Perspectives psychanalytiques et conséquences psychologiques de la circoncision
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La psychanalyse s'est depuis Sigmund Freud intéressée au sens inconscient de la circoncision qui est alors vue comme un avatar agi de la castration. Sur le plan anthropologique, Freud, dans la mythologie qu'il expose dans Totem et Tabou parle d'un reliquat de pratiques tribales anciennes. Le psychanalyste Bruno Bettelheim en parle aussi dans son ouvrage Blessures symboliques en se distanciant des thèses de Freud.
Cette pratique serait le reliquat d'une époque où les chefs de clan régnaient en maîtres absolus qui avaient, entre autres, tous les droits sur toutes les femmes de la tribu. La circoncision, castration symbolique, représentait alors un acte de soumission envers l'autorité du père de la horde[1]. La circoncision est un substitut symbolique de la castration que le père primitif et omnipotent avait jadis infligée à ses fils. Quiconque acceptait ce symbole montrait par là qu'il était prêt à se soumettre à la volonté paternelle (...)[2]. Dans un point de vue différent, Bettelheim pense que lien symbolique entre castration et circoncision n'est pas établi. En effet, il pense que la circoncision aurait été une pratique imposée par les femmes comme une sorte de sacrifice qui leur serait offert. Il mentionne Sephora, la tribu d'Afrique Kikuyu, etc., pour appuyer ses hypothèses.
[modifier] Freud revisité par Jacques Lacan et la circoncision
A la suite des travaux de Jacques Lacan qui développe à sa manière les idées de Freud, on estime que la circoncision est dépendante de la loi symbolique qui dérive du complexe d'Oedipe. Freud a clairement indiqué que : "... l'angoisse de castration est un des moteurs les plus fréquents et les plus forts du refoulement et par là même, de la formation des névroses. Des analyses de cas où ce ne fut pas la castration mais bien la circoncision qui fut pratiquée chez des garçons comme thérapie ou comme punition de l'onanisme (ce qui ne fut pas rare dans la société anglo-américaine) ont donné la dernière certitude à notre conviction." (Nouvelles conférences d'introduction à la psychanalyse. 1933. XIX. Paris : PUF ; 1995. O.C., XIX : 170.)
Il s'agit pour ceux qui sont pris dans une névrose collective de faire un acte bien réel, la circoncision, en se rattachant à une parole imaginaire (parole "imaginaire" d'un Dieu/pére) et sur la manière dont "on doit faire".
Freud : "… ce qui est particulièrement remarquable, c'est la présentation (dans le rêve) de l'onanisme, ou plutôt de sa punition, la castration, par la chute d'une dent et l'arrachage d'une dent, parce qu'on trouve un pendant en ethnologie, ce que ne savent sans doute que très peu de rêveurs. Il ne me semble pas douteux que la circoncision pratiquée chez tant de peuples, est un équivalent de la castration et vient en prendre le relais. On nous rapporte d'ailleurs qu'en Australie, certaines tribus primitives procèdent à la circoncision comme rite de puberté (pour la fête marquant l'entrée de la jeunesse dans l'âge d'homme), tandis que d'autres tribus, habitant tout près des premières, ont remplacé cet acte par l'extraction d'une dent." (Leçons d'introduction à la psychanalyse, 1916-17, Paris : PUF ; 2000. O.C., XIV, 170).
- Le Caractère fermé du discours associé à la circoncision :
Le problème de la névrose obsessionnelle est qu'elle ne donne pas un sens au réel, ni ne le prend en compte que dans un seul cadre : la névrose obsessionnelle. C'est ce qui donne, par exemple, ce côté fermé aux discussions par d'autres entrées, avec un religieux ou un obsessionnel, qui ne pourra entendre (que parce que c'est respectable du point de vue de Dieu, de la loi de Dieu) que les arguments validant son obsession ou un point de celle ci.
La névrose obsessionnelle de l'homme au rat a paru particulièrement difficile à guérir par la parole. La névrose obsessionnelle est - il faut quand même le dire - une névrose de transfert. Le psychanalyste travaille entre autres sur l’analité. Dont l'expression familière "être coincé du c.." rend parfaitement compte en ce qu'elle a de représentation d'une personne coincée, distante, à l'aspect froid, coupée du monde et d'elle-même (à sa propre sensibilité), n'écoutant qu'elle-même.
- L'entrée dans le trauma :
Le fait d'enlever la peau du sexe d'un enfant mâle n'a pas d'autre sens que ce que c'est "enlever la peau du sexe d'un enfant mâle" mais devient pour l'obsessionnel le lien a Dieu, au père universel.
La douleur et la souffrance liés à cet acte, puis l'entrée dans la névrose collective de l'enfant au travers d'un enseignement le rattacheront au groupe. La douleur et l'instruction religieuse devant normalement permettre par son dépassement à aller "vers le père et rejoindre la communautés des croyants".
Quand cela marche. force est de constater que certains s'éloignent ou se plaignent. Qui n'est dans une perspective psychanalytique qu'un père imaginaire, un acte réel douloureux, est une entrée dans le trauma qu'il partage avec le reste du groupe pris dans une névrose obsessionnelle collective.
- Le trauma
Dans L'Homme Moïse (1939) S. Freud souligne que les expériences traumatiques originairement constitutives de l'organisation et du fonctionnement psychique « Nous appelons traumatismes les impressions éprouvées dans la petite enfance, puis oubliées, ces impressions auxquelles nous attribuons une grande importance dans l'étiologie des névroses » peuvent entraîner des atteintes précoces du Moi et créer des blessures d'ordre narcissique.
Le docteur Frédérick Leboyer insiste sur "la gravité du traumatisme lorsque la mutilation est pratiquée avant l'âge de la parole ". "Mais il n'y a pas, chez le nouveau-né, une telle conscience". La torture est subie dans "un état d'impuissance totale qui la rend encore plus effrayante et insupportable" (lettre du 4 juin 1980 à Rosemary Romberg-Weiner, sexuallymutilatedchild.org/leboyer.htm).
Moisés Tractenberg confirme le diagnostic de Freud dans la citation suivante : "Une autre conséquence psychologique de la circoncision est qu'elle imprime dans l'esprit du nouveau-né une situation agressive et traumatique ... L'impossibilité de gérer une aussi terrifiante irruption d'agression dirigée vers l'intérieur peut conduire, a posteriori, à l'émergence de comportements psychopathes et violents ou, dans de nombreux cas, à l'émergence d'un masochisme extrême." (Psychoanalysis of circumcision. New York : Denniston & al. Kluwer academic/Plenum publishers ; 1999. 213.)
- Entrée dans la névrose :
L'individu ainsi pris ne peut plus — sauf à rejeter l'ensemble, à s'opposer, ou a être rejeté et être opposé — qu'accepter cet état de fait. L'individu peut prendre alors une "position de fierté" : « je fais partie du groupe » sans que le "sentiment réel de fierté" ne soit là. Puisqu'il s'agit d'une névrose obsessionnelle, il n'est pas question de sentiment réel mais de position intellectuelle. " L’obsessionnel n’est pas psychotique, il est aliéné à l’Autre, et il est pris dans le discours de l’Autre sur le mode même d’y figurer comme 'moins' " - Freud. En ce sens, la circoncision n'est que la formation d'une névrose de groupe de plus, une pratique "délirante et aliénante", entendu ici au sens clinique de la psychanalyse.
Georg Groddeck ira plus loin. Il voit fort justement dans la circoncision l'expression d'une négation — qu'il dénomme refoulement — de la bisexualité humaine et donc l'expression d'un masculinisme outrancier : "L'étrange pensée que le féminin n'appartiendrait pas en propre à l'homme, et le masculin à la femme, s'insinue dans les raisonnements et donne à croire qu'il s'agit là de quelque chose d'inconvenant, qui pourrait et devrait être surmonté. La réalité effective - l'actualité -, à savoir qu'il n'y a absolument pas d'homme séparé de la femme, que l'être humain est homme-femme et femme-homme, est refoulée. L'histoire universelle offre un exemple formidable d'un tel refoulement dans la circoncision juive … car le prépuce est féminin, il est le vagin dans lequel est fourré le gland masculin." (Bisexualité et différence des sexes. 1931. Nouvelle revue de psychanalyse, 1973, 7, 194.).
- Pourquoi tant de débats sur la circoncision ?
Alice Miller : "Les pratiques rituelles de circoncision et d'excision ont des effets qui atteignent non seulement l'individu et sa descendance mais même les autres hommes." (La connaissance interdite : affronter les blessures de l'enfance par la thérapie. Paris : Aubier ; 1990.), elles sèment aussi la folie dans l'esprit des voisins des peuples les pratiquant.
La psychanalyste Julia Kristeva souligne l'irréparable du handicap au yeux des non handicapés : "... (il) confronte chacun de ceux qui ne sont pas atteints par ces incapacités à l'angoisse de castration, à l'horreur de la blessure narcissique, et, au delà, à l'irrémédiable de la mort psychique ou physique : creusant ainsi la plus intraitable des exclusions." (Aux frontières du vivant. Le magazine littéraire, février 2004 (428) ; 33-36.).
- Notes et discussion :
1. La position de certaines psychanalystes féministes sur la question allant dans le sens Georg Groddeck :
- Elles dénoncent d'une part - l'exaltation du masculinisme et la fermeture à leur sensibilité chez certains hommes. On nomme cette part sensible ou féminine de l'homme l'anima. La fermeture à l'anima, est participante par "retour du refoulé" à la domination masculine dans les cultures machistes. En particulier lorsqu'il y a la non-reconnaissance de la douleur qui leur est infligée (quand certains hommes disent "j'ai même pas mal"), ce qui est une douleur supplémentaire que l'homme s'impose.
* Elles dénoncent d'autre part - l'aliénation de la femme par fermeture à leur masculinité chez certaines femmes fermées a leur animus. On nomme la part masculine de la femme l'animus. Il y a la non-reconnaissance de la douleur qui leur est infligée par des "opinions tranchées non étayées" ( cf animus) qui sont elle mais avec lesquelles elle n'ont pas vraiment discutée avec elle même. En particuliers, lorsqu'il y a la flatterie de l'égo à la douleur infligé aux hommes pour le bon plaisir de la femme. Quand certaines femmes disent "mais si ça nous donne plus de plaisir". Ce qui est une aliénation ( une souffrance aussi) de la femme à la culture phallocratique dominante elle adhère a un opinion car elles croient alors que c'est vraiment un désir de femme libre et adulte de penser ainsi alors qu'en jouissant à la souffrance de l'autre elle se déséquilibre, s'aliène et souffre aussi. à mon avis, incompréhensible et hors sujet --PBo (d) 7 juin 2008 à 13:46 (CEST)
2. Les travaux sur le rapport entre "sadique" et "analité" et les liens que cela pourrait avoir entre nazisme et judaïsme (Tobie Nathan affirme que l'initiation par le sadisme est une initiation au sadisme : "Himmler ignorait qu'il nourrissait des 'pulsions sadiques', c'est l'initiation qu'il a reçue au sein du corps des SS qui le lui a révélé." L'art de renaître, fonction thérapeutique de l'affiliation au moyen du traumatisme sexuel. Nouvelle revue d'ethnopsychiatrie. 1992, (18) , 20).
3. A lire aussi :
- les travaux de Ferenczi Sandor sur le trauma, Freud sur la névrose obsessionnelle, Freud/Ferenczi ;
- Nathalie Zajde (maître de conférences de Psychologie clinique et pathologique à l'Université de Paris 8) "La névrose ou la poule" ;
- les notes ethnopsychanalytique sur le "petit homme-coq" (Ferenczi) , les poulets de Kappara et la circoncision, et un texte sur le sujet paru dans la Nouvelle Revue d'Ethnopsychiatrie, N¡ 31, 1996, 35-52.