Merce Cunningham
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Merce Cunningham (de son vrai nom Mercier Philip Cunningham) est un danseur et chorégraphe américain né le 16 avril 1919 à Centralia dans l'État de Washington aux États-Unis, dont l’œuvre a contribué au renouvellement de la pensée de la danse dans le monde. Il est considéré comme le chorégraphe qui a réalisé la transition conceptuelle entre danse moderne et danse contemporaine[réf. nécessaire].
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[modifier] Biographie
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Présenter le travail chorégraphique de Merce Cunnigham a ceci de particulier qu’il nous engage à parler d’un mode de pensée, d’une vision du monde plus que de l’histoire personnelle d’un individu.
Merce Cunningham fait partie de tout un courant artistique - de l'art moderne - qui a affecté le monde des arts plastiques, de la musique et dans une moindre mesure celui de la danse.
Merce Cunningham était danseur chez Martha Graham lorsqu’il a entamé son parcours chorégraphique. Martha Graham était une des grandes figures de ce qui s’appelait alors la « modern dance ». Le concept à l’œuvre dans la modern dance était celui du retour à l’origine, le retour aux sources avant la civilisation et ses méfaits. Martha Graham pensait avec la danse pouvoir rétablir le contact avec des énergies anciennes, naturelles et mythiques qui dorment en nous sous la surface de la culture, d’où son exploitation artistique des mythes anciens par exemple. La danse de Martha Graham exaltait de grands sentiments, des valeurs morales. C’était un univers très émotionnel où l’on allait chercher au fond de soi pour exprimer ce qui y serait enfoui. C’était d’ailleurs l’époque qui était axée sur cette idée de l’expression (voir par exemple Jackson Pollock pour la peinture).
C’est donc dans ce contexte que Cunningham, poussé par le compositeur John Cage, va composer ses premières pièces. Il quitte la compagnie de Graham en 1945 et crée ses premiers solos.
En 1951, sa pièce 16 danses pour soliste et compagnie de trois va marquer le premier pas dans un autre direction que celle du retour au moi profond. C’est que Cunningham utilise le hasard pour composer cette danse : il jette des pièces pour déterminer l’ordre des sections de la danse. L’utilisation du hasard lui permet de prendre des décisions esthétiques de manière objective et impersonnelle. On peut dire que ce moyen d’arriver à la création, non par intuition, instinct ou goût personnel, a été une sorte de point de non-retour dans la conception chorégraphique de Cunningham.
Cette idée d’utiliser les procédés de hasard pour composer a été d’abord mise en œuvre par le compositeur John Cage, compagnon de route de Cunningham jusqu’à son décès en 1992. Le cercle d’artistes gravitant autour de Cage et Cunnignham se composait entre autres de plasticiens comme Robert Rauschenberg et Jasper Johns, de compositeurs comme Earle Brown, Morton Feldman, David Tudor, pour ne citer qu’eux. Tous ces artistes étaient des gens profondément ancrés dans leur temps. On pourrait dire que ce sont des artistes « urbains » qui ne tournent pas le dos aux impressions sonores et visuelles émanant de la vie citadine, ni aux innovations technologiques de leur temps.
Ainsi, comme dans la vie, dans les chorégraphies de Cunningham coexistent la danse, la musique, l’œuvre plastique, qui, travaillées chacune de leur côté, sont superposées le jour du spectacle en une rencontre artistique ouverte. Cunningham ne veut qu'aucune forme ne prédomine sur l'autre en scène, mais qu'elles forment un tout[1].
Pourquoi cette utilisation du hasard dans ces œuvres ? C’est un moyen de se surprendre soi-même, d’aller au-delà de son propre ego, de sortir de ses habitudes.
Le but de la danse de Cunningham est de donner à voir le mouvement et son organisation dans l’espace et dans le temps. Il n’y a pas de sens caché dans les chorégraphies de Cunningham et c’est à chacun de trouver son chemin dans son œuvre. Le spectateur est appelé à être actif, puisqu’il n’y a pas de sens qui lui soit donné, il est libre de voir ou d’entendre ce qu’il veut, selon son propre désir. On pourrait dire que la danse de Cunningham serait une danse de l’intelligence par opposition à la danse de l’émotion de la modern dance. C’est une danse pudique qui tient l’émotion à distance. Libre à chacun d’éprouver du plaisir à ces jeux de collage que sont les chorégraphies de Cunningham et de son équipe.
En dehors du hasard, c’est le traitement du temps qui est spécifique chez Cunningham. Ce n’est plus le temps de la musique que l’on suit, mesure à mesure, mais c’est le temps du chronomètre. Les séquences de danse ont telle ou telle durée. Chaque cellule a sa propre musicalité dans ses rapports des mouvements entre eux et avec ceux des autres. La musicalité est interne au mouvement et à celui qui le danse, elle n’est pas imposée de l’extérieur.
Le rapport à l’espace est très spécifique également. Ce n’est plus celui de la perspective. Chaque danseur est son propre centre. L’espace se fait et se défait, se tisse sous les yeux des spectateurs, libre à eux de choisir ce qui les intéresse plutôt que de fixer le danseur étoile au centre de la scène.
Du point de vue de la technique du mouvement, Cunningham utilise les mouvements des jambes qui sont proches du classique dans leur forme, mais l’intention et l’énergie qui les animent se situent dans un autre registre, d’autant que s’y ajoutent des mouvements de dos choisis de manière aléatoire et qui l’utilisent dans toutes ses directions possibles : en avant, en arrière, sur les côtés, sur les diagonales avant et arrière...
Ainsi, danser chez Merce Cunningham demande une grande disponibilité mentale, une maîtrise de son corps non rigide, il faut avoir l’esprit toujours vigilant pour danser cette danse. C’est d’ailleurs en cela qu’il serait difficile de dire que la danse de Cunningham est abstraite, car c’est bien le corps qui est utilisé très loin dans ses possibilités, y compris dans ses rapports à l’intelligence.
Cunningham a été l’un des premiers chorégraphes à s’approprier l’usage de la caméra pour filmer la danse, non comme un témoin de travail, mais comme un objet visuel en soi. Il a également contribué à la finalisation d’un logiciel d’écriture du mouvement, « Life forms », qui permet de composer la danse par ordinateur, ce qu’il ne se prive pas de faire depuis que l’âge ne lui permet plus de danser. Ainsi, en 2005 il crée toujours des chorégraphies par le biais de l’informatique, prouvant ainsi qu’il a toujours su s’adapter à son temps et aux circonstances.
[modifier] Théorie
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C'est avec Merce Cunningham que commencent à se poser les problèmes de la danse moderne. Il n'y a plus de fil conducteur, plus forcément d'histoire. Vite rejoint par John Cage, il va creuser le mouvement et bouleverser les codes de la scène : tous les points de l'espace ont la même valeur, pourquoi ce rapport binaire entre la danse et la musique, chaque danseur est un soliste, il n'y a plus un chœur et un seul soliste... Il est à la charnière entre la danse moderne et la danse postmoderne et n'entre dans aucune des deux catégories. Son travail sera utilisé dans la danse postmoderne pour le mettre en branle ou pour le continuer, avec l'idée que tout mouvement a une valeur égale. Merce Cunningham essaye de se défaire des coordinations du corps et tire au hasard des éléments du corps et des directions. Il expérimente alors des mouvements inconnus. On est en 1948 avec Untitled Solo. C'est une danse assez verticale qui décompose le mouvement sur l'axe fort de la colonne. C'est plus de l'ordre de la figure que de l'énergie circulante dans le corps. L'intérêt créatif réside dans le chemin qui mène d'une figure à l'autre. Ce travail sur l'aléatoire le conduit à faire appel à des informaticiens et à créer Lifeform, un logiciel qui crée et modélise sous la forme d'un petit personnage virtuel, des mouvements aléatoires, dans un ordre aléatoire. Le problème de la chute suivie du saut résume bien la difficulté de la mise en œuvre, et même ces erreurs sont acceptées. De la même façon, il fait travailler séparément son équipe sur la musique, sur les costumes et l'éventuel décor lumineux, et réunit l'ensemble le jour de la réprésentation. Ainsi il casse l'association danse-musique et travaille sur les durées. Avec Biped en 1999, il met en scène pour la première fois le logiciel Lifeform.
[modifier] Chorégraphies
- 2006 : EyeSpace
- 2005 : Views on Stage
- 2003 : Split Sides
- 2000 : Interscape avec des décors et des costumes de Robert Rauschenberg
- 1999 : Biped
- 1998 : "Hand Drawn Spaces"
- 1998 : Pond Way
- 1997 : Scenario avec les costumes de Rei Kawakubo.
- 1993 : CRWDSPCR
- 1991 : Beach Birds
- 1988 : Changing Steps et Five Stone Wind
- 1983 : Roaratorio sur une musique de John Cage
- 1973 : Un jour ou deux
- 1970 : Objects
- 1968 : Walkaround Time
- 1960 : Crises
- 1956 : Changelings
- 1951 : 16 Danses pour soliste et compagnie de trois
- 1948 : Untitled Solo
[modifier] Bibliographie
- Raphaël de Gubernatis, Cunningham, Editions Bernard Coutaz, Arles, 1990
- Merce Cunningham, le danseur et la danse. Entretiens avec Jacqueline Lesschaeve, Belfond
- David Vaughn, Merce Cunningham Fifty years, Aperture (il existe une traduction française par Denise Luccioni qui est difficile à trouver)
- Roger Copeland, The modernising of modern dance, Routledge
- John Cage, Silence, Denoël
- Pour les oiseaux, entretiens de John Cage avec Daniel Charles, Belfond
[modifier] Références et notes
- ↑ Cunningham, la preuve par trois, par Rosita Boisseau dans Le Monde du 6 décembre 2007