Théodore Géricault
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Théodore Géricault est un peintre français né le 26 septembre 1791 à Rouen, mort le 26 janvier 1824 à Paris. Incarnation de l’artiste romantique, sa vie courte et tourmentée a donné naissance à de nombreux mythes.
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[modifier] Biographie
Géricault naît dans une famille aisée de Rouen, originaire de la Manche, à St Cyr du Bailleul où un lieu-dit éponyme "l'hotel Géricault" existe toujours. Son père, Georges, magistrat et riche propriétaire terrien, tiendra par la suite une manufacture de tabac. Sa mère, Louise Caruel, descend d'une famille normande riche. Le peintre ne connaîtra en ce sens pas de problèmes d'argent (sauf à la fin de sa vie, après avoir fait de mauvais placements), et n'aura pas le souci de vendre ses œuvres pour vivre. Cela explique la liberté que l'on trouve dans ses tableaux. Vers 1796, la famille Géricault s'installe à Paris et Théodore fait ses études au Lycée Impérial (aujourd'hui Louis-le-Grand).
Géricault étudie dans les ateliers du peintre Carle Vernet, spécialiste de scènes de chasse. Il y fait la connaissance de son fils, Horace Vernet. Il étudiera ensuite avec Pierre-Narcisse Guérin avant de s’inscrire, le 5 février 1811, à l’École des Beaux-Arts de Paris. En 1814, Géricault s'éprend d'Alexandrine Caruel, la jeune épouse de son oncle maternel, Jean-Baptiste Caruel. Cette liaison, qui durera plusieurs années et produira un fils, Hippolyte Georges, s'avère désastreuse pour l'artiste.
Ayant échoué au concours du grand prix de Rome, Géricault décide, en 1816, de partir pour l’Italie à ses propres frais. Il est durablement impressionné par les peintres de la Renaissance italienne, en particulier Michel-Ange, ainsi que par le maître flamand Pierre Paul Rubens, pour le mouvement qu'il donne à ses œuvres. Parmi ses contemporains, c'est pour le baron Gros qu'il a le plus d'admiration.
Dès le début de sa carrière, Géricault témoigne de qualités qui le distinguent nettement des peintres néoclassiques de l’école de David : il choisit en effet de privilégier les thèmes de la vie quotidienne, qu’il porte au rang de hauts faits héroïques. Chantre du désespoir et de la souffrance humaine, il devient rapidement le chef de file des peintres romantiques.
Sa première œuvre, Officier de chasseurs à cheval de la garde impériale chargeant (1812), est une image de la victoire (on est à l'époque où Napoléon n'a pas encore vécu la défaite). Deux ans plus tard, dans un Salon organisé par Louis XVIII, Géricault expose sa deuxième œuvre à côté de la première: Cuirassier blessé (1814, musée du Louvre). En un contraste frappant avec la première, celle-ci représente un officier sur une pente avec son cheval, s'éloignant de la bataille. Son regard, "tourné vers la tuerie" qu'il vient de quitter, traduit le désarroi, la défaite. Dramatiques et monumentaux, ces deux portraits équestres, déjà empreints du talent grandiose de l'artiste, suscitent un certain intérêt lors du Salon de 1814, dans un Paris occupé par les Alliés.
En 1819, un nouveau Salon s'ouvre au Louvre. Géricault veut réaliser une œuvre immense, spectaculaire. Cherchant son inspiration dans les journaux, il y découvre l'"affaire de la Méduse", catastrophe maritime peu glorieuse que la monarchie restaurée avait tenté d'étouffer. Le fait divers que le peintre expose sur sa toile est celui du naufrage d'une frégate, la Méduse, le 2 juillet 1816, au large des côtes du Sénégal. Ce bâtiment de la marine royale, avec près de 400 membres d'équipage à son bord, avait pour commandant Hughes Duroy de Chaumareys, officier incompétent, révoqué sous l'empire, mais nommé dans ses fonctions lors du retour à la monarchie.
Alerté par son équipage de l'imminence d'un danger, le commandant refuse d'y prêter attention et c'est le drame: le navire coule corps et biens. Les officiers et hauts fonctionnaires ont tôt fait de s'emparer des six canots de sauvetage, abandonnant navire et naufragés au mépris du code d'honneur de la Marine. Les 150 autres membres de l'équipage s'entasseront dans des conditions pitoyables sur un radeau de 20m sur 10m, construit à la hâte au moyen de rondins de bois. Celui-ci devait être tiré par les canots de sauvetage, mais la corde fut "mystérieusement" coupée. Un orage éclate, et ce naufrage se transforme en une odyssée de plus en plus atroce où se succèdent scènes de meurtres, suicide, folie et cannibalisme. Le moment culminant choisi par Géricault dans cette dérive qui durera treize jours, est celui où les naufragés voient au loin le navire qui vient les sauver, le brick Argos. Géricault peint cet instant intensément dramatique, "entre salut et perdition", où les hommes encore valides se lèvent tant bien que mal pour faire signe au navire qui point, à peine visible, à l'horizon.
Le peintre a trouvé son inspiration, il veut émouvoir le public. Soucieux d'ancrer son œuvre dans la réalité, il prend connaissance du récit de deux survivants: Alexandre Corréard, l'ingénieur géographe de la Méduse, et Henri Savigny, le chirurgien du bord. Il fera construire une maquette grandeur nature du bateau dans son atelier et demandera aux sept rescapés du naufrage de venir poser pour lui. Il ira même jusqu'à exposer dans son atelier des restes humains. Grâce à l'entremise d'un ami médecin à l'hôpital de Beaujon, proche de son atelier, Géricault pourra obtenir des bras et pieds amputés, afin de les étudier. De même, il dessinera plusieurs fois une tête décapitée, obtenue à Bicêtre, où se trouvait une institution qui était tout à la fois hospice, prison et asile d'aliénés. Selon Charles Clément, son biographe, une puanteur étouffante règnait parfois dans son atelier de la rue du Faubourg-du-Roule. Géricault travaillera avec acharnement, pendant une année entière, à une œuvre de cinq mètres sur sept qui est, selon l'expression de Michel Schneider, "une leçon d'architecture autant qu'une leçon d'anatomie".
Le Radeau de la Méduse sera présenté au musée du Louvre en 1819. Le peintre s'attend à une apothéose, tant il s'est donné de mal pour parfaire son chef-d'œuvre. Mais lors de l'accrochage, une erreur fait que le tableau sera placé beaucoup trop haut, à côté d'œuvres immenses qui vont complètement l'écraser. Géricault voit le drame se dérouler devant ses yeux. On se moque de cette œuvre qui fustigeait, à travers le commandant de la Méduse, Louis XVIII et tous les royalistes. Éreinté par la critique, Géricault quitte Paris pour l'Angleterre. D’avril 1820 à novembre 1821, il voyage en Angleterre, et découvre à la fois les grands paysagistes anglais, dont Constable et Turner, et les courses de chevaux, ce fut derechef toute une nouvelle série d'oeuvres inspirée par "la plus grande conquête de l'homme" dont, entre autres, le célèbre Derby d’Epsom (musée du Louvre). Le thème du cheval, est un sujet central de son œuvre du début et surtout vers la fin de sa vie. L’animal devient en effet le centre de sa mythologie personnelle, le messager des méditations du peintre sur la passion, la souffrance et la mort. L'histoire équestre de Géricault a été racontée en détail par Bartabas dans son film Mazeppa (1993).
En décembre 1821, le peintre revient à Paris, tombe malade et ne se débarrasse pas de son état que Baudelaire décrira si bien : son spleen (ennui de la vie). Il commencera dès lors à peindre une série de peintures sur le thème de la folie. Il explore cet univers et son ami médecin-chef de la Salpêtrière et pionnier en études psychiatriques, Étienne-Jean Georget, va lui proposer de peindre les portraits de dix malades pour améliorer son état. Chacune représente le désarroi total, comme celui de L'aliéné avec monomanie du commandement militaire qui montre un homme (probablement un "demi-solde", ancien soldat de l'épopée napoléonienne, mis à pied par la monarchie restaurée), obsédé par la gloire perdue, habillé au quotidien comme un militaire, révélant ainsi l'obsession et le désespoir absolu.
Outre ses peintures à l’huile, Géricault réalise également des lithographies, des sculptures, rares mais remarquables, et des centaines de dessins. Il meurt le 26 janvier 1824, affaibli par une tuberculose chronique. Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris. Une statue de bronze ainsi qu'un bas-relief représentant Le Radeau de la Méduse, tous deux signés Antoine Etex, ornent sa sépulture.
[modifier] Peintures
Le monomane (ou Le fou aliéné, ou Le cleptomane) (1822) |
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[modifier] Sculptures
- Cheval écorché
- Cheval arrêté par un homme
- Nymphe et Satyre
- Bœuf terrassé par un tigre
- Nègre brutalisant une femme
- Statue équestre de l'empereur Alexandre
- Lion au repos
- Cavalier Antique
- Ecorché
[modifier] Références
[modifier] Essais
- Aimé-Azam, Denise, La Passion de Géricault, Paris, 1970.
- Aldaheff, Albert, The Raft of the "Medusa". Munich, Berlin, Londres, New York, Prestel, 2002.
- Chenique, Bruno, "Géricault, une vie et Lettres et documents", I:261-308 in Géricault, catalogue d'exposition édité par Régis Michel, 2 vol. Paris, 1991-1992.
- Clay, Jean, Le romantisme. Hachette Réalités, 1980.
- Clément, Charles, Géricault, étde critique et biographique. Paris, 1879.
- Eitner, Lorenz, Géricaul, catalogue d'exposition. Los Angeles County Museum of Art, 1971.
- Rosenthal, Léon, Du Romantisme au Réalisme. Paris, réédition Macula, 1987.
- Schneider, Michel, Un rêve de pierre: Le Radeau de la Méduse. Géricault. Paris, Gallimard, NRF, 1991.
[modifier] Roman
- Louis Aragon, La Semaine Sainte, Gallimard, coll. « blanche », 1958, 835 p.
[modifier] Article connexe
[modifier] Liens externes
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