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Robert O. Paxton - Wikipédia

Robert O. Paxton

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Pour les articles homonymes, voir Paxton.

Robert Owen Paxton, né en 1932, est un historien américain spécialiste de la Seconde Guerre mondiale. Il a notamment signé des recherches importantes sur la France de Vichy.

Sommaire

[modifier] Biographie

Né en 1932 dans une famille bourgeoise de Lexington, Virginie, petite ville où se trouve l'institut militaire de l'État, Robert Owen Paxton a étudié l'histoire à Oxford puis à Harvard. Venu à Paris en 1949 il s'y installe en 1960, il oriente finalement son travail de thèse sur l'étude de l'armée de l'armistice. C'est à ce moment qu'en consultant les archives allemandes, il constate qu'elles divergent de l'Histoire de Vichy publié en 1954 par Robert Aron. Ce dernier avait presque exclusivement travaillé à partir de documents de la Haute Cour de Justice, sans tenir compte de ce que les accusés cherchaient avant tout à se défendre, et les procureurs à démontrer que tel article du code pénal avait été violé, le souci de la vérité historique n'y gagnant guère. En 1966, Paxton publie sa thèse Parades and Politics at Vichy. The French Officer Corps under Maréchal Pétain (Princeton University Press) et devient professeur à l'université de Columbia, à New-York.

En 1972 il publie le livre qui le rendra célèbre Vichy France: Old Guard and New Order traduit en français en 1973 sous le titre La France de Vichy. Les thèses développées dans ce livre sont notamment étayées par les archives allemandes saisies par les autorités américaines. Il met alors en avant au travers de cet ouvrage la participation du gouvernement français à la Shoah. Il reprend également les travaux de l'historien allemand Eberhard Jackel sur la politique hitlérienne à l'égard de la France (La France dans l'Europe de Hitler, Fayard, 1968).

Tout en restant professeur à Columbia, Paxton a écrit ensuite une série d'ouvrage sur la France pendant les périodes de la seconde guerre mondiale et de l'entre-deux-guerres. En 2006, il réside en France. Il est membre du conseil scientifique de l'Institut François-Mitterrand.

[modifier] La « révolution paxtonienne »

La traduction en 1973 de son ouvrage La France de Vichy marque une rupture souvent considérée comme décisive dans l'historiographie de la France sous l'Occupation. Dans sa préface, Stanley Hoffmann soutient que : « Sur deux points capitaux, l'apport de Paxton est révolutionnaire. » : il n'y a pas eu double-jeu de la part de Vichy, et le régime n'a pas joué l'effet de « bouclier » en épargnant certaines souffrances aux Français. Plus tard, les historiens Henry Rousso et Jean-Pierre Azéma opposeront Paxton à Robert Aron dont l'ouvrage l’Histoire de Vichy[1] a connu un succès certain entre sa parution et le fin des années soixante-dix. Selon Rousso[2] et Azéma [3], Aron aurait défendu l'idée que Pétain, le bouclier des Français, aurait su jouer double jeu avec Hitler. Ces historiens mettent notamment l'accent sur la conclusion de Robert Aron : « [...] négociations secrètes, télégrammes clandestins, mesures dilatoires, impossibles à percevoir par l’opinion, ne cessent de réduire la collaboration proclamée [...][1] »

Par rapport aux thèses de l'essayiste Robert Aron, Paxton bouleverse la lecture de l'histoire du régime de Vichy en affirmant que le gouvernement de Vichy a non seulement collaboré en devançant les ordres allemands mais aussi voulu s'associer à l'« ordre nouveau » des nazis avec son projet de Révolution nationale.

Selon Henry Rousso,

« [...] La France de Vichy a proposé tout d'abord une interprétation globale du régime, de son idéologie et de son action concrète, qui a mis en lumière la profonde cohérence du projet vichyste. Celle-ci s'articule autour de l'idée centrale selon laquelle les élites dirigeantes du régime ont eu une assez claire conscience du lien qui existait entre les choix de « politique extérieure » et de politique intérieure, entre la collaboration d'État — un concept mis en avant par Stanley Hoffmann et consacré désormais par l'usage —, qui croyait redonner à la France une part de souveraineté perdue dans la défaite, et la Révolution nationale, une idéologie et une pratique qui visaient à la constitution d'un régime en rupture avec l'héritage républicain. La grande originalité de ce livre est d'expliquer de manière concrète et argumentée en quoi la collaboration d'État constituait une condition nécessaire (mais non suffisante) à la réalisation de la Révolution nationale [...]  »

En s'appuyant sur les archives américaines et allemandes, l'entreprise de Paxton vise à démolir l'idée d'un Vichy jouant double-jeu et qui tentait de sauver tout ce qui pouvait l'être. Au contraire, Pétain et Laval ont toujours recherché la collaboration avec l'Allemagne nazie, et multiplié jusqu'au bout les signes et les gages de leur bonne volonté à s'entendre avec le vainqueur, allant souvent spontanément au-devant des exigences allemandes.

Loin d'avoir protégé les Français, le concours de Vichy a permis aux Allemands de réaliser plus facilement tous leurs projets - pillage économique et alimentaire, déportation des Juifs, exil forcé de la main-d'œuvre en Allemagne. Avec leur peu de troupes, de policiers et de fonctionnaires, jamais les Allemands n'auraient pu gérer un pays développé aussi vaste sans le concours actif du gouvernement, de l'administration et de la police.

Quant au double-jeu de Vichy, toujours selon Paxton, il n'a jamais existé. Les rares contacts officieux et sans suite avec Londres, fin 1940, démesurément gonflés et surinterprétés après la guerre par les partisans de Vichy, ne pèsent rien au regard de la réalité de la Collaboration, indéfectiblement poursuivie jusqu'à l'été 1944 inclus.

Paxton a également remis en lumière le programme de « Révolution nationale » appliqué par Vichy. L'État français n'est pas qu'un accident de l'histoire, une parenthèse ou une pure antenne de l'Occupant. Il puise dans diverses traditions françaises de longue durée et doit beaucoup aux divisions franco-françaises des années 1930. Son programme mêlant projets réactionnaires et modernisateurs ne manque nullement de cohérence, et il est parfaitement autonome. Les Allemands n'ont en rien imposé la fondation de ce nouveau régime, et les statuts des Juifs par exemple furent des initiatives françaises prises sans la moindre pression de l'occupant.

Paxton montre enfin que Révolution nationale et Collaboration sont les deux faces de la même médaille : pour appliquer la première, Vichy a besoin de l'entente avec un Reich victorieux. Il ne perçoit pas la dimension planétaire du conflit, croit la guerre finie avec la défaite de la France, et de toute façon, une victoire alliée ne ferait que ramener les Juifs, les Francs-Maçons, les communistes et les républicains.

Dans les trente années qui ont suivi la parution de La France de Vichy, de nombreux historiens comme Rousso ou Azéma se revendiquent comme héritiers de Paxton[4], en apportant des approfondissements variés et diverses nuances.

[modifier] Critiques adressées à l'œuvre de Paxton

[modifier] L'antisémitisme des Français

Dans Vichy et les Juifs, Marrus et Paxton insistent non seulement sur la collaboration entre Allemands et Français dans la déportation des Juifs, mais aussi sur le soutien qu'a reçu la légistation antisémite de la part de l'ensemble de la population. Le premier à s'inscrire en faux contre cette description de l'opinion publique fut Serge Klarsfeld[5]. Depuis, note Renée Poznanski, la description d'une société impliquée dans son ensemble continue d'être contestée[6].

[modifier] Les troupes d'occupation en France

Dans une conférence donnée à Lyon en octobre 2006, l'historien Pierre Laborie avance que certains historiens, et il cite nommément Paxton, ont été amenés à « minimiser le poids de l'occupation ». Et il met en avant que l'argumentation de Paxton repose parfois sur des erreurs grossières :

« Dans l'édition de 2005 de La France de Vichy , page 12, Paxton écrit que jusqu'en 1943, il n'y a eu que 40 000 soldats allemands (des « vieux ») ; les forces nouvelles seraient arrivées plus tard, et elles auraient été placées sur les côtes. C'est une grossière erreur, gênante en raison du commentaire qui l’accompagne, et malheureusement répétée au cours des éditions, en dépit des démarches effectuées [au moins par Pierre Laborie] pour attirer l’attention de l’éditeur sur la bévue. Les seules troupes de sécurité (maintien de l’ordre) représentaient 100 000 hommes fin 1941, 200 000 en 1943. À leurs côtés, les troupes d’opérations comptaient 400 000 hommes en 1942-43 et ces effectifs seront portés à environ 1 million d’hommes au début de 1944. On peut regretter que le respect légitime à l’égard du grand historien de Vichy conduise à rester silencieux devant un point contestable de son travail et à lui attribuer une sorte de statut de « vache sacrée » qu’il n’a certainement jamais revendiqué[7]. »

[modifier] Bibliographie

[modifier] Ouvrages de Paxton

  • La France de Vichy 1940-1944, Seuil, 1973, préface de Stanley Hoffmann
  • L'Armée de Vichy ; le Corps des officiers français 40-44
  • Le fascisme en action (Anatomy of fascism), 2004
  • Vichy et les juifs
  • Europe in the Twentieth Century
  • De Gaulle and the United States
  • Le Temps des Chemises vertes : révoltes paysannes et fascisme rural 1929-1939, Seuil, 1996
  • L'armée de Vichy, Tallandier, 2003
  • Le 6 juin 1944 avec Jean-Pierre Azéma et Philippe Burrin, Perrin, 2004

[modifier] Ouvrages sur Paxton

  • La France sous Vichy : Autour de Robert O. Paxton, Sarah Fishman, Laura-Lee Downs, Ioannis Sinanoglou et Leonard-V Smith et une vingtaine d'historiens, IHTP/CNRS, 2004
  • Moshik Temkin, 'Avec un certain malaise' : The Paxtonian Trauma in France, 1973-74', Journal of Contemporary History, Vol. 38, n° 2, 291-306 (2003)

[modifier] Notes et sources de l'article

  1. ab Robert Aron, Georgette Elgey, Histoire de Vichy, Fayard, 1954
  2. Henry Rousso, Le syndrome de Vichy, Éd. du Seuil, 1997, 2e éd. 1990, coll. Points-Histoire, p. 83 et 281-282
  3. Jean-Pierre Azéma, « Vichy et la mémoire savante : quarante-cinq ans d'historiographie », dans Vichy et les Français, Fayard, 1990, p. 26-27
  4. Voir par exemple Henry Rousso dans l'hebdomadaire Marianne n° 337, 6 octobre 2003
  5. Serge Klarsfeld, Paris-Auschwitz, Fayard, 2 volumes, 1983-1985.
  6. Renée Poznanski, « Vichy et les Juifs », in Vichy et les Français, dir. J-P. Azéma et F. Bédarida, Fayard, 1992, p. 61-63.
  7. Conférence de Pierre Laborie, Histoire et mémoires de Vichy et de la Résistance Compte-rendu D. Letouzey, approuvé par Pierre Laborie, Lyon, octobre 2006.

Autres sources de l'article

Biographie de Robert O Paxton qui cite Robert Paxton, un Américain tranquille à Vichy, article de Ruth Zylberman, L'Histoire, n° 203, octobre 1996 et Vichy. L'événement, la mémoire, l'histoire, Henry Rousso, Gallimard, 2001.

[modifier] Lien externe

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