Étienne-Denis Pasquier
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Étienne-Denis, baron (1808) puis duc (1844) Pasquier[1], dit le chancelier Pasquier, est un homme politique français né à Paris le 21 avril 1767 et mort dans la même ville le 5 juillet 1862.
Préfet de police sous l'Empire, il fut plusieurs fois ministre (Justice, Affaires étrangères) sous la Restauration, chancelier de France et président de la Chambre des pairs sous la monarchie de Juillet.
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[modifier] Biographie
Issu d'une ancienne famille de robe anoblie en 1671, descendant d'Étienne Pasquier (1529-1615), jurisconsulte et érudit, auteur des Recherches sur la France, Étienne-Denis Pasquier était le fils d'Étienne Pasquier, conseiller au Parlement de Paris, condamné à mort par le tribunal révolutionnaire et exécuté le 1er floréal an II (20 avril 1794), et d'Anne Thérèse Nicole Gauthier. Lui-même, après des études au collège de Juilly, avait été nommé, avec dispense d'âge, conseiller au Parlement de Paris en 1787. Sous la Terreur, il épousa Mlle de Saint-Roman, veuve du comte de Rochefort, fut arrêté et incarcéré pendant deux mois à Saint-Lazare ; il ne recouvra la liberté qu'après le 9 thermidor.
[modifier] Sous l'Empire
Après avoir été éloigné pendant quelques années des affaires publiques, il se rallia à l'Empire et, grâce à la protection de Cambacérès, il fut nommé maître des requêtes au Conseil d'État (11 juin 1806), baron de l'Empire (29 novembre 1808), conseiller d'État (8 février 1810) et procureur du sceau des titres.
Le 14 octobre 1810, peu après avoir été promu officier de la Légion d'honneur, il devint préfet de police en remplacement de Louis Nicolas Dubois. En 1812, il ne sut pas empêcher le complot des généraux Malet et Lahorie, mais fut berné par les conjurés, arrêté et conduit à la prison de la Force, dont il ne sortit que grâce à l'intervention du général Hulin. Malgré cet incident, il fut maintenu en fonctions et servit Napoléon Ier avec zèle, sinon avec efficacité.
[modifier] Sous les deux Restaurations
En 1814, il entra en pourparlers avec le comte de Nesselrode au moment de l'entrée des Alliés dans Paris, pour présenter à l'empereur de Russie la soumission de la capitale. Il prit les mesures d'ordre qu'appelait la situation, se résolut à « user de tous les moyens qui étaient en son pouvoir pour faciliter la restauration des Bourbons », et tenta de rallier le Conseil d'État à cette entreprise, mais n'adhéra au gouvernement provisoire que le 14 avril. Il démissionna de la préfecture de police le 13 mai et fut nommé directeur général des Ponts et Chaussées (21 mai 1814).
L'Empereur le laissa sans emploi durant les Cent-Jours quoiqu'il eût prêté serment à l'Acte additionnel. La Seconde Restauration le dédommagea en le nommant garde des Sceaux et ministre de l'Intérieur par intérim dans le cabinet Fouché-Talleyrand (7 juillet 1815). Dans ces importantes fonctions, il sut montrer de l'habileté et du courage pour résister aux réclamations de Blücher et de Müffling. Il prit des mesures pour éviter que la dissolution de l'armée de la Loire occasionnât des troubles. Il blâma, dit-on, les excès de la réaction royaliste – la Terreur blanche, l'assassinat de Brune, les exécutions de Labédoyère et de Ney – et s'efforça de faire prévaloir des idées modérées. Il prépara l’ordonnance du 23 août 1815 qui, rapportant celle de 1814, réorganisa le Conseil d'État en le rapprochant beaucoup plus du Conseil d'État napoléonien que de l’ancien Conseil du Roi que la Première Restauration avait cherché à ressusciter. Il quitta le pouvoir avec Talleyrand le 25 septembre 1815.
Élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur (28 septembre 1815), il fut nommé ministre d'État et membre du Conseil privé. Le 22 août 1815, il avait été élu député du grand collège de la Sarthe[2] et du grand collège de la Seine[3]. Il opta pour la Seine et fut réélu le 4 octobre 1816[4] et le 20 septembre 1817[5]. Après avoir dirigé, en 1816, les travaux de la commission des créances étrangères, il fut appelé, la même année, à la présidence de la Chambre des députés, qu'il conserva jusqu'à son entrée dans le ministère Richelieu en qualité de garde des sceaux, ministre de la Justice (19 janvier 1817). Il approuva la loi Laîné relative aux élections, la loi Gouvion-Saint-Cyr sur le recrutement de l'armée et la suppression des cours prévôtales. Cependant, à la suite de la nouvelle loi électorale et des élections de 1818, il se retira avec le cabinet le 18 septembre 1818.
Pasquier refusa de reprendre un portefeuille dans le ministère Dessolles-Decazes et réclama la révision de la loi électorale du 5 février 1817. Cette question divisa le ministère : Decazes appuya Pasquier, mais les autres ministres, Dessolles, Gouvion-Saint-Cyr et Louis donnèrent leur démission. Pasquier hérita alors du portefeuille des Affaires étrangères (19 novembre 1819) dans le cabinet remanié. Il resta ministre après l'assassinat du duc de Berry dans le nouveau ministère Richelieu. Il se signala par l'habileté avec laquelle il défendit les mesures qui suspendaient la liberté individuelle et la liberté de la presse et réduisaient le pouvoir de suffrage : « Oui, je demande l'arbitraire, dit-il, parce que quand on sort de la légalité ce ne peut être que pour un but important, pour un grand objet à remplir. Les lois d'exception n'appartiennent qu'aux gouvernements libres et eux seuls ont le droit d'en avoir. »[6]
Après que les élections partielles de 1821 eurent consolidé la majorité ultra-royaliste, la Chambre des députés vota, lors de la discussion de l'Adresse, une phrase relative à la politique étrangère dont les sous-entendus outragèrent Louis XVIII[7], ce qui entraîna la démission du duc de Richelieu, imité par le baron Pasquier (13 décembre 1821).
Le 24 septembre précédent, ce dernier avait été nommé pair de France. Il prit sa retraite comme ministre des Affaires étrangères le 13 février 1822. À la Chambre des pairs, il se rapprocha de l'opposition constitutionnelle, vota contre le droit d'aînesse, contre la loi sur le sacrilège, contre la loi de tendance, contre la conversion des rentes. Dans ses improvisations, d'une abondante facilité, il fit preuve d'une rare présence d'esprit et d'un sang-froid dédaigneux de toutes les attaques.
En 1828, il refusa d'entrer dans le ministère Martignac.
[modifier] Sous la monarchie de Juillet
Le baron Pasquier se rallia, après la révolution de 1830, à la monarchie de Juillet. Il aurait déclaré à cette occasion : « Le serment politique est une contremarque pour rentrer au spectacle. »[8] Nommé président de la Chambre des pairs le 3 août 1830, il occupa cette fonction jusqu'à la révolution de 1848.
En cette qualité, il eut à diriger le procès des ministres de Charles X, ceux des insurgés d'avril, de Giuseppe Fieschi, d'Armand Barbès, du prince Louis-Napoléon Bonaparte après la tentative de Boulogne-sur-Mer, des ministres Teste et Cubières. Selon Victor Hugo, il se montra fort au-dessous de sa tâche : « Il avait quatre-vingt-deux ans[9], et à quatre-vingt-deux ans, on n'affronte ni une femme, ni une foule. » Il soutint la politique personnelle de Louis-Philippe et, lors de la formation de la coalition de 1839, prit le parti du gouvernement et du comte Molé.
En 1837, le roi fit revivre pour lui le titre de chancelier de France. Il fut créé duc Pasquier le 16 décembre 1844 avec lettres patentes du 3 février 1845 et autorisation de réversion du titre en faveur de son petit-neveu, qu'il avait adopté, Gaston d'Audiffret (1823-1905), fils de sa nièce, Gabrielle Pasquier et du comte Florimond-Louis d'Audiffret.
Ami de Chateaubriand, il avait été candidat à l'Académie en 1820 comme « ami des lettres » mais il ne fut élu que le 17 février 1842, en remplacement de Mgr Frayssinous, contre Alfred de Vigny qui obtint 8 voix. Il avait un salon littéraire et créa à l'Académie, avec le duc de Broglie et le duc de Noailles, qu'il patronna, le « parti des ducs ». Lorsqu'il mourut, Napoléon III eut un moment l'idée de lui succéder.
La révolution de 1848 avait mis un terme à sa carrière politique. Deux ans avant sa mort, il observait : « Je suis l'homme de France qui ait le plus connu les divers gouvernements qui se sont succédé chez nous : je leur ai fait à tous leur procès. »
Il eut une très longue liaison avec la comtesse de Boigne : « C'était une croyance assez répandue aux Tuileries et au Luxembourg, écrit Montalivet, qu'après la mort de Mme Pasquier, le Chancelier avait épousé en Angleterre Mme de Boigne [...] Je suis de ceux qui ont cru au mariage secret. Quoi qu'il en soit, pendant la dernière partie de sa vie, le duc Pasquier vécut avec la comtesse de Boigne dans la plus douce et la plus constante intimité. »
[modifier] Œuvres
- Discours prononcés dans les chambres législatives de 1814 à 1836, 1842 (4 vol.)
- L'interprétation des Institutes de Justinien, avec la conférence de chasque paragraphe aux ordonnances royaux, arrestz de parlement et coustumes générales de la France, ouvrage inédit d'Étienne Pasquier, publié par M. le duc Pasquier, 1847 – Réédition en fac-similé : Slatkine, Genève, 1970
- Histoire de mon temps. Mémoires du chancelier Pasquier, publiés par M. le duc d'Audiffret-Pasquier, 1893-1895 (6 vol.)
[modifier] Références
[modifier] Source
- « Étienne-Denis Pasquier », dans Adolphe Robert, Edgar Bourloton et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français (1789-1891), XIXe siècle [détail édition](Wikisource)
[modifier] Liens externes
[modifier] Notes
- ↑ Il est d'usage de prononce Pâquier.
- ↑ 153 voix sur 166 votants et 228 inscrits
- ↑ 98 voix sur 183 votants et 230 inscrits
- ↑ 102 voix sur 183 votants et 228 inscrits
- ↑ 3.874 voix sur 7.378 votants et 9.677 inscrits
- ↑ cité par le Dictionnaire des parlementaires français
- ↑ « Nous vous félicitons, sire, de vos relations constamment amicales avec les puissances étrangères, dans la juste confiance qu'une paix si précieuse n'est point achetée par des sacrifices incompatibles avec l'honneur de la nation et la dignité de la couronne. »
- ↑ cité par le Dictionnaire des parlementaires français
- ↑ En fait deux ans de moins.
Précédé par Denis-Luc Frayssinous |
Fauteuil 3 de l’Académie française 1842-1862 |
Suivi par Jules Dufaure |