitude ni de naïveté, sinon pour en rire !
[modifier] Le parolier, compositeur, harmonisateur
Auteur des paroles et de la musique d'une centaine de mélodies pour voix et piano et 18 pour choeur, dont sa merveilleuse mise en musique et harmonisation à 4 voix de poèmes tels que « Le pont Mirabeau » (de Guillaume Apollinaire), Daunais fit également l'harmonisation d'une quarantaine de chants folkloriques et composa une trentaine de chansons pour enfants.
[modifier] Archives
Le Fonds Lionel-Daunais contient la plupart de ses œuvres et autres documents qui furent siens.
Lieu de conservation : Bibliothèque et Archives nationales du Québec.
[modifier] Un admirable pionnier
Il a été un admirable pionnier, l'un des grands artisans, créateurs d'emplois et animateurs de la scène lyrique au Québec, sous toutes ses formes, et un grand auteur-compositeur-interprète et harmonisateur, un agréable fantaisiste et musicien, ainsi qu'un immense éveilleur.
[modifier] Honneurs
- 1923 - Premier prix au Montreal Musical Festival, organisé par la Metropolitan Choral Society de Montréal
- 1925 - Lauréat de l'AMQ (Académie de musique du Québec)
- 1926 - Prix d'Europe, lui permettant de poursuivre ses études à Paris auprès d'Émile Marcellin, de l'Opéra-Comique
- 1948 - Grand prix au Concours Marly-Polydor à Montréal, pour sa « Chanson du maître cordonnier »
- 1957 - Deux prix (sur les 10 attribués, sous participation anonyme) comme auteur-compositeur au « Premier concours de la chanson canadienne » à la télévision de la SRC : pour ses chansons fantaisistes inédites « Le voyage de noce » et « Les perceurs de coffre-fort »
- 1965 - Médaille Bene merenti de patria (de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal)
- 1972 - Médaille du Conseil canadien de la musique
- 1973 - Membre de l'Ordre du Canada
- 1977 - Prix Calixa-Lavallée (de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal)
- 1978 - Officier de l'Ordre du Canada
- À titre posthume
- 1982 - Prix Denise-Pelletier (exceptionellement à titre posthume, décerné le 23 novembre 1982, 4 mois après décès)
- 2006 - Admis au Panthéon des Auteurs et Compositeurs canadiens, Époque Radiophonique (1921-1960)
- Il conserve son statut de « compositeur agréé » du Centre de musique canadienne.
[modifier] Écoute d'enregistrements sonores
- Le chant du baryton Lionel Daunais, à l'âge de 25 à 48 ans (1926-1949), sur le site Bibliothèque et Archives nationales du Québec : 12 œuvres (numérisées à partir d'enregistrements sur 78 tours/min., 25 cm), soit 11 chants classiques et (primée en 1948) sa « Chanson du maître cordonnier »
- Le chant du Trio lyrique (Anna Malenfant (1905-1988) contralto, Jules Jacob (1906-1969) ténor , Lionel Daunais (1901-1982) baryton et directeur musical)
- dans Le merle (folklore), bande sonore du film d'animation Le Merle — Norman McLaren, 1958, 04 minutes 04 secondes, à l'ONF :
- un extrait sur le site officiel de l'ONF
- l'intégrale sur YouTube (04 min. 38 sec., car précédé du générique et d'un texte explicatif en anglais)
— Jugez de la richesse harmonique des timbres de voix, du synchronisme, de la diction, de l'homogénéité… !
- dans L'alouette chanta le jour (folklore) :
- un extrait (01 min. 50 sec.) de la piste 5 du premier CD
(tiré du coffret « 100 Ans de chansons folkloriques au Québec », éditeur principal : Disques XXI-21 / XXI-21 Productions Inc., Montréal, 1999, …)
— Comparez avec les autres groupes (selon tout critère : beauté, homogénéité et synchronisme des voix, harmonisation, …) !
- un extrait (01 min. 50 sec.) de la piste 5 du premier CD
- dans Le petit chien de laine (paroles, musique et harmonisation de Lionel Daunais : un très grand succès, et durable, pour publics de tous âges, une histoire fantaisiste sur une musique très cocasse) :
- dans Le merle (folklore), bande sonore du film d'animation Le Merle — Norman McLaren, 1958, 04 minutes 04 secondes, à l'ONF :
[modifier] Citations
- « Il y a souvent un esprit cocasse dans votre musique et lorsque quelqu'un vous en fera la remarque, n'en rougissez pas, c'est un don très rare ! » — Francis Poulenc à Lionel Daunais
- « Le matin j'ouvre le journal
Pour voir si tout va toujours mal[4]
[…]
Les patates[5] seront bonnes cette année
Boum badiboum !
Si l'hiver peut finir au mois d'mai.[6]
Boum badiboum !
On les mange en purée
Comme à l'accoutumée
[…]
Ou en french potatoes[7] [chips ! ]
[…]
Si ton bras sait porter l'épée[8],
Les patates seront bonnes, c't'année ! » — Lionel Daunais, Les patates (extraits de cette chanson)
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens externes
- Lionel Daunais sur le site du ministère exécutif du Québec (Prix du Québec, culturel, 1982)
- Mention dans l'Encyclopédie de la musique au Canada (Encyclopédie canadienne)
- Site voué à Lionel Daunais : esquisse biographique et inventaire de ses œuvres
[modifier] Références et notes
- ↑ Anna Malenfant (Shediac, près Moncton, N.-B., 16 octobre 1905 - Montréal, 15 juin 1988), contralto, professeure, compositrice sous le nom de « Marie Lebrun ». D.Mus. honoris causa (Université de Moncton, 1975). — Voir sa fiche dans l'Encyclopédie de la musique au Canada (Encyclopédie canadienne).
- ↑ Historique de la chaîne française de Radio-Canada — Un texte d'Yvon Chouinard (2005).
- ↑ Charles Goulet (Liège, 4 avril 1902, naturalisé canadien 1921 - Montréal, 12 mars 1976), pianiste, violoniste, baryton, chef de chœur, professeur, impresario, administrateur, haut fonctionnaire, ... D.Mus. (Université de Montréal, 1937) : sa thèse de doctorat s'intitulait « L'Art du chant choral ». — Voir sa fiche dans l'Encyclopédie de la musique au Canada (Encyclopédie canadienne).
- ↑ « Pour voir si tout va toujours mal » : pour les Canadiens-français, « faire patate » est une de leurs expressions poétiques populaires signifiant « échouer », « rencontrer son Waterloo », « perdre la face », « n'avoir pas su résister dans l'eau bouillante », « aller mal », … Les journaux quotidiens n'ont jamais assez d'espace pour souligner ce qui va bien, ce qui est drôle; ils ne relatent que ce qui a « fait patate » !!
- ↑ Les patates (pommes de terre) sont si faciles à cultiver (dans une terre plutôt sablonneuse) et si peu dispendieuses, qu'elles sont la nourriture du commun, du vulgaire, des pauvres : qu'elles soient bonnes ou pas, ils s'en empiffrent — pas le choix ! Les pauvres Irlandais immigrés au Canada dans la seconde moitié du XIXe siècle, leur grande famine obligeant, les ont popularisées.
- ↑ « Si l'hiver peut finir au mois d'mai » — allusion plaisante au long hiver québécois : il y a, certaines années, risque de gel au sol jusqu'à la fin de mai à Montréal, jusqu'à la mi-juin à Québec, jusqu'à la fin de juin à Gaspé…
- ↑ « Ou en french potatoes » — moquerie : les Québécois francophones n'utilisent que l'expression « patates frites » pour désigner les [pommes de terre] « frites » !
- ↑ « Si ton bras sait porter l'épée » — allusion espiègle aux paroles de l'Hymne national canadien : « […] / Car ton bras sait porter l'épée, / Il sait porter la croix. / Ton histoire est une épopée / Des plus brillants exploits. / […] » !