Projet Habakkuk
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Le projet Habakkuk (ou Habbakuk) était un projet des Britanniques pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils voulaient construire des porte-avions avec de la glace pour les utiliser contre les U-boot allemands au milieu de l'océan Atlantique, qui était hors de portée des avions basés sur terre.
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[modifier] Histoire
Le Habakkuk, comme proposé à Winston Churchill par Lord Mountbatten et Geoffrey Pyke en décembre 1942, devait mesurer 610 m de long, 100 m de large, avec des flancs de 12 m d'épaisseur, et un creux de 61 m (entre le pont et la quille)[1]. Son tirant d'eau serait de 46 m, et son déplacement de 1 814 300 tonnes. Il serait construit au Canada à partir de 280 000 blocs de glace[2]. À titre de comparaison, un porte-avions Essex de l'époque déplace 31 750 tonnes.
Si l'idée vient d'un scientifique de l'Amirauté, c'est la Montreal Engineering Company Ltd. (aujourd'hui AMEC) qui prend en charge projet, à la demande Churchill, en 1943. L'idée d'origine était de découper d'énormes morceaux de glace de la banquise arctique, les remorquer jusqu'au milieu de l'Atlantique, et les utiliser comme pistes flottantes pour les avions - un mélange d'iceberg et de porte-avions. On réalisa que ce projet n'était pas faisable, et les recherches se tournèrent vers la construction d'un navire plus conventionnel, mais construit en glace. L'idée fut rejetée la même année.
On envisagea alors de prendre comme matériau de construction un mélange de glace et de pâte à papier appelée pykrite[3] en honneur de Pyke, celui qui avait proposé l'idée du projet Habakkuk (le pykrite lui-même fut inventé par d'autres). Le tirant d'eau profond du navire l'empêcherait d'entrer dans la plupart des ports. Le navire serait doté d'un système de réfrigération pour l'empêcher de fondre. Il aurait une mobilité très restreinte, mais sa vitesse maximale était estimée à 10 noeuds (environ 18 km/h), avec 26 moteurs électriques placés dans des nacelles extérieures individuelles ; les mettre à l'intérieur aurait généré trop de chaleur pour un navire en glace. Ses armements auraient inclus 40 tourelles de 4,5 pouces DP à doubles tonneaux et plusieurs canons antiaériens. Il aurait eu une piste d'atterrissage/décollage et une capacité de 150 bombardiers et chasseurs bimoteurs.
Le Habakkuk était conçu comme insubmersible étant donné son matériau de construction ; il aurait été effectivement un iceberg ou une île flottante très résistante aux attaques de par sa taille et sa masse.
Lord Mountbatten apporta un bloc de pykrite à la conférence de Québec de 1943 pour démontrer son potentiel aux amiraux et généraux qui accompagnaient Churchill et Roosevelt. Mountbatten entra dans la salle avec deux blocs, un de glace et un autre de pykrite, et les mit par terre. Il sortit son pistolet et tira sur le premier ; il se brisa. Il tira ensuite sur le bloc de pykrite : la balle rebondit, frôlant la jambe de l'amiral Ernest King et terminant son trajet dans le mur. L'amiral fut très impressionné par cette présentation peu orthodoxe.
Sa construction aurait coûté environ 70 millions de dollars et aurait occupé 8 000 personnes ; c'était trop pour les Britanniques, réticents à dépenser autant pour un navire expérimental. Des expériences sur la glace et le pykrite eurent lieu au lac Louise en Alberta, et un petit prototype fut construit au lac Patricia, dans la même province. Il mesurait 18 x 9 mètres et pesait environ 910 tonnes. Un moteur de 1 CV l'empêchait de fondre[2]. On travailla sur le projet pendant l'année 1943, mais de sérieux doutes étaient déjà soulevés en octobre. On l'abandonna en janvier 1944 quand les avions de longue portée commencèrent à couvrir le milieu de l'Atlantique. Le prototype prit trois étés à fondre complètement. L'usage de glace était abandonné ; il y eut d'autres idées pour des « îles flottantes », comme le « Projet TENTACLE » qui consistait à souder ensemble des Liberty ships et des porte-avions[4]. Le Habakkuk ne fut jamais construit.
[modifier] Le nom et son orthographe
Le nom de code du projet semble avoir été (mal) orthographié Habbakuk par l'Amirauté dans les documents d'époque. Ceci est peut-être à l'origine une erreur de la part de Pyke, le proposant, parce qu'on le voit l'orthographier ainsi dans au moins un des premiers documents dessus. On voit la bonne orthographe dans les documents d'après-guerre écrits par d'autres personnes du projet, dont Perutz et Goodeve.
Le nom lui-même est biblique, faisant référence au but ambitieux du projet[5], étant le nom d'un chapitre de la Bible, Habakkuk.
David Lampe écrit dans son livre Pyke, the Unknown Genius que le nom vient du Candide de Voltaire, mal orthographié par la secrétaire de Pyke. Le nom n'aurait pas été corrigé. Il dit que la référence à la Bible doit venir de l'après-guerre, quand des journalistes informés du projet relièrent le nom au passage de la Bible.
[modifier] Critiques
Le projet Habakkuk fut critiqué notamment par Sir Charles Goodeve, impliqué dans la recherche et le développement chez l'Amirauté pendant la guerre[6]. Dans un article publié après la guerre, il note que le grand nombre de pulpe à papier nécessaire pour la construction du Habakkuk aurait sérieusement miné la production de papier. Il prétend que chaque navire aurait eu besoin d'environ 36 000 tonnes de liège pour l'isolation, des milliers de kilomètres de tubes d'acier pour la circulation d'air, et quatre centrales électriques, et que même avec toutes ces ressources (mieux utilisées sur des navires conventionnels), le Habakkuk ne ferait qu'au mieux six noeuds. Grande partie de son article est réservé à des commentaires très critiques sur les propriétés de la glace comme matériau de construction pour navires.
[modifier] Dans les Arts
Le navire est mentionné dans des livres de fiction du genre histoire alternative, par exemple dans Naval Ops: Warship Gunner[7] et Naval Ops: Commander and Warship Gunner 2[8].
Un projet similaire apparaît dans la série Darkness de Harry Turtledove. C'est une base flottante pour les dragons, l'analogie fantastique pour les avions de notre monde.
[modifier] Annexes
[modifier] Notes et références
(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article en anglais intitulé « Project Habakkuk ».
- ↑ (en) National Archives docket DEFE 2/1087 — Habbakuk scheme: history, institution etc
- ↑ a b (en) Paul Collins ; « The Floating Island » ; Cabinet Magazine Online (7) ; été 2002
- ↑ En anglais, Pykrete.
- ↑ (en) National Archives docket PREM 3/216/4 -- Adm. Noble's reports on Habakkuk/Tentacle
- ↑ "...be utterly amazed, for I am going to do something in your days that you would not believe, even if you were told."
- ↑ (en) Sir Charles Goodeve ; The Ice Ship Fiasco ; London Evening Standard ; 19 avril 1951
- ↑ (en) Profil IGN
- ↑ (en) Profil TotalPlayStation
[modifier] Bibliographie
- (en) Max F. Perutz ; "A Description of the Iceberg Aircraft Carrier and the Bearing of the Mechanical Properties of Frozen Wood Pulp upon Some Problems of Glacier Flow" ; The Journal of Glaciology ; 1 (3) ; pages 95-104 ; 1948
[modifier] Liens externes
- (en) The Habbakuk Project ; Royal Naval Museum
- (en) Bergships and Pykrete : notes sur l'article de Perutz
- (en) Churchill's Unsinkable Carrier : avec quelques photos