Israël Meir Kagan
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Israël Meir HaCohen , ou Israël Meir Kagan (kagan étant l'équivalent de Cohen dans les langues slaves). est bien plus connu (conformément à un usage courant dans la littérature rabbinique) sous le nom Hafetz Haïm (littéralement désir de vie), de son ouvrage le plus célèbre, Sefer Hafetz Haïm qui traite des lois de la médisance (d'après Psaumes 34:13). On raconte qu'un visiteur se rendit un jour compte que l'illustre rabbin était extrêmement malentendant, et lui proposa des options thérapeutiques. Le rabbin s'en émut, et fit remarquer que, dans l'état actuel de la question, il n'entendait pas les ragots ni les commérages, et autres futilités, et que, par contre, ceux qui tenaient à lui dire quelque chose s'adressaient directement à ses oreilles.
Méïr Kagan est considéré dans le monde juif orthodoxe et au-delà, comme un grand sage et l’un des plus grands rabbins du XIXe et du XXe siècles. Sa popularité reste considérable au sein du monde juif. D'une part, en raison de son œuvre qui comporte nombre d'ouvrages d'éthique (moussar) et d'une certaine façon de vulgarisation de la Torah (il a écrit de nombreux livres pour le grand public) ainsi qu'un ouvrage incontournable d'actualisation, analyse et recensement de la loi juive à destination des rabbins. D'autre part, il était considéré, au début du 20ème siècle comme un "grand de la Torah" sinon LE grand de la génération et en tout cas le leader du judaïsme lituanien (plus exactement le monde des yeshivot lituaniennes). Il existe toute une culture orale d'"histoires" liées à la vie du Hafetz Haïm et qui contribuent à le considérer comme une personnalité exceptionnelle.
En Israël, un kibboutz porte son nom.
[modifier] Biographie
Il naît à Zhetel (ou Gitel), en Biélorussie, le 6 février 1838, dans une famille modeste mais érudite, puisqu'elle pourvoit elle-même à son éducation jusqu'à l'âge de dix ans. Il part ensuite approfondir ses connaissances à l'académie de Vilna jusqu'à l'age de 17 ans.
En 1855/56, il s’installe à Radoune (Biélorussie) ou Radin en Hébreu et Yiddish, non loin de Vilnius et de Grodno. Il se marie à cette époque. En 1862/63, il s’installe à Minsk, puis Vilnius où il gagne sa vie comme professeur de matières religieuses. En 1868/9 il prend la tête de l’université talmudique de Vachilitchoq, près de Vilnius. Il revient ensuite à Radoune où il vit plusieurs dizaines d’années. Il partage désormais son temps entre la tenue de la comptabilité du magasin de sa femme, l’enseignement, la rédaction d’ouvrages ainsi que diverses responsabilités publiques et communautaires. Il refuse d’être ordonné rabbin et de percevoir le moindre salaire pour ses activités, en particulier lorsqu’il donne son avis ou des conseils à ceux qui viennent le consulter. Dès cette époque, sa réputation au sein du monde juif de l’Est grandit ; des histoires relatant sa sagesse et sa mansuétude se répandent dans le peuple. Elles croîtront jusqu’après sa mort, un peu à la manière des récits hassidiques sur un « Tzaddik ». C’est surtout son humilité et son humanisme, en particulier vis-à-vis des simples juifs des Shtetels , couplée à l’ampleur et la profondeur de son œuvre qui lui valent une place parmi les plus grands rabbins dans l’histoire du peuple juif.
Il fonde une petite université talmudique à Radoune et la dirige durant de nombreuses années jusqu’à ce que son expansion et son succès l’oblige à engager un directeur (Rosh Yeshivah). Il y enseigne l’éthique et le travail sur soi (moussar). En 1915, il est obligé de quitter Radoune en raison de la guerre, et s’installe, avec une partie de sa yeshivah, en Russie proche, à Yirout. En 1917, il fonde une association juive ultra-orthodoxe « Unité », visant à fédérer l’ensemble du monde juif religieux de Russie. En 1921, il est à Minsk puis à Radoune qui fait désormais partie de la Pologne.
Il est l’un des fondateurs d’une organisation encore en activité en Israël et dans le monde : Agoudat Israël, mouvement orthodoxe juif visant à s’opposer au sécularisme, au socialisme montant en Europe de l’Est et son corollaire : le sionisme laïque. Il ouvre le premier congrès de l’association par un discours à Vienne en 1923. En 1925, il prend la direction du « conseil des yeshivot », organe de direction des yeshivot polonaises, alors nombreuses. Il s’éteint en 1933 à Radoune où il est enterré, peu de temps avant l'ascension de Hitler. On raconte à ce sujet qu'il avait souvent coutume de s'exclamer brutalement que « des millions allaient mourir, et qu'on ne faisait rien », signe qu'il ressentait la montée de l'antisémitisme ambiant avant même qu'on ne parle de la Solution finale.
[modifier] Œuvres
Son œuvre écrite est abondante. Son premier livre, “Hafetz Haïm" (Le désir de vie) est publié anonymement en 1873 à Vilnius. Il est le premier ouvrage de lois entièrement consacré à la question de la médisance et son importance en tant qu'interdit majeur du judaïsme. Cet ouvrage aura un immense succès et fera l’objet d’éditions populaires simplifiées et abrégées jusqu’à nos jours.
Il publie un complément « Shemirat HaLashone » (La préservation de la langue), traitant plus généralement du langage vertueux et des moyens d’y parvenir.
« Ahavat Hesed » (L’amour de la générosité) traite de l’importance de la charité et des actes de bonté.
Il est également connu pour la rédaction de « Mahaneh Israël » (les camps d’Israël) à destination des juifs enrôlés dans les armées du tsar, « Nidehé Israël » (les errants d’Israël) pour ceux qui décidèrent nombreux à émigrer vers l’ouest.
Enfin, le Michna Beroura - rédigé entre 1894 et 1907 - commente de façon très fouillée une partie (celle traitant des lois de la vie quotidienne) du plus important code législatif faisant encore autorité dans le monde orthodoxe : Choulhan Aroukh (la table dressée), lui-même rédigé au XVIe siècle par Rabbi Joseph Caro. Ce commentaire demeure aujourd’hui, une des bases de l’étude de la loi juive, dans le cursus rabbinique : c'est un livre de référence de la halakha.
Encourageant ses disciples à étudier les lois relatives au temple, en raison de sa conviction que le messie peut arriver à tout moment et le reconstruire, il rédigea un ouvrage les recensant « Liqouté Hilkhot » (les perles des lois). Une histoire, invérifiable tant la légende se mêle au témoignage quand il s’agit de la vie des maîtres spirituels juifs, relate qu’il conservait toujours une valise faite par devers lui, pour cette même raison.