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Démosthène - Wikipédia

Démosthène

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Buste de Démosthène, copie romaine d'une statue de Polyeuctos, musée du Louvre
Buste de Démosthène, copie romaine d'une statue de Polyeuctos, musée du Louvre

Démosthène, en grec ancien Δημοσθένης / Dêmosthénês, né à Athènes en 384 av. J.-C., mort à Calaurie en 322, est un homme d'État athénien. Grand adversaire de Philippe II de Macédoine, il est l'un des grands orateurs attiques.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] La jeunesse

Démosthène naît dans une famille athénienne riche mais commerçante, ce qui lui vaut le mépris des vieilles familles aristocratiques. Son père, Démosthène de Péanie, possède en effet une manufacture d'armes. Sa mère est d'origine scythe, ce qu'Eschine lui reprochera plus tard. À sept ans, il devient orphelin. Son père, par testament, l'a confié à trois tuteurs : deux de ses neveux, Aphobos et Démophon, et un certain Therippide. Ses tuteurs dilapident sa fortune, soit par erreur de gestion ou par intention malhonnête. Le jeune homme se retrouve sérieusement appauvri.

À seize ans, il assiste par hasard au procès intenté à Callistratos, en 367 av. J.-C. Il est fasciné par le talent de l'orateur, et décide d'apprendre la rhétorique. Il devient alors l'élève d'Isée, un autre orateur attique, spécialisé dans les affaires de succession. Selon Plutarque, lors de son premier discours en public, l'assistance se moque de son problème d'élocution — vraisemblablement une difficulté à prononcer la lettre R — et de ses gestes maladroits.

« Il fut en butte aux clameurs et aux moqueries à cause de son style insolite, dont on jugeait les périodes tarabiscotées et les raisonnements poussés avec trop de rigueur et forcés à l'extrême. Il avait d'ailleurs, semble-t-il, une voix faible, une élocution confuse et un souffle court, qui rendait difficile à saisir le sens de ses paroles, obligé qu'il était de morceler ses périodes. »
    — Plutarque, Vie de Démosthène, 9

Démosthène pratiquant l'art oratoire par Jean Lecomte du Nouÿ ; pour renforcer sa voix, Démosthène s'exerce contre le bruit des vagues
Démosthène pratiquant l'art oratoire par Jean Lecomte du Nouÿ ; pour renforcer sa voix, Démosthène s'exerce contre le bruit des vagues

Démosthène s'efforce alors de rectifier ces défauts, allant jusqu'à s'entraîner à parler avec des petits galets dans la bouche. Il s'enferme régulièrement chez lui pour étudier le style de Thucydide. À cause de toutes ces préparations, et de sa réticence à improviser, les autres orateurs lui reprochent souvent de « sentir la lampe » et de n'avoir aucun don naturel.

Le fait est que pendant la suite de sa carrière, Démosthène accorde toujours beaucoup d'importance à la forme du discours. Plutarque rapporte ainsi :

« Un homme, à ce que l'on raconte, vint le trouver pour lui demander de le défendre et lui expliqua qu'on l'avait battu : « Allons donc, lui dit Démosthène, tu n'as pas été victime de ce que tu me dis. » Alors, l'homme élevant la voix et criant : « Moi, Démosthène, je n'en ai pas été victime ? » — « Par Zeus, reprit-il, maintenant j'entends la voix d'une victime. » Telle était l'importance qu'il accordait au ton et au jeu de ceux qui parlent pour obtenir créance. »
    — Plutarque, Vie de Démosthène, 16

[modifier] Logographe

Démosthène intente une série de procès contre ses anciens tuteurs, avec son premier discours judiciaire, Contre Aphobos, suivi du Contre Onètor. Il gagne ses affaires en -363, mais ne peut recouvrer qu'une partie de son héritage initial.

Démosthène se lance ensuite dans la carrière de son maître Isée. Il la mène avec un certain succès puisqu'il a comme clients certains des plus riches Athéniens, comme Phormion, pour lequel il écrit le Pour Phormion. L'affaire porte sur la somme considérable de 20 talents.

[modifier] Contre Philippe

À 25 ans, il fait de nouveau une apparition publique avec deux discours politiques. Les deux, Contre Leptine et Contre les immunités, sont dirigés contre une proposition de loi interdisant d'excepter aucun citoyen des liturgies, sauf les descendants d'Harmodius et d'Aristogiton — c'étaient les tyrannoctones, les assassins du tyran Hipparque.

À partir de -351, Démosthène s'attaque à un défi d'une toute autre ampleur : il s'efforce de combattre le pouvoir de Philippe II de Macédoine, devenu le simple souverain d'un royaume périphérique, la puissance majeure du monde égéen. Le Macédonien vient d'intervenir en Thrace, menaçant ainsi les clérouquies d'Athènes et ses routes d'approvisionnement en blé. Les Athéniens sont démoralisés et enclins au défaitisme.

C'est alors que Démosthène prononce sa première Philippique. Il commence par montrer à ses concitoyens que la situation n'est mauvaise qu'en raison de leur inactivité, et qu'inversement un sursaut d'énergie peut renverser les choses. En pratique, il propose d'envoyer un corps expéditionnaire en Macédoine même. Démosthène s'oppose donc, par son volontarisme, à la politique défensive prônée par l'orateur Eubule. La majorité du peuple suit ce dernier.

Parallèlement, la cité d'Olynthe, alliée de Philippe, s'inquiète elle aussi de l'accroissement du pouvoir du Macédonien. Elle a commencé à se rapprocher d'Athènes et a même signé une paix séparée pendant l'hiver 351-352. En -349, Philippe exige d'Olynthe qu'elle lui remette deux réfugiés politiques macédoniens. Devant le refus de la cité, il envahit la Chalcidique. Olynthe appelle aussitôt Athènes à l'aide.

Démosthène soutient la requête de la cité dans sa première Olynthienne, où il pointe de nouveau du doigt l'inaction de ses concitoyens. Il propose un plan double : le premier volet consiste à aider Olynthe en lui envoyant un contingent. Le second propose de nouveau de frapper le royaume même du Macédonien. Si les Athéniens concluent bien un traité d'alliance avec Olynthe, ils rechignent à expédier des troupes, effrayés par la perspective d'une guerre avec Philippe. Pour achever d'emporter leur assentiment, Démosthène prononce sa seconde Olynthienne, dans laquelle il entend démontrer la fragilité de la puissance de Philippe : ses alliés se retourneront contre lui, promet-il, au premier échec. Ce second discours n'est suivi d'aucune mesure effective, aussi Démosthène compose-t-il sa troisième Olynthienne, attaquant la loi d'Eubule : cette loi imposait de transférer les excédents du μερισμός / merismós (sorte de budget de la cité) au fonds des spectacles, le θεωρικόν / theôrikón, alors que depuis Thémistocle ils étaient affectés aux dépenses militaires de la cité. Les Athéniens refusent d'abroger cette loi, mais votent l'envoi de secours — si faibles qu'ils n'empêchent pas Olynthe de capituler.

Avant même la chute d'Olynthe, Philippe a proposé la paix à Athènes, sans doute parce qu'il préfère se consacrer à l'expansion vers le sud et l'est. En réponse, l'orateur Philocrate fait voter un décret autorisant le Macédonien à envoyer des hérauts. Démosthène est associé depuis le début aux entreprises de Philocrate. Il ne s'agit pas d'une volte-face : l'orateur entend profiter de ce répit pour renforcer les défenses d'Athènes. Parallèlement, Athènes approche les cités grecques, en leur proposant un sursaut panhellénique anti-macédonien. Cette initiative connaît l'échec, dans une relative indifférence athénienne. En effet, la cité a désormais le regard tourné vers les protagonistes de la Troisième Guerre sacrée. Pour empêcher une intervention macédonienne, les Phocidiens confient la garde du défilé des Thermopyles aux Spartiates et aux Athéniens. La menace directe sur la Grèce centrale et le Péloponnèse semble écartée. De nouveau, Athènes envoie des ambassades pour fédérer les cités grecques, que ce soit pour la guerre ou pour la paix. Un retournement de situation survient alors : un nouveau coup d'État fait revirer les Phocidiens en faveur de Philippe. Les contingents spartiate et athénien se voient interdire l'accès aux Thermopyles. Une ambassade comprenant Démosthène et Eschine est envoyée d'urgence à Philippe, dans l'espoir de conclure une paix. Eschine prétendra que « Démosthène fut si décontenancé devant Philippe qu'il bafouilla un discours inintelligible [1]. » Démosthène doit donc de nouveau consentir une paix temporaire, compte tenu de la faiblesse dans laquelle se trouve Athènes.

Dès -344, cependant, la deuxième et la troisième Philippique exhortent de nouveau les Grecs à réagir :

« Ce qui me frappe, c'est que tous aujourd'hui, — à commencer par vous, — oui, tous lui concèdent ce qui, de tout temps, a fait le sujet de toutes les guerres en Grèce. Quoi donc ? Le droit de mutiler et de détrousser à son gré tous les Grecs l'un après l'autre, celui d'attaquer les villes et de les réduire en esclavage. (...) Et pourtant, tous les actes injustes qui ont pu être commis, soit par les Lacédémoniens pendant ces trente années, soit par nos ancêtres en soixante-dix ans, n'égalent pas, Athéniens, le mal que Philippe, depuis moins de treize ans qu'il a émergé de son obscurité, a infligé aux Grecs ; ou plutôt ils ne sont rien en comparaison. »
    — Démosthène, IIIe Philippique, II, 21

Malgré l'alliance avec Thèbes, Athènes et les cités grecques sont vaincues à Chéronée en -338.

Démosthène continue à plaider en faveur de la résistance au Macédonien, par exemple dans son Oraison funèbre des morts de la guerre. Nommé commissaire chargé de la surveillance des travaux de reconstruction des fortifications, Démosthène y contribue sur sa propre fortune. En -337, Ctésiphon propose que la cité lui décerne une couronne d'or, lors des Dionysiaques, pour ses mérites. Eschine, un autre des orateurs attiques, attaque le projet comme illégal dans son Contre Ctésiphon : Démosthène n'a en effet pas rendu de compte à l'issue de son mandat. Si Eschine a raison d'un point de vue juridique, il s'agit de toute évidence d'attaquer Démosthène sur ses idées politiques.

Démosthène écrit lui-même le discours de son admirateur, c'est le Sur la couronne, probablement son chef-d'œuvre. Eschine, désavoué, doit s'exiler.

[modifier] La fin

En -324, c'est au tour de Démosthène lui-même de prendre le chemin de l'exil, suite à l'« affaire d'Harpale » : il est accusé d'avoir détourné une partie de l'argent placé sous séquestre par le trésorier d'Alexandre, Harpale. Il doit se retirer à Égine, puis à Trézène. Il est rappelé à Athènes par le peuple en -323, suite à la mort d'Alexandre le Grand. Il y prononce de nouveau des discours anti-macédoniens, mais la défaite de Crannon, lors de la guerre lamiaque, le force de nouveau à fuir, cette fois en compagnie de l'orateur Hypéride, pour échapper aux soldats d'Antipater.

En -322, il se réfugie dans le temple de Poséidon situé dans l'île de Calaurie, au large de l'Argolide. Plutarque rapporte qu'il est abordé dans le temple par un dénommé Archias, ancien acteur et affidé d'Antipater. Celui-ci veut attirer Démosthène hors de l'enceinte sacrée en lui promettant la vie sauve. Démosthène refuse, et prétendant écrire une lettre à sa famille, s'empoisonne en mordillant l'extrémité de son calame, comme il avait l'habitude de le faire en réfléchissant.

« Démosthène, sûr désormais que le poison avait bien pénétré et était en train d'opérer, se découvrit et, fixant son regard sur Archias : « Tu peux maintenant, lui dit-il, te hâter de jouer le Créon de la tragédie et faire jeter ce corps sans sépulture. Pour moi, ô cher Poséidon, je sors encore vivant de ton temple, tandis qu'Antipater et les Macédoniens n'ont même pas respecté la pureté de ton temple. » Sur ces mots, il pria qu'on le soutînt, parce que déjà il tremblait et chancelait, et dès qu'il fut sorti et eut dépassé l'autel, il tomba et rendit l'âme dans un gémissement.[réf. nécessaire] »

À sa mort, Démosthène possède 14 talents, somme considérable qui le met en position d'être astreint aux liturgies. Pour l'essentiel, il s'agit d'esclaves, de matières premières et de créances maritimes.

[modifier] L'engagement politique de Démosthène

[modifier] Conceptions politiques

La dénonciation du danger macédonien constitue la clef de l'œuvre politique de Démosthène. Selon lui, la puissance de Philippe est fondée sur deux facteurs, ses richesses tout d'abord (sous forme de réserves d'or), puis sa tactique inédite. Démosthène explique ainsi dans la IIIe Philippique (§ 50) :

« Quand vous apprenez que Philippe se porte ici ou là, selon qu'il lui plaît, ce n'est pas en y menant une phalange d'hoplites ; non ; troupes légères, cavalerie, archers, mercenaires, tel est le genre d'armée qui le suit partout. (…) Inutile d'ajouter qu'il ne fait aucune différence entre l'hiver et l'été et qu'il n'y a pas pour lui de saison réservée, où il suspende ses opérations. »

Démosthène constate qu'en face, les Athéniens se distinguent par leur immobilité, leurs tergiversations et leur pinaillages politico-législatifs. À ce sujet, Démosthène dénonce avec vigueur les travers du système démocratique athénien : tout doit être longuement expliqué, débattu et voté avant qu'une action puisse se mettre en place. Il accuse les « politiques » (πολιτευόμενοι / politeuómenoi) d'asservir le peuple à leurs desseins, au lieu qu'auparavant le peuple lui-même était maître de son destin. De fait, il est difficile de cerner exactement la position de Démosthène vis-à-vis des institutions athéniennes. Parfois, il se rapproche des démocrates modérés, en s'opposant par exemple à la perception par le peuple d'une indemnité pour les spectacles. Parfois, il se place parmi les radicaux en dénonçant l'égoïsme des riches Athéniens qui refusent d'armer des trières et des troupes.

[modifier] Accusations

Une forte tradition a vu en Démosthène un homme guidé par l'appât du gain. De nombreuses anecdotes font part de son amour de l'argent. La Vie des dix orateurs raconte qu'entendant un acteur se vanter d'avoir gagné un talent pour jouer la tragédie, Démosthène réplique qu'il vient d'en gagner cinq fois plus simplement pour se taire[2]. Plutarque note qu'il se compromet d'abord, dans l'affaire d'Harpale, en se laissant offrir par ce dernier une riche coupe perse valant vingt talents [3].

Eschine et Dinarque, pour leur part, accusent tout bonnement Démosthène d'avoir été à la solde des Perses. Plutarque rapporte cette tradition, expliquant que le Grand Roi payait l'orateur « parce qu'il était capable de détourner le Macédonien d'Asie et de le retenir en fomentant des troubles en Grèce » [4].

[modifier] Postérité

L’herma de Démosthène sur la place du marché d'Athènes, œuvre de Polyeucte, v. 280 av. J.-C., Glyptothèque de Munich
L’herma de Démosthène sur la place du marché d'Athènes, œuvre de Polyeucte, v. 280 av. J.-C., Glyptothèque de Munich

De fait, la postérité n'a pas suivi cette tradition. Bien au contraire, les Athéniens lui ont érigé une statue, quarante ans après sa mort. Le décret affirme ainsi que « de tous les hommes politiques de son temps, Démosthène est celui qui a le mieux défendu la liberté et la démocratie. » Les Modernes en ont fait le héros de l'indépendance, et de la résistance face à l'oppression tyrannique. Pendant la Seconde Guerre mondiale, des résistants français ont pu ainsi s'identifier à l'orateur, et donner à Hitler le nom de Philippe.

Les critiques modernes ont plutôt porté sur l'aveuglement de Démosthène face au « sens de l'Histoire » : en défendant l'indépendance des cités grecques, et en particulier d'Athènes, celui-ci n'aurait fait que porter à bout de bras une structure politique périmée. Par ailleurs, une meilleure appréhension de la culture macédonienne a remis en cause la perception de Philippe comme un barbare brutal et sournois.

Mais, si on accrédite la notion de « sens de l'Histoire » (que Démosthène aurait certainement laissé en apanage aux défaitistes), n'est-ce pas là la grandeur de Démosthène ? Toute sa vie durant, il lutta pour sa patrie, pour son indépendance et pour sa liberté, car il avait choisi « la voie droite et juste »[5]. Sa disparition dramatique n'eut pas l'effet voulu par les Macédoniens : Démosthène, jusque dans la mort, fut fidèle à lui-même, et c'est certainement ce qui provoque le plus une admiration sans cesse renouvelée à travers les siècles.

[modifier] L'art de Démosthène

Pour les Grecs, Démosthène est le plus grand de tous les orateurs ; on l'appelle même simplement « l'Orateur », comme on dit « le Poète » pour Homère. Cicéron le considère comme le premier des orateurs grecs, et le pseudo-Longin, dans son Traité du Sublime, en fait un des phares qui éclairent le travail de l'écrivain.

Curieusement, l'art rhétorique de Démosthène est rien moins qu'orthodoxe. Ses discours bouleversent l'ordre traditionnel des parties du discours (exorde, narration, preuve et épilogue). Il joue beaucoup des métaphores, comparaisons et autres paradoxes. Surtout, il compte sur les changements de ton, tantôt familier, tantôt solennel, tantôt jouant sur les sentiments, tantôt calme et posé comme Thucydide, dont il admire la prose. Il n'hésite pas à manipuler son public, l'invectivant ou l'interrogeant tour à tour.

Ulpien raconte une anecdote plaisante sur son plus célèbre discours, Sur la couronne : dans son discours, Démosthène accuse Eschine d'être acheté par Alexandre le Grand :

« Je ne t'appellerais pas hôte de Philippe ni ami d'Alexandre ; je ne suis pas assez fou pour cela ; à moins qu'on ne doive appeler les moissonneurs ou ceux qui font quelque autre chose moyennant salaire, amis et hôtes de ceux qui les paient. Mais je t'appelle salarié de Philippe autrefois, et maintenant d'Alexandre. »
    — Démosthène, Sur la couronne, trad. Georges Mathieu

S'adressant au public, il demande : « Athéniens, Eschine vous semble-t-il être le salarié ou bien l'hôte d'Alexandre ? ». Ce faisant, il prononce volontairement mal le mot μισθωτός / misthôtós, (« laquais, stipendié »), accentuant l'ante-pénultième syllabe au lieu de la dernière. Sur ce, dans la foule, des cris s'élèvent aussitôt pour rectifier l'erreur : « μισθωτός μισθωτός » — et Démosthène de conclure : « Tu entends ce qu'ils disent ».

Aujourd'hui encore, le terme de « philippique » désigne une harangue hargneuse contre quelqu'un, et le nom de Démosthène symbolise l'éloquence. À noter l'hommage posthume que lui rendra, avec trois siècles de distance, un autre grand orateur de l'Antiquité, Cicéron, baptisant « philippiques » ses propres diatribes contre Marc-Antoine.

[modifier] Œuvres

Nous avons de Démosthène une soixantaine de discours, et un ensemble de six lettres adressées au peuple athénien. Cependant, l'authenticité d'une grande partie d'entre eux est discutée, surtout en ce qui concerne les discours civils écrits en tant que logographe.

[modifier] Genre délibératif

Les discours délibératifs (λόγοι συμϐουλεύτικοι / lógoi symbouleútikoi) traitent de questions politiques, et sont donnés devant une assemblée. Cette catégorie comprend :

  • les quatre Philippiques (Κατὰ Φιλίππου / Katà Philíppou) ;
  • les trois Olynthiennes (Ὀλυνθιακός / Olunthiakós) ;
  • divers discours, parmi lesquels les plus importants sont :
    • Sur la paix (Περὶ τῆς εἰρήνης / Perì tễs eirếnês),
    • Sur l'île d'Halonèse (Περὶ τῆς Ἁλονήσου / Perì tễs Halonếsou),
    • Sur les affaires de Chersonèse (Περὶ τῶν ἐν Χερσονήσῳ πραγμάτων / Perì tỗn en Khersonếsôi pragmatỗn),
    • Sur la lettre de Philippe (Ὁ πρὸς τὴν ἐπιστολὴν Φιλίππου / Hò pròs tền epistolền Philíppou).

[modifier] Genre judiciaire

Les discours judiciaires (λόγοι δικάνικοι / lógoi dikánikoi) sont des plaidoiries d'accusation ou de défense. On peut distinguer ceux qui ont rapport avec les affaires de l'État, et les discours civils. Les seconds sont les cinq discours prononcés par Démosthène dans ses procès contre ses tuteurs, ainsi que son travail de logographe, comprenant onze discours. Parmi les premiers, le plus important est le Sur la couronne (Περὶ τοῦ Στεφάνου / Perì toũ Stephánou), qui est également son dernier discours public.

[modifier] Genre épidictique

Les discours épidictiques (λόγοι ἐπιδείκτικοι / lógoi epideíktikoi) ont pour but de faire changer d'avis le public, en influençant ses valeurs et ses croyances. Nous n'avons que deux discours de Démosthène de ce type. Le premier est l'Oraison funèbre pour les morts de Chéronée, le second une apologie de la beauté du jeune Épicrate.

[modifier] Sources

[modifier] Notes et références

  1. Sur l'ambassade, 34-35.
  2. Démosthène, Vie des dix orateurs, 848B.
  3. Plutarque, Vies parallèles [détail des éditions] [lire en ligne], Démosthène, 25, 1-2.
  4. Ibid., 20.
  5. Démosthène, Sur la Couronne, 330 av. J.-C.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

s:Accueil

Voir sur Wikisource : Démosthène.

  • Pierre Carlier, Démosthène, Fayard, Paris, 1990. (ISBN 978-2213630922)
  • Jean Luccioni, Démosthène et le panhellénisme, PUF, Paris, 1961.
  • Georges Mathieu, Démosthène, l'homme et l'œuvre, Boivin, Paris, 1948.
  • Gilberte Ronnet, Étude sur le style de Démosthène dans les discours politiques, Paris, 1951.
  • Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », Paris, 1997 (ISBN 2-13-053916-5).

[modifier] Liens externes

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